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Le Soufisme et l’Islam

La méthodologie soufie

lundi 10 septembre 2001

Si la méthodologie scientifique matérielle est incapable d’étudier la vérité du tasawwuf et son essence, et si la méthodologie cartésienne a également échoué, les Soufis sont unanimes, ainsi que les Philosophes de l’Illumination depuis Pythagore et Platon jusqu’aujourd’hui, pour déclarer une méthodologie précise, que tous agréent en toute confiance. C’est la méthodologie du cœur, celle de l’âme, ou celle de la clairvoyance (basîrah). Il s’agit d’une méthodologie bien connue, agréée par toutes les religions et élue par les écoles de sagesse, anciennes et modernes.

Allâh - Exalté soit-Il - dit : « L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, il sera interrogé ». (17 :36). Il a, Exalté Soit-Il, cité al-fu’âd (le cœur) en montrant qu’il est responsable au même titre que l’ouïe dans son champ d’action et la vue dans son domaine. L’Imâm Al-Ghazâlî - exprimant l’opinion des soufis et celle des philosophes de l’illumination - estime que la preuve tranchant en faveur de l’existence d’une connaissance non liée aux sens ou à la raison réside dans deux choses :

« la première : les merveilles de la vision véridique (ar-ru’yâ as-sâdiqah) en songe où se dévoilent des éléments de l’Inconnu (Ghayb). Si cela est possible en songe, il n’est guère impossible en état d’éveil : l’état de songe ne diffère de l’éveil que par le repos des sens, non préoccupés par le monde palpable. Combien de personnes en état d’éveil sont absorbées par elles-mêmes au point de ne rien entendre ni voir.

La deuxième : le fait que le Messager d’Allâh, paix et bénédiction d’Allâh sur lui, ait annoncé des choses de l’Inconnu (Ghayb) et du futur.

Si cela est possible pour le Prophète, paix et bénédiction d’Allâh sur lui, c’est également possible pour d’autres, en ce sens que le Prophète est une personne à qui la vérité des choses fut révélée pour réformer les créatures. Il n’est donc pas impossible de trouver dans le monde une personne à qui les vérités sont dévoilées sans pour autant être chargée de réformer les gens. Cette personne n’est pas qualifié de prophète mais de « walî » (traduction approximative : ’Saint’ ou "Bien-Aimé de Dieu").

Quiconque croit en les Prophètes et en la vision véridique en songe doit nécessairement adhérer à la vérité de la clairvoyance ou, en d’autres termes, croire en une porte du cœur qui s’ouvre sur le monde de la Royauté (Malakût) : c’est la porte d’al-ilhâm (l’inspiration) et de la révélation.

L’Imâm Al-Ghazâlî s’attache à la vision en songe comme preuve et argument de l’existence d’un moyen de connaissance autre que les sens et la raison. Il a affirmé cela dans plusieurs de ses ouvrages. Il a parlé de la Prophétie dans Al-Munqidh [min ad-dalâl], le Sauveur de l’Egarement en ces termes : « Dieu, Exalté soit-Il, a rapproché cette idée à ses serviteurs en leur donnant un aspect de la qualité de Prophète, à savoir le songe : [il arrive à ] la personne qui dort de voir ce qui sera dans l’Inconnu, soit de façon explicite ou par une métaphore qui dévoile le sens. Pour une personne qui n’a jamais connu cela, si on lui dit : « il y a des gens qui perdent conscience, comme les morts, dépourvus de leurs sens, leur ouïe, leur vue et qui connaissent des choses de l’Inconnu », elle reniera certainement cela et voudra prouver son impossibilité en disant que les forces des sens sont la raison de la prise de conscience ; ainsi celui qui ne réalise pas les choses malgré la présence des sens, ne pourrait a fortiori les réaliser en leur absence. C’est un raisonnement par analogie démenti par l’existence et la contemplation ».

Mais l’Imâm Al-Ghazâlî ne se contente pas de ses deux preuves, il s’appuie sur des éléments de la sharîʿah et relate des expériences et des anecdotes. Les signes selon lui sont :

« Et quant à ceux qui luttent pour Notre cause, Nous les guiderons certes sur Nos sentiers » (29 :69)

 Sa parole, paix et bénédiction de Dieu sur lui :

« Quiconque œuvre conformément à ce qu’il sait, Allâh lui fait hériter la science de ce qu’il ne sait pas ».

Sa Parole - Exalté soit-Il : « Ô vous qui croyez ! Si vous craignez Allâh pieusement, Il vous accordera un furqân ». On dit que le furqân est une lumière permettant de discerner entre le vrai et le faux et permettant de sortir de toute shubhah (chose ambiguë et douteuse). Le messager d’Allâh, paix et bénédiction d’Allâh sur lui, fut interrogé au sujet de : « Et celui dont Allah ouvre (sharaha) le coeur à l’Islam et qui détient ainsi une lumière venant de Son Seigneur... » (39:22), qu’est-ce que cette ouverture ? Il dit : c’est l’élargissement : lorsque la lumière est jetée dans le cœur, la poitrine s’élargit et s’ouvre. Et il a également dit, paix et bénédiction de Dieu sur lui : « Il y a dans ma communauté des muhaddathîn, des muʿallamîn (i.e. des "instruits") et des mukallamîn, et ʿOmar est de leur nombre ». Le muhaddath est mulham (inspiré), et le mulham est celui pour qui la vérité s’est dévoilée dans l’intimité de son cœur, de façon intérieure, et non par les sens extérieurs. Le Coran montre clairement que la piété est la clef de la guidance et du dévoilement (kashf). La science d’Al-Khidr n’était pas une science provenant des sens ou de la raison, mais une science seigneuriale comme l’indique Sa Parole : « et Nous lui avions enseigné une science émanant de Nous » [sourate Al-Kahf].

P.-S.

Traduit de l’arabe de Al-ʿÂrif billâh, Abû Al-ʿAbbâs Al-Mursî (Le gnostique, Abû Al-ʿAbbâs Al-Mursî) de l’Imâm ʿAbd Al-Halîm Mahmoud, aux éditions Dâr Ash-Shaʿb, Le Caire, Égypte, 1972.

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