mardi 19 décembre 2006
Mon fils,
Médite par ta raison et ton cœur cette invocation que l’un des gnostiques parmi nos Sheikhs adressa à son Seigneur :
« Seigneur, si je Te demandais l’ici-bas j’aurais recherché autre chose que Toi. Si je te demandais des assurances pour ce que Tu vas m’octroyer, je T’aurais alors accusé. Et si mon cœur trouvait sa paix auprès d’autre que Toi, je serais alors tombé dans l’associationnisme ! Tes Attributs sont éternels alors comment puis-je être avec Toi ? Ton essence est exempte de tout défaut (ʿilal), comment mon essence peut-elle atteindre Ta Proximité ? Tu n’as point de rivaux, comment songerais-je à compter sur autre que Toi ? »
Ces mots sonnent comme un écho venu de l’Esprit Saint. C’est comme si le Sheikh les avait empruntés aux hymnes des anges porteurs du Trône et ceux qui l’entourrent ou bien aux glorifications des âmes errant dans l’horizon de l’Assemblée Suprême. Ce sont des mots qui portent le parfum de notre maître le Messager d’Allâh — paix et bénédictions sur lui —, un rayon de lumière puisé dans l’Arbre de l’Aboutissement (Sidrat Al-Muntahâ) [1], une réverbération de la Vérité (haqîqah) et de la Législation (sharîʿah).
Le tasawwuf est, pour nous, la science de la compréhension de la gnose. Il consiste en la pratique perfectionnée de l’Islam, la réalisation de la foi et la confirmation de la bienfaisance. C’est pourquoi il s’agit d’une discipline obligatoire. Mais elle ne peut s’acquérir par la simple lecture. Cela apparaît de façon manifeste chez ceux qui étudient le tasawwuf de manière théorique, sans pour autant le mettre en pratique ! Il se peut même qu’ils jouissent des titres les plus élevés, mais ils sont, selon l’expression même de mon père, des « véhicules humains » ou les « coursiers de la connaissance ». Mais l’essence du soufisme consiste à dévoiler les secrets de l’univers, pour s’exposer aux lumières des soleils des vérités. Il est donc indispensable, en sus de la science, d’endurer et de pratiquer assidûment.
Le tasawwuf, c’est la crainte révérentielle de Dieu. Le tasawwuf, c’est la purification du cœur. Ces deux degrés constituent un rang qui allie crainte et espérance, élève le credo, raffine l’éthique et réalise pleinement l’humanité de l’être humain. Il n’est pas un verset du Coran qui ne fasse pas le lien entre la vie ici-bas et dans l’au-delà, et ne fasse de la première un moyen pour atteindre la seconde, en y accédant par la porte de la piété et en empruntant le chemin de la purification de soi.
Allâh n’a-t-il pas dit : « Réussit, certes, celui qui se purifie » [2] et « A réussi, certes, celui qui la purifie » [3] . La purification n’est-elle pas au cœur même des messages divins : « [et pour] leur enseigner le Livre et la Sagesse, et les purifier » [4].
Certes, le tasawwuf est une noble éthique (Adab), car, en réalité, le credo est fait de nobles manières, la dévotion est faite de nobles manières et le rapport à autrui est fait de nobles manières.
À ce stade, le serviteur devient « seigneurial », par le savoir, l’étude et la pratique : « […] mais au contraire, devenez des savants, obéissant au Seigneur, puisque vous enseignez le Livre et vous l’étudiez » ”. [5]
Traduit de l’arabe de l’épître de Sheikh Muhammad Zakî Ibrâhîm, Al-Khitâb, sixième édition, 2000.
[1] Sidrat Al-Muntahâ désigne un arbre merveilleux situé au-dessus des sept cieux, que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — atteignit au terme de son ascension miraculeuse (Al-Miʿrâj). Différentes traductions françaises rendent son nom dont l’Arbre de l’Aboutissement, le jujubier de la limite extrême, ou encore le lotus de la limite extrême. NdT.
[2] Sourate 87, Al-Aʿlâ, Le Très-Haut, verset 14.
[3] Sourate 91, Ash-Shams, Le Soleil, verset 9.
[4] Sourate 2, Al-Baqarah, La Génisse, verset 129.
[5] Sourate 3, Âl ʿImrân, La Famille d’Amran, verset 79.
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