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Ubayy Ibn Kaʿb

jeudi 13 juin 2002

" Ô Abû Al-Mundhir, sais-tu quel verset du Livre de Dieu est le plus sublime ? ", demanda l’Envoyé de Dieu — paix et bénédictions sur lui —. " Allah et Son Prophète sont les plus savants ", lui répondit-il. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — répéta la question. Abû Al-Mundhir dit alors :

" Dieu ! Point de divinité à part Lui, le Vivant, Celui qui subsiste par lui-même. Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent. A lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Qui peut intercéder auprès de Lui sans Sa permission ? Il connaît leur passé et leur futur. Et, de Sa science, ils n’embrassent que ce qu’Il veut. Son Trône déborde les cieux et la terre, dont la garde ne Lui coûte aucune peine. Et Il est le Très Haut, le Très Grand. " Coran, sourate Al-Baqarah, 2, verset 255.

Le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, de sa main droite, frappa sa poitrine approuvant ainsi la réponse qu’il venait d’entendre. Avec sa face rayonnante de bonheur, il dit à Abû Al-Mundhir : " Que la science te comble Abû Al-Mundhir. "

L’homme (Abû Al-Mundhir) que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — venait de féliciter pour le savoir et l’intelligence que Dieu lui avait accordés, s’appelait Ubayy Ibn Kaʿb, l’un des compagnons hautement estimés dans la nouvelle communauté musulmane.

Ubayy fut l’un des premiers habitants de Yathrib à embrasser l’islam. Il appartenait à la tribu des Khazraj. Il fit allégeance au Prophète — paix et bénédictions sur lui — à Al-ʿAqabah avant l’Hégire. Il participa à la bataille de Badr entre autres.

En tant que scribe, Ubayy écrivait des lettres pour le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et assignait par écrit, avec d’autres compagnons, les révélations coraniques. C’est pourquoi il avait son propre codex. Après la mort du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, il faisait partie des quelques vingt cinq personnes qui connaissaient le Coran entier par cœur.

Il récitait les versets avec une telle intensité et il comprenait le Coran avec une telle profondeur que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — encouragea ses compagnons à apprendre le Coran auprès de lui et de trois autres. Plus tard, le Calife ʿUmar dit aux musulmans :

" Ô gens ! Celui qui a des questions concernant le Coran, qu’il s’adresse à Ubayy Ibn Kaʿb. Celui qui a des questions sur la succession et l’héritage, qu’il s’adresse à Zayd Ibn Thâbit. Celui qui a des questions de jurisprudence, qu’il s’adresse à Muʿâdh Ibn Jabal. Pour ce qui est des questions d’ordre financier, qu’il s’adresse à moi. "

Un jour, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — dit : " Ô Ubayy Ibn Kaʿb ! On m’a ordonné de te montrer et de t’exposer le Coran. " Ubayy était plus que comblé à l’écoute de cela. C’était pour lui un grand honneur car il savait bien que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — ne recevait des ordres que de Dieu. Incapable de contrôler sa joie et son enthousiasme, Ubayy demanda :

" Ô Messager de Dieu. Mon nom a-t-il été explicitement cité ?
- Oui, répondit le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, " par ton nom et par ton ascendance (nasab) dans les plus hauts cieux. "

L’homme dont le nom avait été ainsi mentionné au Prophète — paix et bénédictions sur lui — devait certainement être très doué et d’une grande valeur.

Ubayy tira profit des enseignements, de la douceur et de la noblesse du Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Il relate que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — lui avait demandé :

" Veux-tu que je t’enseigne une sourate, qui n’a sa pareille ni dans la Torah (Tawrah), ni dans l’Evangile (Injil), ni dans le Zabur, ni dans le Coran ?
- Certainement , répondit Ubayy.
- J’aimerais que tu ne partes pas sans la connaître ", dit le Prophète — paix et bénédictions sur lui — prolongeant volontairement le suspense.

Ubayy poursuit son récit : " Il se levait et je me levai avec lui. Il commença à parler, ma main dans la sienne. J’essayai de le retenir de crainte qu’il ne parte sans citer la sourate en question. Au seuil de la porte, je demandai : " Ô Messager de Dieu ! La sourate dont tu m’as parlé... ".

Il demanda : " Que récites-tu quand tu es debout pour la prière ?"

