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ʿAbd Ar-Rahmân Ibn ʿAwf

dimanche 19 mai 2002

Il était l’une des huit premières personnes à se convertir à l’islam, l’une des dix personnes (al-ʿasharah al-mubashsharîn) assurées d’entrer au paradis et l’une des six personnes choisies par ʿUmar pour former le conseil de consultation (shûrâ) destiné à élire le Commandeur des Croyants (le Calife) après sa mort.

ʿAbd Ar-Rahmân se convertit à l’islam seulement deux jours après Abû Bakr As-Siddîq et avant que le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, n’entre à la maison d’Al-Arqam. Il s’appelait
Abû Amr au temps de la Jâhiliyyah (Ignorance Pré-Islamique), mais à sa conversion, le Prophète d’Allah, qu’Allah le bénisse et le salue, lui donna le nom de ʿAbd Ar-Rahmân (le serviteur du Miséricordieux).

Comme les premiers musulmans, ʿAbd Ar-Rahmân n’a pas échappé aux souffrances infligées par les Quraishites. Il fut contraint de rester caché et de fuir en Abyssinie quand les persécutions devinrent insupportables. Au moment où la rumeur disait que les conditions des musulmans s’étaient améliorées, il revint à La Mecque. Or, cette rumeur s’avéra être fausse. Il retourna alors en Abyssinie.
ʿAbd Ar-Rahmân fut également de ceux qui participèrent à la hijrah (émigration) de La Mecque vers Médine.

Dès son arrivée à Médine, le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, invita à la fraternité entre Muhâjirîn (les Emigrés) et Ansars (Auxiliaires). L’établissement de liens solides et fraternels a permis de renforcer la cohésion sociale et de soulager les émigrés de leur misère.

Le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, présenta ʿAbd Ar-Rahmân à Saʿd Ibn Ar-Rabîʿah. En bon Ansar, Saʿd accueillit ʿAbd Ar-Rahmân avec générosité et magnanimité : " Mon frère ! Je suis l’un des hommes les plus riches de Médine. J’ai deux vergers et deux épouses. Je te cèderai le verger que tu veux et divorcerai de la femme que tu aimerais épouser. "

ʿAbd Ar-Rahmân, embarrassé, répondit : " Qu’Allah vous bénisse, ta famille, ta richesse et toi ! Montre-moi simplement où se trouve le marché. "

ʿAbd Ar-Rahmân se rendit au marché où il conclut quelques affaires avec le peu d’argent qu’il possédait. Ses profits s’accumulèrent peu à peu jusqu’à ce qu’il soit capable financièrement de se marier.

Il alla chez le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, sentant très fort le parfum.
" Mahyam, Ô ʿAbd Ar-Rahmân !, s’écria le Prophète - mahyam
est un mot d’origine yéménite traduisant une agréable surprise.
- Je me suis marié, répondit ʿAbd Ar-Rahmân.
- Et quel mahr (dot) as-tu donné à ton épouse ?
- Le poids d’un noyau en or.
- Tu dois faire une walîmah (un banquet de noces), ne serait-ce
qu’avec un simple mouton. Et puisse Allah bénir ta richesse, invoqua
le Prophète avec beaucoup de plaisir pour l’encourager. "

ʿAbd Ar-Rahmân avait un tel succès dans ses affaires que ce ne serait pas une surprise s’il soulevait une pierre et s’il trouvait de l’or en dessous.

ʿAbd Ar-Rahmân s’est, par ailleurs, distingué dans les batailles les plus dures. À Uhud, sa fermeté et sa détermination lui ont permis d’endurer la vingtaine de blessures plus ou moins sévères.
Son jihad n’était pas seulement physique. Il contribua tout autant avec ses biens et sa richesse.

