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En Compagnie de l’Élu

L’émigration vers l’Abyssinie

dimanche 23 octobre 2005

Constatant la recrudescence des actes de persécution que les Quraysh infligeaient aux musulmans et la multiplication des sévices cruels visant à les détourner de leur religion, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — recommanda à ses disciples d’immigrer en Abyssinie. Cette dernière était en effet une terre de véridicité gouvernée par un roi juste et l’on pouvait espérer qu’Allâh les y délivrerait de ce qu’ils avaient enduré jusque-là.

Ainsi un groupe constitué de onze hommes et de quatre femmes partirent secrètement pour l’Abyssinie et jouirent de la paix pendant quelque temps auprès du Négus, le roi chrétien d’Abyssinie. Puis, ils reçurent des échos laissant entendre que les musulmans vivaient désormais en toute tranquillité à la Mecque et décidèrent d’y retourner. Lorsqu’ils s’aperçurent que la vérité était toute autre, ils retournèrent en Abyssinie. Cette fois-ci, ils étaient quatre-vingts hommes ; certains d’entre eux emmenèrent femmes et enfants. Ils demeurèrent en Abyssinie jusqu’à l’immigration du Prophète — paix et bénédictions sur lui — à Médine où ils le rejoignirent.

Le départ de ce groupe ne manqua pas de susciter la colère des chefs Mecquois qui n’acceptaient pas de voir ces gens échapper à leur pouvoir et à leur emprise. Ils envoyèrent ʿAmr Ibn Al-ʿÂs et ʿAbd Allâh Ibn Abî Rabîʿah avec de riches présents pour le Négus. Lorsque ce dernier les reçut et accepta leurs présents, ils lui dirent : « Majesté, un groupe de jeunes vauriens d’entre nous se sont réfugiés dans ton pays. Ils ont abandonné la religion de leur peuple et n’ont pas pour autant embrassé ta religion. Ils ont inventé une religion méconnue de nous et de toi. Les notables de leur peuple, à savoir leurs pères, leurs oncles, et leurs clans, nous ont missionnés auprès de toi afin de les récupérer et ils savent mieux que quiconque leurs travers et ce qu’ils ont à leur reprocher. »

Le Négus refusa de prendre une décision avant d’avoir entendu ce que les musulmans avaient à répondre. Il les fit venir et leur demanda : « Quelle est donc cette religion pour laquelle vous avez quitté votre peuple, sans pour autant embrasser ma religion ni l’une des religions de ce pays ? » Jaʿfar Ibn Abî Tâlib prit la parole et lui dit : « Majesté, nous étions des gens ignorants ; nous adorions des idoles, mangions la charogne, commettions les turpitudes, rompions nos liens de parenté, étions de mauvais voisins, et le fort parmi nous spoliait le faible. Telle était notre coutume jusqu’à ce que Dieu nous envoie un Messager, issu de notre peuple, connu parmi nous pour sa lignée, sa véridicité, sa loyauté et sa vertu. Il nous a enjoint d’adorer Dieu exclusivement et de rejeter les pierres et les idoles que nous adorions ainsi que nos parents avant nous. Il nous a enjoint d’être véridiques dans notre discours, de restituer les dépôts, de soigner nos liens de parenté, de promouvoir le bon voisinage, de nous abstenir des vices et de l’effusion de sang. Il nous a interdit les turpitudes, le faux témoignage, la spoliation des biens des orphelins et la calomnie contre l’honneur des femmes chastes. Il nous a ordonné d’adorer Dieu et de ne point lui donner d’associés, d’accomplir la prière, de nous acquitter de la zakât, et de jeûner — il énuméra les enseignements de l’islam —. Nous avons cru en lui et avons suivi les enseignements de Dieu qu’il nous a apportés. Nous avons adoré Dieu sans point lui donner d’associés. Nous nous sommes interdit ce qu’il nous a interdit et considéré comme licite ce qu’il a déclaré licite. Alors les gens de notre peuple s’en sont pris à nous et nous ont torturés. Ils nous ont persécutés afin que nous retournions au culte des idoles et délaissions l’adoration de Dieu, et afin que nous nous adonnions aux turpitudes d’autrefois. Face à leur domination, à leur oppression, à leurs pressions, et aux entraves qu’ils nous imposaient dans la pratique de notre religion, nous nous sommes rendus dans ton pays, te choisissant d’entre tous, désirant ton voisinage, et espérant n’être point opprimés auprès de toi... »

Le Négus dit : « Possèdes-tu quelque écrit de ce qu’il a apporté de la part de Dieu dont tu puisses me faire lecture ? » Jaʿfar acquiessa et lui récita la sourate de Marie depuis le début jusqu’au verset trente-deux (comprenant les récits de Zacharie, de Dame Marie, de la grossesse de Jésus, et de la parole de ce dernier alors qu’il était dans le berceau)...

Le Négus pleura au point de tremper sa barbe. Ses prêtres pleurèrent également lorsqu’ils entendirent la récitation de Jaʿfar et dirent : « Ces paroles émanent de la même source que les paroles de notre maître Jésus Christ. » Le Négus dit : « Ceci et ce que Moïse a apporté sortent d’une seule et même niche. » Il se tourna vers les deux émissaires de Quraysh et leur dit : « Partez ! Par Dieu, jamais je ne vous les livrerai. »

Le lendemain, ʿAmr Ibn Al-ʿÂs retourna auprès du Négus et lui dit : « Les musulmans tiennent des propos gravissimes au sujet de Jésus le fils de Marie. » Le Négus les fit venir de nouveau et les interrogea à ce sujet. Jaʿfar Ibn Abî Tâlib dit : « Nous disons à son sujet ce que notre Prophète nous a enseigné. Il dit qu’il est le serviteur de Dieu, Son Messager, Son Esprit et la Parole qu’Il a projeté à la Vierge Marie. » Entendant cela, le Négus frappa la terre de sa main, puis il saisit une baguette et traça un trait par terre disant : « La différence entre votre religion et la nôtre n’est guère plus importante que ce trait. » S’adressant aux musulmans, il dit : « Soyez en sécurité sur ma terre. Quiconque vous insulte en sera pour ses frais. Je ne préfèrerais point recevoir une montagne d’or contre le fait de nuire à l’un d’entre vous. » Puis il ordonna à son entourage : « Rendez les présents apportés par les deux émissaires, je n’en ai aucun besoin. Par Dieu, Dieu ne m’a point demandé de pot-de-vin pour me rendre mon royaume, si bien que je prendrais quelque pot-de-vin à mon tour. » Les deux émissaires s’en allèrent humiliés et défaits et ramenèrent à leur peuple les présents refusés par le Négus...

Soit dit en passant, Négus embrassa l’islam par la suite. Il décéda alors que le Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — était à Médine. Ce dernier fut informé par l’Ange Jirîl de son décès ; il annonça à son tour la nouvelle aux musulmans et présida à la prière funèbre faite ad absentia en faveur du Négus et implora le pardon de Dieu pour lui...

P.-S.

Traduit de l’arabe du livre de Sheikh Yâsîn Rushdî, Fî Rihâb Al-Mustafâ (En Compagnie de l’Élu), disponible en format PDF sur le site Mouassa.org.

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