dimanche 7 avril 2002
Il avait grandi dans une maison qui aspirait au parfum de la foi au sein d’une famille où chaque membre était imprégné du sens du devoir spirituel. Son père, Zayd Ibn ʿÂsim, avait été l’un des premiers hommes à Yahtrib, [actuelle Médine], à embrasser l’islam tandis que sa mère l’illustre Nusaybah Bint Kaʿb alias Umm ʿAmmarah avait quant à elle été la première femme à porter les armes pour la défense de l’Islam et pour le soutien de son Prophète béni.
Encore en bas âge, Habîb avait eu le privilège d’aller à La Mecque accompagné de sa mère, de son père, de son oncle maternel et de son frère avec la troupe comptant les soixante-quinze premières personnes qui avaient d’une part, prêté allégeance solennelle au Prophète, à Al-ʿAqabah, et qui avaient joué un rôle fondamental dans la fondation du préliminaire historique de l’islam, d’autre part. En effet dans l’obscurité de la nuit à Al-ʿAqabah le jeune Habîb avait déployé sa petite main et prêter allégeance au Prophète. Depuis ce jour-là, Habîb affectionnera le Prophète — paix et bénédictions sur lui — davantage même que ses propres parents maternels et l’Islam lui était alors plus précieux que le prix de sa propre existence.
Étant donné qu’il était encore d’un très jeune âge il n’a pas participé à la Bataille de Badr et n’a eu l’occasion de pendre part à la Bataille d’Uhud. En effet, il était considéré encore trop jeune pour porter les armes. Cependant, il aura par la suite participé à toutes les autres expéditions dans lesquelles le Prophète avait bataillé et il s’y était nettement distingué de part sa bravoure et sa motivation au sacrifice. Cependant, sachant que chacune de ces batailles avaient des intérêts spécifiques et qu’elles exigeaient des dispositions également spécifiques, elles avaient aussi concourut à affûter Habîb de ce qui pourrait l’éprouver. En effet, dans sa vie, il fera face à un sinistre épisode au cours du lequel toutes âmes en seraient complètement bouleversées. À présent lisons cette effroyable histoire dès son commencement.
À la neuvième année après l’Hégire, l’Islam s’était amplement propagé et fini par advenir la force dominante dans la péninsule Arabique. Des délégations de plusieurs tribus en provenance de diverses terres lointaines venaient à la rencontre du Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — et lui annonçaient par un succinct tête à tête leur adhésion de l’Islam. Parmi ces délégations, il en était une qui provenait du Najd, une région montagneuse. C’était les Banû Hanifah.
Dans les faubourgs de La Mecque, ils avaient attaché leurs montures puis mandaté Musaylamah Ibn Habîb comme le porte-parole et le représentant de l’ensemble de la délégation. Ce dernier alla chez le Prophète — paix et bénédictions sur lui — pour lui annoncer que son peuple venait pour adhérer à l’Islam. De son côté, Le Prophète - Prières et Bénédictions d’Allâh soient sur lui - les accueillit et les traita de manière très généreuse. Chacun d’eux, y compris Musaylamah, s’y était présenté avec un présent.
Une fois retourné dans le Najd, l’ambitieux et égoïste Musaylamah se rétracta et abandonna alors l’allégeance jusqu’ici promise au Prophète. Il s’éleva parmi la population et déclara qu’un prophète avait été envoyé par Dieu aux Banû Hanifah tout comme Dieu avait envoyé Muhammad Ibn ’Abdillâh (Paix et Bénédictions de Dieu sur lui) aux Qurayshites. Pour diverses raisons ainsi que sous l’effet d’une panoplie de contraintes, les Banû Hanifah commencèrent alors à se rallier autour de lui. La plupart l’on suivit par sectarisme tribal.
En effet, un des membres de la tribu déclara ce qui suit : " Je témoigne que Muhammad est évidemment un véridique tandis que Musaylamah est évidemment un imposteur. Mais l’imposteur de Rabiʿah (une confédération tribal à laquelle les Banû Hanifah appartiennent) m’est plus cher que l’authenticité et la véracité de la personne de Mudar (une confédération tribal à laquelle les Qurayshites appartiennent)".
Peu de temps après, le nombre des fidèles de Musaylamah augmenta ce qui lui permit de se sentir puissant, en tout cas suffisamment rassuré pour qu’il puisse rédiger au Prophète — paix et bénédictions sur lui — la lettre suivante : "De la part de Musaylamah, le messager de Dieu à l’attention de Muhammad, le messager de Dieu. Que la Paix soit sur toi. Je suis disposé à partager cette mission avec toi. J’aurai [le contrôle sur ] la première moitié de la terre et tu auras la seconde moitié. Mais les Quraîshites ne sont pas des gens faciles."
Musaylamah dépêcha alors deux de ses hommes avec la lettre chez le Prophète. Lorsque la lettre a été lue au Prophète, il demanda aux deux hommes : " Et vous, que pouvez-vous dire à propos de ceci [le contenu de la lettre] ? ". À eux de répondre : " Nous confirmons ce que la lettre dit". " Par Dieu, " dit Le Prophète, "s’il n’était pas interdit de tuer les émissaires, je vous aurais bien tordu le cou ".