Pendant les préparatifs d’une expédition, le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, appela ses compagnons pour leur dire : " Contribuez par la sadaqah car je prépare une expédition. "

ʿAbd Ar-Rahmân alla chez lui et s’empressa de revenir. Il dit au Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue : " Ô Messager d’Allah, j’ai quatre mille dinars. J’en donne deux mille en qard à mon Seigneur et deux mille à ma famille. "

Quand le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, décida d’envoyer une expédition à Tabûk, la dernière bataille de sa vie, il manquait certes de moyens financiers et matériels mais aussi d’hommes compte tenu des forces byzantines. Le millier de kilomètres à traverser rendait le voyage à Tabûk long et difficile. D’autant plus que cette année-là Médine avait souffert de la sécheresse. Le peu d’équipements militaires et de montures disponibles réduisait l’effectif des troupes musulmanes. Combien de musulmans se virent refuser la participation à l’expédition par le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, faute de montures !

Leur tristesse était telle qu’on surnomma les pleureurs. L’armée même était désignée sous le nom de "l’armée de la difficulté" (ʿusrah). Le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, invita ses compagnons à contribuer à la guerre sainte, leur assurant que leur geste serait récompensé. La réponse des musulmans à l’appel du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, fut immédiate et généreuse. ʿAbd Ar-Rahmân donna deux cents awqiyyah d’or.

" J’ai vu ʿAbd Ar-Rahmân commettre une faute. Il n’a rien laissé à sa famille, fit remarquer Umar Ibn Al-Khattab au Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue.
- As-tu laissé quelque chose à ta famille, ʿAbd Ar-Rahmân ?, demanda le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue.
- Oui, répondit ʿAbd Ar-Rahmân. Je leur ai laissé plus que je ne leur ai donné.
- Combien ?, interrogea le Prophète.
- Ce que Dieu, exalté soit-il, et Son Messager ont promis de nourriture, de bonté et de récompense, répondit ʿAbd Ar-Rahmân. "

L’armée musulmane s’est finalement mise en route pour Tabûk. C’est pendant ce voyage que ʿAbd Ar-Rahmân eut le plus grand honneur dont personne d’autre avant lui n’avait pu bénéficier. A l’heure de la salat, les musulmans le choisirent pour mener la prière en l’absence du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue. La premier rakat (génuflexion) de la salat était presque achevée lorsque le Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, les rejoignit et effectua la salat derrière ʿAbd Ar-Rahmân. Quel plus grand honneur que celui d’être l’imam du Prophète, l’imam du Prophète des Prophètes ?

Après la mort du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue, ʿAbd Ar-Rahmân décida de prendre en charge personnellement sa famille (les Mères des Croyants). Il allait partout où elles allaient et il effectua même le Hadj avec elles pour s’assurer qu’elles ne manquent de rien. C’était un signe de confiance et une preuve qu’il était aimé par la famille du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue.

ʿAbd Ar-Rahmân était bien connu pour sa contribution aux musulmans et aux épouses du Prophète. Après avoir vendu un morceau de terre pour quarante mille dinars, il distribua la totalité de la somme aux Banu Zahra (la tribu d’origine de la mère du Prophète, Amina), aux pauvres parmi les musulmans et aux femmes du Prophète. Quand Aïcha reçut une partie de cet argent, elle demanda d’où il provenait. On lui répondit que c’était un don de ʿAbd Ar-Rahmân. Aïcha dit alors : " Le Messager d’Allah, qu’Allah le bénisse et le salue, dit : " Personne n’éprouvera de la compassion envers vous après ma mort à l’exception des Sâbirîn (Ceux
qui sont patients). ". "

La prière du Prophète d’Allah, qu’Allah le bénisse et le salue, sollicitant la barakah du Tout Puissant sur la richesse de ʿAbd Ar-Rahmân lui a été favorable. ʿAbd Ar-Rahmân était en effet le plus riche parmi les compagnons du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue. Ses transactions commerciales ont toutes été fructueuses et sa richesse n’a pas cessé de s’accroître. Ses caravanes d’exportation et d’importation permettaient aux gens de Médine de s’approvisionner en beurre, tissus, vaisselles, parfum, farine etc. Il importait tout ce qui était nécessaire et exportait tout ce qui était excédentaire à Médine.

Un jour, les gens de Médine entendirent un grand bruit venant d’au-delà des frontières de Médine, une ville normalement calme et paisible. Le bruit se rapprochait petit à petit. Ils pouvaient voir au loin un nuage de poussière et de sable. C’était en fait une riche caravane qui se dirigeait vers Médine. Les habitants étaient figés de stupéfaction devant les sept cents chameaux chargés de marchandises
qui arrivaient.

