dimanche 13 avril 2003
Le Noble Coran est le Livre éternel de l’Islam. Il constitue l’âme de la daʿwah [1] islamique, la source motrice de sa doctrine, son lexique et le registre de son mouvement. Dieu - Exalté Soit-Il - accorda à Ses Prophètes des miracles en adéquation avec leur époque afin d’appuyer leur Message. Il donna à Moïse un bâton qui se transforma en un énorme serpent avalant les cordes des magiciens. De même, lorsqu’il mit sa main sur son côté puis la ressortit, elle était d’une blancheur éclatante, plus éblouissante que le soleil. Les Egyptiens avaient en effet excellé en magie et Moïse vint avec un miracle qui surpassait leur magie.
Jésus fut envoyé à une époque marquée par des progrès médicaux et des avancements dans le développement des remèdes. Dieu lui accorda alors des miracles dans ces mêmes domaines si bien qu’il put guérir l’aveugle-né et le lépreux, et ressuscita les morts, par la permission d’Allâh.
Muhammad, quant à lui, fut envoyé dans les terres des arabes, au milieu de personnes illettrées, excellant dans l’éloquence et les belles paroles, versifiées ou en prose. D’ailleurs, des rencontres culturelles et littéraires annuelles réunissaient, dans le marché de ʿUqâdh, les poètes afin qu’ils exposassent au grand public leur production intellectuelle et littéraire. Lorsqu’un poème leur plaisait, ils le suspendaient à la Kaʿbah pour l’inscrire dans la postérité et pour témoigner de leur fièreté.
Les arabes avaient coutume d’user de la prose rimée, de parler par phrases rythmées et donnaient beaucoup d’importance à la rhétorique. Ils jouaient sur la corde de l’émotion, employaient des procédés linguistiques et variaient leurs expressions, afin de séduire leur audience et l’éveiller.
La révélation mecquoise s’adressa à ces Arabes. C’est la Parole de l’Audient, du Voyant, du Compatissant, le Parfaitement Connaisseur, qui créa l’homme et qui sait, mieux que quiconque, ce que l’âme de l’homme lui suggère. C’est ainsi que Dieu révéla le Coran, au paroxysme de l’éloquence. Plus encore, le Coran atteignit dans ce domaine un degré inaccessible, un rang hors concurrence.
Quand les Arabes adressèrent à Muhammad toutes sortes d’accusations mensongères et racontèrent à son sujet bon nombre d’histoires - ils dirent tour à tour qu’il était magicien, poète, devin et qu’il inventait des légendes - le Noble Coran les défia de produire un Livre semblable au Coran, ou d’inventer dix sourates comme celles du Coran, ou même une seule ! Puis le Coran inscrivit dans l’éternité leur incapacité à faire cela et déclara ce défi, pour eux et les autres : "Dis : ‹Même si les hommes et les djinns s’unissaient pour produire quelque chose de semblable à ce Coran, ils ne sauraient produire rien de semblable, même s’ils se soutenaient les un les autres›" [2].
Les premières révélations du Coran furent faites au Prophète alors qu’il était à la Mecque Honorée. La révélation se poursuivit dans cette ville pendant treize ans, appelant les gens à embrasser la foi en Dieu et à vouer un monothéisme pur au Créateur. Le Noble Coran lutta contre l’adoration des idoles et des statues, rappela aux gens la Résurrection et le Jugement, projeta des images du retentissement de la Trompe [3], l’exode à partir des tombes, la distribution des registres des oeuvres, la pesée des oeuvres, le passage sur le Sirât, l’entrée des pieux au Paradis et la chute des mécréants en Enfer.
Par ailleurs, le Coran détailla la description du Paradis et de ses délices : les fleuves qui y coulent, ses fruits à portée de mains, les houris aux yeux magnifiques [4] , et des éphèbes éternellement jeunes [5].
Le Coran décrit également l’Enfer et ses divers châtiments et tourments. Ses habitants auront le visage noirci ; leurs visages seront tournés dans le Feu, ils mangeront du darîʿ et du zaqqûm, ils boiront une eau bouillante telle le métal en fusion, brûlant le visage. Dieu - Exalté Soit-Il - ne les regardera pas, Il ne leur parlera point, et ils auront un douloureux châtiment.
