jeudi 23 janvier 2003
Que pense la religion d’un individu ayant eu plusieurs occasions pour accomplir le pèlerinage mais ne l’accomplit pas ? Sera-t-il puni pour ce retard ?
Louanges à Allâh et paix et bénédictions sur le Messager d’Allâh.
Le pèlerinage est une obligation pour celui qui a la capacité de l’accomplir comme le stipulent Allâh et Son Prophète — paix et bénédictions sur lui. Les savants considèrent unanimement qu’il est dû une seule fois dans la vie comme en témoigne le hadîth rapporté par Al-Bukhârî et Muslim et d’autres compilateurs stipulant que lorsque le Prophète — paix et bénédictions sur lui — ordonna aux gens d’accomplir le pèlerinage, on s’enquit : "Est-ce tous les ans ?" Il répondit : "Si je répondais par l’affirmative, cela deviendrait une obligation et vous en seriez incapables."
Toutefois, si les conditions favorables étaient réunies, le pèlerinage doit-il être accompli immédiatement ou bien est-il permis de le repousser à une autre année ? La plupart des savants [1] estiment qu’il doit être accompli immédiatement et que celui qui le repousse à une année ultérieure commet un péché si bien que s’il mourait, il en serait comptable à moins qu’Allâh ne lui pardonne. Ils fondent cet avis sur le hadîth rapporté par Ahmad, Ibn Mâjah et Al-Bayhaqî : "Hâtez le pèlerinage car nul n’est à l’abri de la maladie, de la perte de sa monture, ni de la pauvreté." Et dans une variante : "Hâtez le pèlerinage car nul ne sait ce qui peut lui arriver."
L’Imâm Ash-Shâfiʿî, quant à lui, dit que le pèlerinage est doit être accompli mais pas nécessairement dans l’immédiat, c’est-à-dire que celui qui le retarde ne commet pas de péché tant qu’il l’accomplit avant de mourir. Il se fonde sur le fait que le Messager — paix et bénédictions sur lui — retarda son pèlerinage à l’an 10 A.H. où il fut accompagné de ses épouses et d’un grand nombre de ses Compagnons, alors qu’il avait été prescrit dès l’an 6 A.H. Si le pèlerinage était dû immédiatement, le Prophète ne l’aurait pas retardé. Ash-Shâfiʿî ajoute qu’il est préférable de l’accomplir au plus vite selon les hadîths sus-mentionnés qu’il interprète comme une recommandation (nadb) et non comme une obligation. Il joint à ces hadîths celui que rapportent Ibn Hibbân dans son Sahîh et Al-Bayhaqî selon lequel le Prophète — paix et bénédictions sur lui — a dit : "Allâh — Exalté et Glorifié soit-Il — dit : ’Le serviteur à qui je donne la santé et l’aisance dans la vie et qui passe cinq ans sans venir vers moi est certes démuni.’"
Notons que lorsque le Très-Haut a dit : "Et c’est un devoir envers Allâh, pour les gens qui en ont les moyens, que de se rendre en pèlerinage à la Maison.", Il ajouta : "Et quiconque mécroit... Allâh Se passe largement des mondes." Al-Hasan Al-Basrî commente : "Ce que l’on entend par kufr dans ce verset c’est le détournement du pèlerinage et son abandon" au même titre que le hadîth rapporté par Muslim stipulant que celui qui abandonne la prière est mécréant. Ibn ʿAbbâs et les spécialistes disent que la mécréance ne se caractérise que par la négation de l’obligation et, en l’espèce, la négation que le pèlerinage est une obligation. Mais si l’individu croit que le pèlerinage est bien une obligation mais manifeste de la paresse dans son accomplissement, il n’est pas considéré comme mécréant mais plutôt comme un croyant désobéissant. S’il n’accomplit pas le pèlerinage alors qu’il en avait les moyens, Allâh lui demandera des comptes après son décès, l’enverra en Enfer à moins qu’Il ne lui pardonne, pour finalement l’admettre au Paradis. Quant au hadîth : "Celui qui possède des vivres et une monture capable de l’emmener jusqu’à la Maison d’Allâh [2] mais n’accomplit pas le pèlerinage peut aussi bien mourir en tant que Juif ou Chrétien." rapporté par At-Tirmidhî, le jugeant "singulier et connu par cette voie uniquement" et rapporté similairement par Al-Bayhaqî, ce hadîth ne prouve pas la mécréance catégoriquement. Même s’il était considéré comme authentique, il ne désignerait que le négateur et serait interprété comme une incitation à hâter le pèlerinage.
Allâh est certes le plus savant.
Traduit de l’arabe à partir de la Banque de Fatâwâ du site Islamonline.net. La version originale est consultable sur archive.org.
[1] Le jumhûr désigne la plupart ou la majorité des savants.
[2] Traduction littérale de Bayt Allâh, qui désigne la Kaʿbah.
© islamophile.org 1998 - 2024. Tous droits réservés.
Toute reproduction interdite (y compris sur internet), sauf avec notre accord explicite. Usage personnel autorisé.
Les opinions exprimées sur le site islamophile.org sont celles de leurs auteurs. Exprimées dans diverses langues étrangères, ces opinions sont mises à la portée des lecteurs francophones par nos soins, à des fins d'information, de connaissance et de respect mutuels entre les différentes cultures et religions du monde.