jeudi 15 mars 2001
Salmân Al-Fârisî (qu’Allâh soit satisfait de lui) naquit dans un village nommé Jiyân situé à Ispahan, ville située entre Téhéran et Chirâz dans l’actuelle République d’Iran. Salmân (qu’Allâh soit satisfait de lui) quitta la Perse et partit à la recherche du Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - dès qu’il eut connaissance de son avènement pour se rallier à l’islam.
Un jour, Salmân (qu’Allâh soit satisfait de lui) raconta sa vie en ces termes : J’étais un jeune persan et j’habitais Ispahan dans un village dit Jiyân dont mon père fut le chef et le concitoyen le plus riche occupant le rang le plus distingué. Dès ma venue au monde, il me vouait un amour extraordinaire. Cette affection paternelle s’était accrue considérablement de jour en jour, jusqu’à ce que mon père décida de m’enfermer à la maison par crainte pour moi, tel que l’on faisait exactement avec les jeunes filles. Je faisais des progrès dans le mazdéisme au point de devenir seul responsable d’entretenir le feu que nous adorions et de ranimer sa flamme pour qu’elle demeurât ardente du jour comme de nuit. Mon père possédait un grand domaine qui nous rapportait une récolte abondante et dont il prenait constamment soin et faisait la cueillette. Un jour, ayant été retenu par quelque affaire, il fut dans l’impossibilité de s’y rendre et s’adressa à moi en disant : "O mon fils ! Comme tu le vois, je suis tout à fait absorbé et je ne peux pas m’occuper aujourd’hui du domaine. Vas-y donc et prends-en soin à ma place". Je partis alors pour cette destination.
Sur ma route, je passai par l’un de ces édifices consacrés au culte des chrétiens et j’entendis leurs voix qui en émanaient pendant la célébration de la prière. Ceci retint mon attention tant que je ne savais rien sur la foi chrétienne ou sur les autres religions, comme j’étais pendant longtemps tenu éloigné du commerce des gens par mon père. Ayant entendu leurs voix, je pénétrai dans leur église pour voir ce qu’ils étaient en train de faire. Les ayant contemplés, j’admirai leurs prières et eut une grande aptitude à embrasser leur religion. Je me dis : "Certes, cette foi est meilleure que la nôtre". Je restais auprès d’eux jusqu’au coucher du soleil en transgressant l’ordre paternel. Je leur posai alors la question : "Quelle est l’origine de cette religion ?". — "Elle provient d’Ach-Châm", répondirent-ils.
A la nuit tombante, je rentrai chez moi. Et mon père de me demander ce que j’avais fait. — "O mon père ! J’ai passé par des gens en train de prier dans leur église et j’ai été fasciné par leur religion. Je suis resté, en effet, chez eux jusqu’au coucher du soleil". Affolé, mon père me dit : "O mon fils ! Ta religion qui est celle des tes ancêtres est beaucoup meilleure que cette foi qui ne comporte aucun bien". — "Non, leur religion prévaut certainement sur la nôtre". Mes paroles effrayèrent mon père qui eut peur que je n’abjure ma religion. Sur ces entrefaites, il me cloîtra à la maison tout en m’enchaînant les pieds.
Je saisis une occurrence pour transmettre ce message aux nazaréens : "Quand une caravane en destination pour Ach-Châm (i.e. Syrie) passait par vous, veuillez m’en tenir au courant". Peu de temps après, l’occasion devint propice. Je pus alors me délivrer de mes chaînes et je sortis en leur compagnie après m’être déguisé. Une fois arrivant à Ach-Châm, je demanda : "Qui est l’homme le plus calé dans cette religion ?". — "L’archevêque placé à la tête de l’église", dirent-ils. J’allai le trouver et lui dis : "Je désire embrasser le christianisme et je voudrais bien rester auprès de vous à votre service pour que vous m’instruisiez dans la religion et que je fasse les prières, étant guidé par vous". Il consentit à ma proposition et je me suis mis alors à son service.
