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De la bonne compréhension de la question de l’abstention

Des opinions non approfondies

vendredi 15 septembre 2006

Les propos d’Ibn As-Samʿânî

Ibn As-Samʿânî dit que lorsque le Prophète — paix et bénédictions sur lui — s’abstient d’une chose nous devons suivre son exemple. Il argua que lorsque les Compagnons virent le Prophète — paix et bénédictions sur lui — s’abstenir de manger du lézard, ils s’arrêtèrent et l’interrogèrent à ce sujet.

Je réponds que la réponse fournie par le Prophète — paix et bénédictions sur lui — indiquant que (le lézard) n’est pas illicite — comme nous l’avons vu précédemment — démontre que son abstention n’implique pas automatiquement que la chose en question est illicite. Ce hadîth ne confirme pas son opinion. Au contraire, il l’infirme.

De plus, nous avons vu que l’abstention admettait diverses lectures, comment serions-nous tenus de suivre son exemple vis-à-vis d’une chose susceptible d’être une coutume, ou un oubli, ou encore autre chose parmi les lectures possibles que nous avons vues précédemment ?

Les propos d’Ibn Taymiyah

On l’interrogea au sujet de celui qui visiterait les tombes et demanderait secours à leurs occupants, concernant une maladie dont il souffre lui-même ou dont souffrirait son cheval ou son chameau, et demanderait à en être débarrassé ou quelque chose de ce genre.

Il répondit très longuement et dit entre autres : « Nul ne le fit parmi les Compagnons ni les Successeurs et aucun imam ne l’ordonna », c’est-à-dire qu’ils ne demandèrent pas au Prophète — paix et bénédictions sur lui — de prier en leur faveur après son décès comme ils avaient l’habitude de le faire de son vivant.

Je réponds à cela : Le lecteur sait parfaitement que cela n’est pas une preuve valide de ce qu’il affirme pour plusieurs raisons. D’abord, le fait que les Compagnons n’aient pas fait cela peut très bien être fortuit, c’est-à-dire qu’il se trouve qu’ils ne lui demandèrent pas de faire des invocations en leur faveur après son décès. Cela peut aussi signifier que cela n’est pas permis à leurs yeux. Il se peut aussi que cela soit permis mais qu’une meilleure alternative s’offrait à eux, alors ils optèrent pour ce qui était meilleur. D’autres hypothèses sont également possibles. Or la règle stipule que « ce qui admet plusieurs interprétations n’a plus valeur d’argument ». D’autre part, on peut avancer en appui du fait qu’ils ne s’en abstinrent pas considérant que cela n’était pas permis le fait que le Compagnon Bilâl Ibn Al-Hârith Al-Muzanî se rendit près de la tombe du Prophète l’année de la grande sécheresse (ʿÂm Ar-Ramâdah) et dit : « Ô Messager d’Allâh, demande la pluie pour ta communauté. » Alors il le vit en songe lui dire : « Va voir ʿUmar et informe-le que vous allez recevoir la pluie et dis lui : applique-toi, applique-toi. » Il en informa ʿUmar qui pleura et dit : « Ô Allâh, je ne suis point négligent, sauf que certaines choses dépassent ma capacité. » ʿUmar ne le blâma aucunement pour son initiative. Or, si cela n’était pas permis aux yeux des Compagnons, ʿUmar n’aurait pas manqué de lui reprocher son acte. Ibn Kathîr jugea que ce hadith a une chaîne de transmission authentique.

Un hadîth authentique qui n’invalide pas notre propos

Al-Bukhârî inclut dans son Sahîh un chapitre intitulé « L’imitation des actes du Prophète — paix et bénédictions sur lui — » où il rapporta d’après Ibn ʿUmar que : « Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — porta une bague en or, alors les gens portèrent eux aussi des bagues en or. Puis, il dit : "J’ai porté une bague en or." Rejetant sa bague, il dit : "Je ne la porterai plus jamais." Alors les gens rejetèrent leurs bagues. » Le Hâfidh [1] commenta : « Il s’est contenté de ce hadith car il illustre le fait que les gens imitaient le Prophète dans ses actes et dans ses abstentions. »

Je dis : La phrase « dans ses abstentions » relève de l’abus de langage car le rejet est un acte. Dans ce récit, les gens imitèrent son acte, tandis que l’abstention en est une conséquence. De même, lorsqu’il ôta ses sandales pendant la prière, les gens suivirent son exemple et ôtèrent leurs sandales, ce qui correspond à un acte dont la conséquence est l’abstention. Or, ce n’est pas de ce cas de figure que nous traitons ici manifestement.

De plus, nous ne rejetons point le fait d’imiter les actes émanant du Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Au contraire, la réussite et le bonheur y résident, à notre avis. Mais nous ne disons pas que les choses qu’il n’a pas accomplies sont illicites, comme la célébration du mawlid [2] ou la célébration de la nuit d’Al-Miʿrâj [3], car cela est un mensonge sur le compte d’Allâh, étant donné que l’abstention n’implique pas la prohibition.

De même, lorsque les pieux prédécesseurs (le Salaf) s’abstiennent d’une chose — c’est-à-dire qu’ils ne la font pas —, cela ne signifie pas qu’elle est interdite. L’Imâm Ash-Shâfiʿî dit : « Toute chose ayant un fondement dans la législation n’est pas une innovation, quand bien même le Salaf ne l’aurait pas faite. » Car le non accomplissement d’une chose peut tenir à une excuse valable à leur époque, ou au fait qu’ils optaient pour une meilleure alternative, ou parce que cette chose n’était pas connue de tous.

P.-S.

Traduit de l’arabe de Husn At-Tafahhum wad-Dark li-Mas’alat At-Tark de Sheikh ʿAbd Allâh Al-Ghumârî.

Notes

[1Il s’agit de l’Imâm Ibn Hajar Al-ʿAsqalânî, le célèbre commentateur du Sahîh d’Al-Bukhârî. NdT.

[2Conférer le dossier concernant le mawlid. NdT.

[3Conférer le dossier concernant Al-Isrâ’ wal-Miʿrâj (Le voyage nocture et l’ascension du Prophète — paix et bénédictions sur lui —). NdT.

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