vendredi 30 juin 2000
L’Imâm des musulmans, l’Exemple des pieux, le Savant du Hadîth et la Référence des savants, Abû ʿAbd Allâh Muhammad Ibn Ismâʿîl Ibn Ibrâhîm Ibn Al-Mughîrah Ibn Bardizbah, surnommé Al-Bukhâri, en référence à sa ville natale, Bukhârah.
L’Imâm Al-Bukhâri naquit en 194 AH, à Bukhârah, dans la région de Khorasân. Le père de l’Imâm Al-Bukhârî, un homme aisé, mourut alors que son fils était très jeune et c’est son épouse qui prit le plus grand soin de l’éducation de leur fils orphelin. Ahmad Ibn Al-Fadl Al-Balkhî rapporte au sujet de l’Imâm Al-Bukhârî : « Dans son enfance, il perdit la vue. [Un jour], sa mère vit le prophète Ibrahîm — que la paix soit sur lui — dans un rêve ; il lui annonça la bonne nouvelle : « Dieu a rendu la vue à ton fils grâce à tes nombreuses prières et invocations ». » Ainsi Dieu exauça les prières de sa mère et l’Imâm recouvrit sa vue.
Avide de science et doué d’une mémoire exceptionnelle, il commença à étudier les hadîths à l’âge de onze ans en mémorisant la compilation de hadîths de Ibn Al-Mubârak (soufi et grand juriste de son temps). Il finit la mémorisation du Coran avant l’âge de seize ans. On relate que dans sa jeunesse il connaissait déjà par cœur soixante-dix mille hadiths de notre prophète Muhammad — paix et bénédictions sur lui.
À l’âge de seize ans, après avoir appris le Hadîth par les spécialistes de cette science à Bukhârah, il voyagea avec sa mère et s’installèrent à la Mecque. Pendant leur séjour, il étudia le Hadith par d’éminents savants de la Mecque, notamment Al-Humaydî qui lui enseigna aussi la jurisprudence de l’Imâm Ash-Shâfiʿî. À l’âge de 18 ans, il écrivit son premier livre sur les compagnons du prophète Muhammad — paix et bénédictions sur lui — et les successeurs (la génération qui suivit celle des compagnons), qu’Allâh les agrée.
Il dit à Abû Jaʿfar Ibn Muhammad Abû Hâtim Al-Warrâq : « J’ai étudié les livres d’Ibn Al-Mubârak et Wakîʿ et je connaissais déjà leurs écrits par cœur à l’âge de seize ans. A dix-huit ans, j’ai commencé à compiler les comportements et les paroles des Compagnons et des Successeurs [en arabe : at-tâbiʿûn]. C’était au temps de ʿUbayd Allah Ibn Mûsâ. J’ai rédigé Kitâb At-Târîkh [i.e. Le livre d’Histoire] près de la tombe du Prophète — paix et bénédictions sur lui — les nuits de lune. [...] ».
Dans l’espoir d’acquérir le savoir et de compiler des hadiths exacts (ou intègres) [en arabe : sahîh], il parcourut la terre à la recherche des savants du hadîth. Il fut le disciple de nombreux savants de la Mecque, de Médine, de Damas, de ʿAsqalân, de Hims, du Caire, de Baghdâd, de Bassora, de Kûfah et de nombreuses autres villes. Il acquit le savoir en compagnie de savants tels que : l’Imâm Ahmad Ibn Hanbal, Abu ʿÂsim An-Nabîl, Muhammad Ibn ʿÎsa At-Tabbâʿ et Ishâq Ibn Mansûr. Parmi ses disciples, nous pouvons citer plusieurs grands noms comme : Muslim, Abû Zurʿah, Abû Hâtim, At-Tirmidhî, Al-Marwazî, Sâlih Ibn Muhammad Jazarah, Ibn Khuzaymah, As-Sarrâj.