Cependant, je ne tardai pas à constater qu’il était un mauvais homme. Il exhortait ses adeptes à la charité en leur faisant valoir sa rétribution immense. Et dès qu’ils lui faisaient l’aumône pour qu’il la dépense dans la voie de Dieu, il s’en accaparait sans rien donner ni aux pauvres ni aux indigents, jusqu’à ce qu’il eût amassé de l’or à emplir sept jarres. Par conséquent, je l’exécrais de tout mon cœur. Peu de temps après, il meurt et quand les nazaréens s’étaient réunis pour procéder à son enterrement, je leur dis : "Cet homme était méchant. Il vous ordonnait vivement de faire l’aumône et vous incitait incessamment à la charité et quand vous la lui faisiez, il la thésaurisait sans rien donner aux pauvres". — "Comment vous le savez ?!", dirent-ils. — "Je vais vous montrer le lieu où il a enfoui son trésor", dis- je.- "Oui, montre-le-nous", répliquèrent-ils.
Je leur désignai son emplacement d’où ils purent extraire sept jarres emplies d’or et d’argent. Les ayant vu, ils dirent : "Par Dieu ! Nous ne l’enterrerons pas". Ils le crucifièrent et se mirent à lapider son cadavre. Puis, ils désignèrent à son poste un autre homme auquel je m’attachais. Je n’ai jamais vu un homme plus ascète que lui, renonçant aux choses de ce monde et ne désirant que celles de l’au-delà. Il s’adonnait avec zèle aux dévotions jour et nuit. Je lui vouais donc un profond amour et je demeurais à ses côtés pendant une longue période. Dans son lit de mort, je lui dis : "O untel ! A qui me recommandez-vous ? Veuillez me conseiller. A qui devrais- je m’attacher après ton décès ?". — "O mon fils ! Je ne savais personne qui était de même discipline qu’un homme vivant à Mossoul qui s’appelait untel et qui n’avait jamais interpolé. Allez donc le rejoindre".
A la mort de mon compagnon, j’allai rejoindre l’homme du Mossoul, à qui je racontai mon histoire. L’ayant terminée, je lui dis : "Mon compagnon untel m’a conseillé, avant de mourir, de vous rejoindre et m’a informé que vous étiez encore attaché à la discipline vraie qu’il confessait". — "Restez donc chez moi", telle fut sa réponse. Je me séjournai chez lui et je constatai qu’il était un homme parfait. Mais, peu après, il rendit le dernier soupir. A l’article de la mort, je lui demandai : "O untel ! Par l’état que vous êtes par l’ordre de Dieu, vous avez une parfaite connaissance de mon état. A qui vous me recommandez ? Et qui m’ordonnez-vous d’aller rejoindre ?". — "O mon fils ! Par Dieu ! Je ne savais personne qui était de même discipline que nous, excepté un homme vivant à Nasybîn qui s’appelait untel. Allez donc à sa rencontre". Une fois qu’on fit enterrer l’homme, j’allai à la rencontre de l’homme de Nasybîn, à qui je racontai mon histoire et ce qui mon ex-ami m’avait commandé de faire. — "Restez donc chez nous", dit-il. Je m’arrêtai donc chez lui et je découvris qu’il emboîtait le pas à ses autres ex-amis qui furent de conduite parfaite. Mais, il cessa de vivre peu de temps après et au moment de son agonie, je lui dis : "Vous savez toute mon histoire, à qui vous me recommandez donc ?". — "O mon fils ! Par Dieu ! Je ne savais personne qui professait encore la même discipline que nous, sauf un homme vivant à ʿAmûriyya et qui s’appelait untel. Allez donc le rejoindre".
Je m’acheminai donc vers celui-ci et je lui racontai mon histoire. — "Restez donc chez moi", dit-il. Je me séjournai chez lui et je vis qu’il était homme de bien tels ses défunts compagnons. Chez lui, je pus faire fortune et j’eus quelques vaches et du butin. Le moine conseillant à Salmân de suivre le Prophète : Un certain laps de temps s’écoula et vint le moment de sa mort, je lui dis alors : "Vous savez toute mon histoire, à qui vous me recommandez donc et qu’est-ce que vous me commandez de faire ?". — "O Mon fils ! Je ne connais absolument personne sur cette terre qui se trouvait encore à cheval sur notre discipline. Mais c’est bien le temps de l’avènement d’un Prophète qui va apparaître au territoire arabe. Il professera la religion d’Abraham et s’expatria en émigration vers un terrain peuplé de palmiers, situé entre deux terres arides. Il sera reconnu à des signes incontestables : il mange du cadeau qu’on lui offre, ne touche jamais à ce qui est destiné à l’aumône et entre ses épaules, il y a le cachet de la prophétie. Tâchez-vous donc de partir pour ce pays". Puis, il rendit le dernier soupir. Quant à moi, je demeurais pendant quelques temps à ʿAmûriyya.