Par convention, les savants qualifient de mecquois le Coran révélé avant l’hégire et de médinois ce qui en fut révélé après l’hégire, en référence aux villes de la Mecque et de Medine. Les sourates mecquoises représentent environ 19/30ème du Coran alors que les sourates médinoises représentent 11/30ème, sur un total de 114 sourates. Quatre-vingt-deux sont mecquoises à l’unanimité, vingt sont médinoises à l’unanimité et douze sourates font l’objet de divergences quant à leur caractère mecquois ou médinois.
Les vingt sourates médinoises sont : Al-Baqarah, Âl ʿImrân, An-Nisâ’, Al-Mâ’idah, Al-Anfâl, At-Tawbah, An-Nour, Al-Ahzâb, Muhammad, Al-Fath, Al-Hujurât, Al-Hadîd, Al-Mujâdalah, Al-Hashr, Al-Mumtahanah, Al-Jumuʿah, Al-Munâfiqûn, At-Talâq, At-Tahrîm et An-Nasr.
Les sourates qui font l’objet de divergence sont : Al-Fâtihah, Ar-Raʿd, Ar-Rahmân, As-Saff, At-Taghâbun, At-Tatfîf, Al-Qadr, Lam Yakun [6], Idhâ Zulzilat [7], Al-Ikhlâs et les deux sourates préservatrices.
Les quatre-vingt-deux sourates restantes sont consensuellement mecquoises.
Lorsque nous prenons connaissance des caractéristiques de chacune des cent quatorze sourates du Coran, la date de leur révélation ainsi que l’ordre dans lequel elles furent révélées, nous mesurons l’effort colossal fourni par les savants devanciers pour préserver ce Livre honoré et classifier les sourates selon divers critères : les premières sourates révélées et les suivantes, les sourates révélées nuitamment et celles révélées de jour, celles révélées en été et celles révélées en hiver, celles accompagnées d’un cortège d’anges et celles révélées simplement, celles qui sont elliptiques et celles à vocation explicative, celles qui furent révélées à Al-Juhfah, à Jérusalem, à Tâ’if ou encore à Al-Hudaybiyah. Il s’en fallut de peu pour que chaque sourate possédât un registre spécial traitant de ses versets, la date de sa révélation, les circonstances entourant sa révélation, les prescriptions qu’elle contient, sa part de versets abrogeants et de versets abrogés, les versets explicites et les versets ambigus, les versets généraux et les versets spécifiques. Ils dressèrent également l’inventaire des versets médinois que recèlent les sourates mecquoises et inversement. Ils notèrent les sourates emmenées de la Mecque à Médine et inversement, celles emmenées de la Mecque en Abyssinie, celles révélées à la Mecque mais considérées comme médinoises [8], celles révélées à Médine mais considérées comme mecquoises, celles révélées à la Mecque à propos des habitants de Médine et celles révélées à Médine à propos des habitants de la Mecque, celles parmi les sourates médinoises dont la révélation s’apparente aux sourates mecquoises et inversement... soit plus de vingt catégories qui interdisent à celui qui les méconnaît et ne peut les distinguer de se prononcer à propos du Livre de Dieu le Très-Haut - selon les imâms des sciences du Coran.
Forts de notre connaissance du registre de chaque sourate, la date et l’ordre de sa révélation, nous pouvons répartir les sourates mecquoises selon trois phases distinctes.
Les sourates de cette période sont caractérisées par leur extrême concision, la brièveté des versets, l’harmonie des transitions, la variation du discours entre l’injonction, l’interdiction, l’interrogation et le souhait, le choix des termes, la matérialisation des abstractions, la personnification et l’attribution de mouvements, de vie et de discours à des objets inanimés. Les sourates sont alors autant de scènes évocatrices, de spectacles fantastiques et vivants, inscrits dans un appel à dessein trouvant son chemin vers les coeurs et s’écoulant à l’intérieur des esprits calmant leur orgueil, rectifiant leurs travers grâce aux vérités éclatantes qu’il expose à propos de l’univers et de ses scènes, la création, la résurrection, le commencement et le retour.