Dieu dota l’Imâm d’une mémoire exceptionnelle et sa contribution
aux sciences du Hadîth est sans pareil. ʿAbd Ar-Rahmân Ibn Muhammad Al-Bukhâri rapporte qu’il entendit Muhammad Ibn Ismâʿîl dire : « J’ai rencontré plus de mille hommes [de science] du Hidjâz [en Arabie] , Iraq, Syrie, Égypte et Khorasân » et il poursuivit jusqu’à ce qu’il dit : « Ils soutenaient sans exception le principe stipulant : « La Religion repose sur des actes et des paroles, et le Coran est la Parole d’Allah ». »
Ibn ʿAdiyy dit : « Un nombre de savants apprirent qu’Al-Bukhâri serait prochainement de passage à Baghdâd. Ils choisirent cent hadiths dont ils brouillèrent les chaînes de transmission et les textes, donnant ainsi à chaque Hadîth une chaîne de transmission autre que la sienne. Chaque savant prit dix de ces hadiths et s’apprêta à mettre Al-Bukhâri à l’épreuve durant leur rencontre. Les gens s’assemblèrent et l’un des savants confronta Al-Bukhâri avec le premier de ses dix hadîths.
Il répliqua « Je ne le connais pas ». Le savant lui cita un autre hadîth. Il répondit « Je ne le connais pas. » et ainsi de suite jusqu’au dixième hadîth. Les gens avertis [initiés à la science du hadith] parmi l’audience se regardèrent et dirent : « L’homme s’y connaît. », les autres pensèrent que c’est un ignorant. Puis un autre savant exposa à son tour ses dix hadîths, puis un autre, jusqu’au centième hadîth et Al-Bukhâri répondait invariablement « Je ne le connais pas. ». Quand il vit qu’ils avaient terminé, il se retourna vers le premier savant et dit « La chaîne authentique de ton premier hadîth est ceci, celle de ton deuxième hadîth est ainsi etc. » Il fit de même avec le deuxième savant, puis le troisième, et il poursuivit avec chacun d’eux jusqu’au centième hadîth. À ce moment, tout le monde eut la certitude qu’il était un Hâfidh [i.e. ils reconnurent la qualité de sa mémorisation]. »
Al-Warrâq dit « j’ai entendu Sâlim Ibn Mujâhid dire : « Je rendais visite à Muhammad Ibn Sallâm Al-Bikandî et il me dit : « Si tu étais venu plus tôt, tu aurais vu un garçon qui connaît par cœur soixante-dix mille hadîths. ». Je suis sorti à sa recherche. Lorsque je l’ai trouvé, je demandais « Est-ce toi qui dit connaître par cœur soixante-dix mille hadîths ? », il [i.e. Al-Bukhâri] répondit
« Oui, et plus encore, et jamais je ne te citerai un hadîth d’un Compagnon ou un Successeur sans que je sache la date et le lieu de
leur naissance et de leur mort, et là où ils vécurent. Et je ne narre [de leurs hadîths] que ce qui est certain et fondé sur un principe de la religion de Dieu, dans le Livre de Dieu et La Sunnah de Son Messager ». Ainsi Al-Bukhâri fut non seulement un muhaddith d’exception [un spécialiste du Hadith] mais également un grand juriste (faqîh). D’ailleurs Al-Khozâʿi dit : « Al-Bukhâri est le faqîh de cette Ummah »
( faqih signifie spécialiste en jurisprudence.)
Ibn ʿAdiyy dit : Muhammad Ibn Al-Qumîsi me rapporta : j’ai entendu Muhammad Ibn Hamdawayh dire : j’ai entendu Muhammad Ibn Ismâʿîl [Al-Bukhâri] dire : « je connais par cœur cent mille hadîths intègres [i.e. hadîth sahîh] et 200 000 hadîths d’authenticité questionnable. »
Les témoignages faits au sujet de la science de l’Imâm et de ses qualités sont très nombreux. Nous nous contenterons ici de quelques exemples :
L’Imâm Ibn Khuzaymah dit : « Je n’ai vu sur terre plus savant
en Hadîth que Muhammad Ibn Ismâʿîl Al-Bukhâri ».
