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En Compagnie de l’Élu

Abraham et La Mecque

lundi 24 décembre 2007

Dans une maison où l’on fabriquait des idoles, le jeune homme grandit en observant son père les fabriquer lui-même. Tantôt, il les posait par terre, tantôt, il les martelait, les façonnant à sa guise avant de les vendre aux gens de son peuple. Ces derniers les adoraient et leur présentaient des offrandes pensant qu’elles étaient capables de secourir et de nuire.

Le jeune homme se mit à méditer ce qu’il voyait. Il observa l’étendue de l’univers et contempla les planètes lumineuses qu’il renferme, la lune et le soleil miroitant à l’horizon, se levant et se couchant, et répandant leurs bienfaits sur les créatures. Il constata aussi l’insouciance de son peuple à l’égard de ces grâces et son indifférence vis-à-vis de Celui qui les assujettit. Il se tourna alors vers Celui Qui créa toutes ces créatures et les assujettit afin de lui demander la guidance.

Ainsi la miséricorde de Dieu — Exalté soit-Il — se manifesta-t-elle sur le jeune homme et éclaira sa clairvoyance. Son cœur s’illumina et il connut Dieu. La première chose qui lui vint à l’esprit fut de sauver son père de son égarement. Cependant, ce dernier le surprit par une réponse extrêmement dure malgré l’amabilité, la gentillesse, et la politesse de ses propos soutenus par un argumentaire clair.

Le jeune homme se trouva dans l’obligation de fournir à ses congénères la preuve de leur indigence. Il se rendit discrètement dans leur sanctuaire et détruisit leurs idoles sauf la plus grande parmi elles afin de s’en servir comme argument. Furieux, les gens convoquèrent le jeune homme, l’encerclèrent et lui demandèrent si c’était lui qui avait commis cet acte. Il pointa alors le doigt vers la grande idole l’accusant de l’avoir commis, puis leur demanda d’interroger les idoles détruites sur celui qui les avait détruites. Interloqués, ils faillirent reconnaître la Vérité. Mais l’arrogance et l’esprit partisan s’emparèrent d’eux et ils décidèrent de se venger impitoyablement du jeune homme.

Les chefs de la mécréance se résolurent à brûler publiquement le jeune homme afin qu’il serve de leçon à quiconque songerait à dénigrer leurs dieux. Pendant plusieurs jours, ils dressèrent un bûcher et veillèrent à le protéger et à l’alimenter en bois. La force de la flamme était telle qu’ils se demandèrent de quelle manière ils allaient y introduire le jeune homme. Finalement, ils décidèrent d’ériger un échafaud du haut duquel ils pourraient jeter le jeune homme dans le feu à distance. Aussitôt dit, aussitôt fait.

Gabriel descendit et demanda au jeune homme : « As-tu besoin d’assistance Abraham ? » Abraham répondit alors avec force confiance : « De ta part, non. Quant à Dieu, Sa connaissance de ma situation suffit. » C’est alors que l’ordre divin fut adressé au feu de devenir fraîcheur et paix pour Abraham. Le feu ne brûla que les cordes qui le ligotaient. Libéré, il sortit du feu sain et sauf au vu et au su de tout le monde.

Abraham décida ensuite d’émigrer dans le sentier de Dieu quittant ainsi la terre de la mécréance et demandant à Dieu de le guider vers le droit chemin et de lui accorder une descendance pieuse. Accompagné de son épouse Sarah, il passa sur son chemin par une ville gouvernée par un despote mécréant. Lorsque la beauté d’une femme plaisait à ce dernier, il s’emparait d’elle et tuait son mari. Lorsqu’il eut vent de l’arrivée d’un homme accompagné d’une belle femme, il envoya des gens se renseigner sur elle. Abraham répondit qu’il s’agissait de sa sœur. Alors le roi la convoqua. Abraham lui dit : « Ô Sarah, je ne connais sur terre aucun croyant excepté moi et toi. Tu es ma sœur dans la voie de Dieu. Si le roi t’interroge, dis-lui que tu es ma sœur. » Angoissée, Dame Sarah se rendit chez le roi en demandant à Dieu de la garder et de la protéger contre l’atteinte de ce despote, prière que Dieu exauça. Lorsque le roi tenta de s’emparer d’elle, il fut paralysé sur-le-champ. Alors, il promit de ne pas lui porter atteinte si elle le libérait. Ce sur quoi elle invoqua Dieu à cette fin de peur qu’on l’accuse de l’avoir paralysé. Quand Dieu le libéra, il tenta de nouveau de s’emparer d’elle, acte qui lui valut d’être de nouveau paralysé. Cette scène se répéta trois fois et, convaincu que Sarah était hors d’atteinte, le roi la laissa partir. Il lui offrit également une esclave prénommée Hâjar pour se faire pardonner.

Heureuse de la protection de Dieu et de la guidance du roi, Dame Sarah revint à Abraham et lui raconta l’histoire. Hâjar crut ensuite en Dieu et en Abraham qui, par la suite, l’épousa. Elle lui engendra Ismâʿîl, qui fut son fils aîné car Dame Sarah était stérile.

Dieu ordonna ensuite à Abraham d’emmener Hâjar et son fils à La Mecque qui, à cette époque, n’était guère une ville et n’était habitée par personne. Elle n’était qu’un carrefour pour les caravanes provenant du nord et du sud de la péninsule arabe. Vallée située entre les montagnes, elle servait d’espace de détente et d’échanges commerciaux entre les caravanes. À peine installé avec son épouse et son enfant à La Mecque, Abraham reçut l’ordre divin de les abandonner et de retourner vers le Shâm (Grande Syrie).