L’agitation gagna les Médinois, les uns appelant les autres à venir assister à ce défilé.

Aïcha intriguée par tout ce brouhaha demanda ce qu’il se passait. On lui dit :
" C’est la caravane d’ʿAbd Ar-Rahmân Ibn Awl qui vient de Syrie chargée de marchandises, la renseigna-t-on.
- C’est une caravane qui fait tout ce vacarme ?, demanda-t-elle incrédule.

- Oui, Ya Oum Al-Mouminin (Mère des Croyants), il y a sept cents chameaux. "

Aïcha secoua la tête songeuse comme si elle essayait de se rappeler une scène passée et dit : " J’ai entendu le Messager de Dieu, qu’Allah le bénisse et le salue, dire : " J’ai vu ʿAbd Ar-Rahmân Ibn Awf entrer au paradis en rampant. ". "

Pourquoi rampant ? Pourquoi ne devait-il pas entrer au paradis d’un pas léger et rapide avec les premiers compagnons du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue ?

Quelques amis de ʿAbd Ar-Rahmân lui rapportèrent le hadith de Aïcha. Il s’est rappelé avoir entendu le même hadith plus d’une fois de la bouche du Prophète, qu’Allah le bénisse et le salue. Il se
précipita à la maison de Aïcha et lui dit :
" Ya ʿAmmâh ! (O tante !) As-tu entendu dire cela le Messager d’Allah, qu’Allah le bénisse et le salue ?
- Oui, répondit-elle.
- Tu m’as rappelé un hadith que je n’ai jamais oublié. Si je le pouvais, je voudrais certainement entrer au paradis en rampant. Je te jure, Ya ʿAmmâh, que je donnerai fî sabîlillâh (pour l’Agrément d’Allah) cette caravane entière avec toutes ses marchandises, ajouta-t-il tout heureux. "

Il tint parole en organisant une fête de charité et en distribuant tout le contenu de la caravane aux habitants de Médine et de ses environs.

Cette anecdote qui montre quel genre d’homme fut ʿAbd Ar-Rahmân. En dépit des richesses dont il jouissait, il a toujours été plus fort que les passions qu’il aurait pu avoir.

La générosité de ʿAbd Ar-Rahmân ne s’est pas arrêtée là, il a continué à donner tant secrètement qu’ouvertement. Certains chiffres mentionnés sont vraiment surprenants, quarante mille dirhams, quarante mille dinars d’or, deux cents awqiyyah d’or, cinq cents chevaux aux mujâhidîn, quatre cents dinars d’or aux survivants etc. et un grand legs aux Ummahât Al-Mu’minîn (Mères des Croyants).

A propos de cette fabuleuse générosité, Aïcha dit : " Puisse Allah lui donner à boire de l’eau de Salsabîl (une source du paradis). "

Toute cette richesse n’a pas corrompu ʿAbd Ar-Rahmân. Il est resté le même. Quand il était parmi ses ouvriers, les gens ne pouvaient pas le distinguer d’eux.

On lui rapporta de la nourriture un jour pour manger. Il a regardé la nourriture et a dit : " Musʿab Ibn Umayr a été tué. Il était meilleur que moi. Nous avons trouvé à peine de quoi couvrir sa tête, ses jambes sont restées découvertes. Allah nous a donné tout ce qu’il y a dans ce monde, je crains vraiment que notre récompense nous ait été accordée trop tôt. " Il a commencé à sangloter et n’a pas mangé.

On peut dire que Abd Ar-Rahman Ibn Awf fait partie de " Ceux qui dépensent leurs biens dans le sentier d’Allah sans faire suivre leurs largesses ni d’un rappel ni d’un tort, auront leur récompense auprès de leur Seigneur. Nulle crainte pour eux, et ils ne seront point affligés
"
.(Le Coran, sourate 2 Al-Baqarah, verset 62)

P.-S.

Traduit de "Companions of The Prophet", Vol.1, de Abdul Wâhid Hâmid.

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