Muhammad Bashshâr disait : "Les sommités en terme de mémorisation
sont au nombre de quatre sur terre : Abû Zurʿah à Rayy, Muslim à Naysabûr, ʿAbd Allah Ad-Dârimî à Samarqand et Muhammad Ibn Ismâʿîl à Khorasân."
Qutaybah Ibn Saʿîd dit à son sujet : "Il était à son époque ce que ʿOmar fut parmi les Compagnons, et si Muhammad Ibn Ismâʿîl vivait du temps des compagnons, il aurait été un phare.(ayah)."
Al-Khozâʿî dit : « Al-Bukhâri est le faqîh de cette Ummah ».
Il fut l’exemple du dévot et du savant éprouvant une crainte révérencielle envers Allah. C’est l’homme aux prières nombreuses et au cœur recueilli et éveillé. Pendant le mois du ramadan, il récitait le Noble Coran en entier dans la journée, et un tiers du Coran avant l’aube tous les jours.
Al-Farabarî dit : Muhammad Ibn Ismâʿîl m’a dit « Je n’ai jamais écrit un hadîth dans le Sahih [son livre Sahîh Al-Bukhâri] sans avoir effectué al-ghusl [ablutions majeures] et prié deux rakʿah au préalable. »
Al-Warrâq rapporte : « Pendant mes voyages avec Abû ʿAbd Allâh, lorsqu’il arrivait que nous dormions dans la même maison, je le voyais se lever la nuit entre quinze et vingt fois. Chaque fois, il allumait sa lampe et il extrayait des hadîths en les annotant. Puis il s’allongeait de nouveau. A l’approche de l’aube, il avait l’habitude de prier trente rakʿah [2 par 2] et il ne me réveillait jamais. Je lui dis une fois : « Tu endures cela pour toi-même, pourquoi ne me réveilles-tu pas aussi [pour prier] ? Il répondit : « Tu es un homme jeune et je n’aime pas troubler ton sommeil. ». »
L’Imâm rédigea différents ouvrages de hadîths. Dans son livre Al-Djâmiʿ As-Sahîh [littéralement : "La Somme Authentique"], après un examen minutieux et rigoureux, il enregistra des paroles du Prophète — paix et bénédictions sur lui — dont la chaîne de transmission ne se compose que de transmetteurs justes et fiables, sans défaut ni brisure. Pendant seize ans, il scruta 600 000 hadîths et retint 7 275 hadîths dont l’authenticité est au-delà du moindre doute.
Dans l’étude des chaînes de transmission, il ne disait jamais d’un homme « c’est un menteur ! », il disait « telle personne l’a démenti », « telle personne l’a traité de menteur », « non digne de confiance ». Lorsqu’Al-Bukhâri qualifiait un homme de « non digne de confiance », il ne narrait pas de hadîth de lui.
Il y a un consensus parmi tous les savants de l’Islam au sujet de l’abondance exceptionnelle de son savoir, ses bonnes manières, son caractère noble et généreux. Son livre précieux Al-Djâmiʿ As-Sahîh est la meilleure référence de tous les temps en matière de hadîths authentiques.
La Citadelle du Hadîth, le maître des muhaddithînes, le Rempart des sciences de la tradition, le flambeau de la communauté, l’exemple du pieux, l’Imâm de l’Islam, Abû ʿAbd Allâh Al-Bukhâri retourna auprès d’Allah en 256 AH, à Samarqand (v. d’Ouzbékistan, Asie centrale). Qu’Allah le récompense pour ce qu’il fit et ce qu’il fut pour l’islam et qu’Il lui fasse miséricorde. Âmîn.
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