Il répondit alors au message de Musaylamah : " Au nom de Dieu, Le Bienfaisant, Le Compatissant. De la part de Muhammad le Messager de Dieu, à l’attention de Musaylamah l’imposteur. Que la Paix soit sur ceux qui suivent le droit chemin. Dieu léguera la terre à quiconque parmi Ses serviteurs selon Sa volonté, tandis que le triomphe final reviendra à ceux qui se seront ajournés de leurs devoirs vis-à-vis de Dieu ". Il envoya alors la lettre et renvoya les deux hommes. Mais le mal ainsi que la corruption de Musaylamah ne cessèrent de gagner du terrain.
Le Prophète considéra alors qu’il était nécessaire de lui adresser une seconde lettre l’exhortant d’arrêter cette malheureuse quête. Le Prophète désigna Habîb Ibn Zayd comme porteur de ce message à Musaylamah. En ce temps là, le tout jeune Habîb était en son âme et conscience un fervent croyant en la véracité de l’islam. Habîb se chargea alors de sa mission avec promptitude. Il s’en alla aussi vite qu’il le pouvait dans les montagnes du Najd, dans le territoire des Banû Hanifah où il y présenta la lettre à Musaylamah.
[Après lecture de la lettre] Musaylamah s’irrita tellement de colère que l’expression de son visage était fusillante. Il ordonna à ce que Habîb soit enchaîné dans l’immédiat et qu’il lui soit présenté le jour à venir.
Le jour venu, Musaylamah était en train de présider sa séance. Autour de lui se tenaient ses proches conseillers qui le servent dans cette vile cause. Par ailleurs, le peuple était autorisé à y assister. Il ordonna que Habîb, alors prisonnier et mis aux fers, lui soit présenté face à face.
Au milieu de la foule animée par la haine, Habîb était-là débout. Il conserva une station toute droite et continue, digne et fier aux allures même d’une lance robuste fermement plantée dans la terre ; il n’était nullement impressionné.
Musaylamah se tourna et lui dit : " Témoignes-tu que Muhammad et le Messager de Dieu ? " " Oui " répondit Habîb. " Je témoigne que Muhammad est le Messager de Dieu. "
Visiblement cette réponse envenima à nouveau Musaylamah qui poursuit : "Et témoignes-tu que je suis le messager de Dieu ? " Au delà de cet interrogatoire il insistait même. " Mes oreilles n’entendent pas ce genre de propos" répliqua Habîb.
Le visage de Musaylamah changea alors de couleur tandis que ses lèvres se mirent à trembler de colère. Il cria à son tortionnaire « Ampute-lui quelque chose de son corps. » Le sombre tortionnaire s’avança vers Habîb avec un sabre à la main et lui amputa un de ses membres.
Musaylamah lui répéta encore la même question et une fois de plus Habîb ne changea en rien de ce qu’il venait de répondre. Il affirma qu’il croit en Muhammad en tant que Messager de Dieu et qu’au prix même de sa propre vie il refuse de reconnaître le partage de la mission [prophétique]. Sur ce, Musaylamah ordonna à son acolyte d’amputer de nouveau Habîb d’une partie de son corps. Celui-ci tomba à terre à coté du premier membre qui venait d’être coupé. La foule était éberluée en voyant que Habîb était à la fois maître de soi et restait ferme.
Face à l’interrogation incessante de Musaylamah et dans la profonde douleur infligée par ce tortionnaire, Habîb continua de répéter :< « J’atteste que Muhammad est le Messager de Dieu. » Mais Habîb ne pouvait plus continuer à supporter cette torture et de pareilles atrocités inhumaines. Par conséquent, il ne tarda pas à mourir. À mesure que son sang s’écoulait, ses lèvres pures insistaient encore sur le nom du Prophète béni, le Prophète Muhammad, celui à qui il avait jadis prêté serment d’allégeance lors d’une nuit à Aqabah.
Lorsque sa mère eut connaissance des nouvelles concernant le sort de Habîb sa réaction avait simplement été de dire : « C’était pour ce genre de situation que je l’avais élevé... Il avait prêté allégeance au Prophète au cours d’une nuit à Aqabah alors qu’il n’était encore qu’un petit enfant et aujourd’hui qu’il est devenu un adulte il a donné sa vie pour le Prophète. Si Dieu me permettait d’approcher Musaylamah ses filles n’en croiront pas leurs yeux et se lamenteront sur son sort. » Ce jour qu’elle désira tant n’allait pas tarder.
En effet, après la mort du Prophète — paix et bénédictions sur lui — Abû Bakr mena une guerre contre les imposteurs. La mère de Habîb, Nusaybah, ainsi que l’un des ses autres courageux fils, Abdullah Ibn Zayd, s’étaient joint à l’armée Musulmane qui s’en allait pour affronter les forces de Musaylamah.
Au cours de la Bataille de Yamamah qui a suivi, Nusaybah avait été vue en train de traverser les rangs des bataillons comme une lionne en s’écriant : « Où est l’ennemi de Dieu ? Montrez-moi l’ennemi de Dieu ? » Lorsqu’elle finit par trouver Musaylamah, il avait déjà péri. Elle regarda le corps de ce vil imposteur et cruel tyran puis se sentit enfin sereine. En effet, un ultime danger pour les Musulmans venait d’être éliminé et la mort de son fils bien-aimé, Habîb, venait d’être vengée.
Lorsque Habîb avait été tué, le noble Prophète lui avait rendu hommages ainsi qu’à sa famille entière puis il avait invoqué : « Puisse Dieu bénir ce foyer. Puisse Dieu avoir de la miséricorde sur ce foyer. »
Traduit de "Companions of The Prophet", volume 1, de Abdul Wâhid Hâmid.
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