Abraham obéit à l’ordre et Hâjar se soumit à sa destinée, confiante que Dieu la préservera et son fils. Les provisions se terminèrent aussitôt et son sein tarit alors que personne ne se trouvait dans cet endroit désolé. Hâjar courut entre les monts As-Safâ et Al-Marwah à la recherche d’une âme pouvant les secourir tandis que les cris de son enfant couvraient progressivement le bruit de ses pas. Elle poursuivit sa course tandis que son espoir d’être sauvée s’amenuisait jusqu’à ce qu’elle eut parcouru la distance entre les deux monts à sept reprises.

Soudain, l’enfant cessa de crier et le silence régna sur la vallée. Préoccupée, Dame Hâjar alla jeter un coup d’œil sur son fils, et le trouva en train de jouer dans une source d’eau jaillissante. Elle se jeta sur l’eau tentant de la rassembler de ses mains tout en répétant : « Zimmî, Zimmî (coule avec abondance) » de peur que la terre ne l’absorbe complètement. Cependant, la source ne cessa pas de couler et devint douce. Dame Hâjar but à satiété et fut rassurée de la protection de Dieu pour elle et pour son fils. Les oiseaux commencèrent à tournoyer autour de la vallée ; chose qui attira l’attention des caravanes qui se hâtèrent de découvrir ce bonheur. Hâjar commença alors à échanger l’eau contre la nourriture.

L’enfant grandit et Abraham retourna les voir. Aussitôt la famille rassemblée, le père fit un songe — et les songes des prophètes relèvent de la révélation véridique — dans lequel il se vit sacrifiant son fils unique. Le père décida d’obéir à l’ordre et consulta son fils dans cette affaire. Comme son père, ce dernier se soumit à l’ordre divin et l’accepta en espérant Sa récompense. C’est alors que ce sacrifice fut substitué par un grand sacrifice descendu du ciel.

Dieu révéla à Abraham de s’aider de son fils Ismâʿîl dans la construction de la Kaʿbah à l’endroit qu’Il lui indiqua. Cette dernière fut construite et la religion d’Abraham se propagea dans La Mecque et ses environs. Son étendard fut ensuite porté par Ismâʿîl que Dieu élit en tant que messager et prophète. Ismâʿîl se maria et s’installa à La Mecque où l’Islam se propagea [1]. La Kaʿbah devint la direction de la prière et la destination des pèlerins venus effectuer des circumambulation autour d’elle et accomplir leurs rites conformément à la religion droite et clémente d’Abraham.

Les jours et les années s’écoulèrent et Dieu exauça la prière d’Abraham de faire que La Mecque soit une cité sure et d’octroyer Ses bienfaits à ses habitants. Certaines tribus s’y installèrent également et bâtirent leurs demeures autour de la Kaʿbah dont Ismâʿîl avait la garde ainsi que celle du puits de Zamzam. L’amour des gens et leur fidélité envers lui restèrent dans les cœurs jusqu’à ce que Dieu — Exalté soit-Il — le rappelle auprès de Lui. Dans la Mosquée Sacrée, il fut enterré dans Hijr Ismâʿîl là où sa mère, Dame Hâjar, avait également été enterrée.

C’est alors que certaines tribus commencèrent à convoiter le contrôle de La Mecque et l’honneur d’obtenir la garde de la Kaʿbah et du puits de Zamzam. Cette charge revenait à la tribu de Jurhum, reliée par les liens de la belle alliance à Ismâʿîl, mais la tribu de Khuzâʿah s’apprêta à s’emparer de La Mecque. Par conséquent, le chef de la tribu de Jurhum remblaya le puits de Zamzam, y enterra l’or qui ornait la Kaʿbah constitué de deux gazelles, des épées et des boucliers. Il rassembla ensuite les enfants et les petits-enfants d’Ismâʿîl et les emmena au Shâm.

C’est ainsi que la tribu de Khuzâʿah s’empara de La Mecque et de la Maison Sacrée, qui était devenue la destination de gens venus de toutes parts, surtout qu’elle était sur la route des caravanes voyageant du sud vers le Shâm et du Shâm vers le Yémen. Grâce à la bénédiction de la Kaʿbah et à la prière d’Abraham, les habitants de La Mecque vécurent dans la prospérité. Les petits-fils d’Ismâʿîl gardèrent cependant l’espoir de retourner à La Mecque et à la Kaʿbah que leurs aïeux, Abraham et Ismâʿîl — paix sur eux —, avaient bâtie.

P.-S.

Traduit de l’arabe du livre de Sheikh Yâsîn Rushdî, Fî Rihâb Al-Mustafâ (En Compagnie de l’Élu), disponible au format PDF sur le site Mouassa.org.

Notes

[1Littéralement, "Islam" signifie en arabe la soumission. Dans le Coran, l’islam ou la religion de la soumission à Dieu est la religion de tous les prophètes à commencer par Adam jusqu’au sceau des prophètes, Muhammad — paix et bénédictions sur lui —. Bien que chacun de ces prophètes ait reçu une législation particulière, leurs messages sont unis par un même esprit : celui d’appeler l’Homme à se soumettre à Dieu et à Lui obéir. NdT.

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