Je lui récitai alors Fatihat Al-Kitab (la première sourate du Coran). Il s’exclama : " C’est celle-ci ! C’est celle-ci ! Ce sont les sept versets les plus répétés. Dieu, Tout-puissant a dit : Nous t’avons certes donné les sept versets répétés, ainsi que le Coran sublime. ". "

La dévotion d’Ubayy pour le Coran était intransigeante. La réponse d’Ubayy à un homme venu lui demander conseil donne une idée de l’importance du Coran : " Fais du Livre de Dieu ton guide (imam). Sois satisfait de ses règles et prends-le pour juge. Le Coran, legs du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, doit être appliqué. Il intercédera alors en votre faveur auprès de Dieu... "

Après la mort du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, Ubayy resta fortement attaché à l’islam et engagé pour le Coran et la Sunnah. Il était constant dans son adoration et sa dévotion (ʿibâdah). Il restait souvent à la mosquée après la dernière prière obligatoire pour adorer Dieu ou pour enseigner. Un soir, lui et d’autres musulmans invoquaient Dieu dans la mosquée après la prière. Le Calife Umar se joignit à l’assemblée et demanda à chacun de réciter une invocation. Quand vint son tour, Ubayy, intimidé par la présence du Calife assis près de lui, était confus. ʿUmar lui suggéra : " Allahumma ighfir lanâ. Allahumma irhamnâ. Ô Dieu, pardonne-nous. Ô Dieu, déverse ta Miséricorde sur nous. "

La piété guidait la vie simple que menait Ubayy. Il ne se laissa pas corrompre, ni tromper par la vie d’ici-bas. Réaliste, il était conscient que le confort et le luxe étaient éphémères et que seules les bonnes actions étaient profitables. Il mettait constamment en garde les musulmans leur rappelant les conditions de vie des musulmans du temps du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, leur dévouement à l’islam à l’époque, leur simplicité et leur sens du sacrifice. De nombreux musulmans venaient lui demander conseil ou simplement profiter de sa science. Un jour, Ubayy dit à l’un d’entre eux :

" Le croyant a quatre caractéristiques. S’il est affligé par un malheur, il reste ferme et patient. S’il reçoit un bienfait, il est reconnaissant. S’il parle, il ne dit que la vérité. S’il juge une affaire, il est juste. "

Les musulmans tenaient Ubayy en haute estime. Il était largement connu sous l’appellation que ʿUmar lui donna : "sayyid" (maître) des musulmans. Il faisait partie du comité consultatif auquel le Calife Abû Bakr soumettait des problèmes. Ce conseil mêlait des Muhâjirin (Emigrés) et des Ansars (Médinois ayant soutenu et acueilli les Emigrés) doués de bon sens, fins connaisseurs de la Loi et capables de jugement. Ce comité était composé de ʿUmar, ʿUthmân, ʿAlî, ʿAbd Ar-Rahmân Ibn Awf, Muʿâdh Ibn Jabal, Ubayy Ibn Kaʿb et Zayd Ibn Hârith. Plus tard, ʿUmar consulta ce même groupe pendant son Califat. Pour les jugements légaux (fatwas) en particulier, il se référait à ʿUthman, Ubayy et Zayd Ibn Thâbit.

Etant donné son haut statut, on pouvait s’attendre à ce qu’Ubayy occupe un poste de responsable administratif, dans le cadre de l’Etat musulman alors en pleine expansion. Du temps du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, Ubayy avait été, en effet, " percepteur " des aumônes (zakat, impôt purificateur et dons des musulmans...). Ubayy finit par demander à ʿUmar :

" Quel est le problème ? Pourquoi ne me nommes-tu pas gouverneur ?
- Je ne veux pas que ta religion soit corrompue ", répondit Umar.

Ubayy fut probablement poussé à poser explicitement la question quand il vit les musulmans s’éloigner de la pureté de foi et de l’esprit du sacrifice dominant à l’époque du Prophète — paix et bénédictions sur lui —. L’attitude trop mielleuse et trop adulatrice de nombreux musulmans à l’égard de leurs gouverneurs menaçait, selon lui, les gouverneurs et les gouvernés.

Ubayy, pour sa part, était toujours honnête et franc dans ses transactions avec les autorités. A part Dieu, il ne craignait personne. Il agissait comme une sorte de conscience pour les musulmans. Ubayy craignait pour la communauté musulmane qu’un jour un conflit sérieux n’oppose les musulmans. Ce verset du Coran le touchait profondément :

" Dis : ‹Il est capable, Lui, de susciter contre vous, d’en haut, ou de dessous vos pieds, un châtiment, ou de vous confondre dans le sectarisme. Et Il vous fait goûter l’ardeur [au combat] les uns aux autres.› Regarde comment Nous exposons Nos versets. Peut-être comprendront-ils ? " Coran, sourate al An’am 6, verset 65.

Il priait alors avec ferveur Dieu de le guider et de lui accorder Sa clémence et Son pardon. Ubayy mourut en l’an 29 de l’Hégire pendant le califat de Uthman.

P.-S.

Traduit de Companions of The Prophet, Vol.1, écrit par Abdul Wâhid Hâmid.

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