Un jour, un groupe de marchands arabes issus de la tribu (Kalb) passait par ʿAmûriyya, je leur préposai alors de m’emmener avec eux aux pays des Arabes, en échange de ma vache et de ma part du butin. Ils consentirent et moi de leur faire don de mes possessions. Une fois arrivés à Wâdî Al-Qura, ils me trahirent et me vendirent à un juif et j’entrai donc en son service. Peu après, l’un de ses cousins, issu des Banû Quraytha, ayant venu lui rendre visite, m’acheta et m’emmena avec lui à Yathrîb où je vis les palmeraies dont m’avait parlé mon compagnon de ʿAmûriyya et je connus alors Médine -en me référant à la description déjà faite par ce dernier-. Je m’y installai donc en compagnie de mon maître. A cette époque, le Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - était en train de prêcher l’islam parmi ses compatriotes mecquois. Toutefois, je n’entendais rien de ses nouvelles, parce que j’étais tellement absorbé par mes charges d’esclave.
Quand le Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - pénétra dans Yathrîb, je me trouvais en haut de l’un des palmiers de mon maître, en train d’y effectuer quelque besogne. Alors que mon maître était assis au pied duquel, l’un de ses cousins, vint lui dire : "Qu’Allâh fasse périr les Banû Qîla ! Ils sont à Qîbâ’, entourant un homme qui vient d’arriver aujourd’hui de La Mecque et qui prétend être un prophète". Aussitôt que ses paroles parvinrent à mes oreilles, je me sentis fiévreux et je fus tellement agité au point de craindre de perdre mon équilibre et de tomber sur mon maître. Je descendis donc du palmier, en disant à l’homme : "Qu’est-ce que vous êtes en train de dire. Veuillez me répéter cette nouvelle". Mon maître, pris d’un accès de colère, me donna un coup de poing en hurlant : "Pourquoi t’immisces-tu dans ce qui ne te regarde pas ? Vas-y occupe-toi de ton boulot".
Sur le soir, je pris quelques dattes de ce que j’avais cueillies et je me dirigeai vers le lieu où l’on donnait l’hospitalité au Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - . Je lui dis : "J’ai entendu dire que vous étiez un homme pieux et que vous aviez des compagnons étrangers et besogneux. Voilà quelque chose que je réservais pour en faire l’aumône. Je vois donc que vous le méritez". Après que je les leur donnai, il dit à ses Compagnons : "Mangez !". Tandis qu’il s’abstint à y goûter. Je me dis : "Voici l’un des signes (de la prophétie)".
Je partis, ensuite, et me mis à ramasser quelques dattes. Quand le Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - quitta Qibâ’ et alla s’installer à Médine, je vins lui dire : "J’ai remarqué que vous ne goûtez pas à l’aumône, et vous voici un cadeau que je vous offre avec tout mon respect". Il en mangea et invita ses Compagnons de le partager avec lui. Je me dis : "Voici le second (des signes de la prophétie)". Je vins, un jour, trouver le Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - pendant qu’il fut à Baqîʿ Al-Gharqad en train d’enterrer l’un de ses Compagnons. Je le vis assis, étant vêtu d’une pèlerine. Je le saluai, puis je retournai pour regarder son dos, en essayant de voir le cachet déjà décrit par mon compagnon de ʿAmûriyya.
Quand le Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - m’aperçut en train de fixer son dos, il comprit mon intention. Sur ce, il ôta sa pèlerine en me dénudant son dos. Aussitôt que j’eus connu le cachet de la prophétie, je me jetai sur lui en l’embrassant tout en pleurant. Le Prophète - que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui - dit alors : "Qu’est-ce que vous prend donc ?!". Je me mis à lui raconter mon histoire qu’il admira. Il m’ordonna avec joie de la répéter par moi-même à ses Compagnons qui s’en étonnèrent et s’en réjouirent. Salmân embrassa l’islam et fut délivré du joug de l’esclavage. Etant compté parmi les plus estimables Compagnons, il (qu’Allâh soit satisfait de lui) se chargea du gouvernement de certains pays à l’époque des Califes bien-guidés. De ses qualités : On rapporte qu’un jour le Prophète posa sa main sur Salmân et dit : "Si la foi était dans les pléiades, l’un de ces hommes l’aurait attrapée". Et, il désigna Salmân (qu’Allâh soit satisfait de lui).
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