Le Noble Coran relate également dans cette phase de courts récits sur les prophètes précédents et les nations passées en guise d’avertissement aux polythéistes et à titre de soutien aux croyants. Il montre également que la religion est une dans ses fondements et ses croyances et que l’islam est un appel général embrassant l’ensemble de l’humanité.
Je voudrais insister sur le fait que cette répartition émane d’une appréciation individuelle basée sur les caractéristiques prédominantes et non pas sur des qualités distinctives, car le Coran, que ce soit à la Mecque ou à Médine, du début à la fin, est la Parole de Dieu le Très-Haut le Tout-Puissant. Il sait parfaitement ce qui convient le mieux à chacun et voit parfaitement les besoins de l’audience. Ainsi était-il plus approprié de s’adresser aux habitants de la Mecque avec des versets courts et de les appeler à la foi et à la noblesse des caractères. Puis, Il leur apporta progressivement les preuves et étaya l’idée, tout comme ferait un enseignant pédagogue avec ses élèves en commençant par des sourates courtes, puis moyennes, et ainsi de suite, les instruisant graduellement et leur faisant aimer sa matière.
Cependant, on notera la présence de versets mecquois parmi les versets de certaines sourates médinoises sans pour autant que cela ne se ressente au plan de la cohérence et de l’harmonie. Au contraire, on est même étonné par l’unité du discours, la perfection des jonctions, la beauté et l’harmonie du rythme. Le Coran est ainsi comme un long collier aux perles régulières ou une loi posée dont les principes et les finalités sont fortement articulées.
On peut à loisir choisir une sourate du Coran et parcourir ses versets par la pensée et l’examiner de près par deux fois : comment débute-t-elle ? Comment se termine-t-elle ? Comment ses prémices s’allient-elles à ses conclusions et comment son début renvoie à sa fin ?
En filigrane, on voit par ailleurs dans l’ensemble de la sourate une orientation précise conduisant à une finalité particulière, tout comme le corps possède une structure unie faite de divers organes dont les fonctions sont différentes mais collaborent pour la réalisation d’un même objectif.
Ceci ne montre-t-il pas que l’agencement coranique n’est pas le fait des hommes mais plutôt l’oeuvre de l’Expert et Omniscient ? Vraie est Sa Parole : "Ne méditent-ils donc pas sur le Coran ? S’il provenait d’un autre que Dieu, ils y trouveraient certes maintes contradictions !" (Sourate 4, An-Nisâ’, Les femmes, verset 82)
Traduit de l’arabe de ʿUlûm Ad-Dîn Al-Islâmî (Les sciences de la religion islamique) de Dr. ʿAbd Allâh Shehâtah, éditions Al-Hay’ah Al-ʿÂmmah Al-Misriyyah lil-Kitâb, 3ème édition, 1998. ISBN 977-01-5786-4.
[1] Appel à Dieu.
[2] Sourate 16, Al-Isrâ’, verset 88
[3] Il s’agit ici de la Trompe qui marque la fin du monde, puis donne le signal pour la Résurrection.
[4] NdT : " Et ils auront des houris aux yeux, grands et beaux, * pareilles à des perles en coquille.", 56 : 22-23
[5] NdT : "Parmi eux circuleront des garçons éternellement jeunes, * avec des coupes, des aiguières et un verre [rempli] : d’une liqueur de source.", 56 : 17-18
[6] sourate Al-Bayyinah
[7] sourate Az-Zalzalah
[8] Les sourates révélées après l’hégire sont dites médinoises indépendamment du lieu où elles furent révélées.NdT
[9] Al-Ghayb : Tout connaissance inaccessible par la raison humaine.NdT
[10] awliyâ’ : pluriel de walî, signifiant littéralement "allié" de Dieu, désigne les hommes exemplaires par leur piété et que Dieu rapproche de Lui. Cette notion ne recoupe pas exactement la notion de saint dans d’autres religions. NdT
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