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Zayd Al-Khayr

mercredi 29 mai 2002

Les hommes obéissent à des " principes " ou à un ensemble de valeurs. D’après un hadith du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, les meilleurs des hommes durant la jâhiliyyah (le temps de l’ignorance, i.e. ère pré-islamique) sont les meilleurs hommes en islam.

Le portrait d’un des nobles compagnons du Prophète — paix et bénédictions sur lui — durant ces deux périodes distinctes de sa vie illustre bien ce hadith. Cet homme était connu sous le nom de Zayd Al-Khayl avant de devenir musulman, mais suite à sa conversion, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — le renomma Zayd Al-Khayr.

Vint une année où la tribu des ʿÂmir fut frappée par une forte sécheresse détruisant aussi bien les récoltes, la végétation que le bétail. La situation était telle qu’un homme se résigna à partir avec sa famille pour s’établir à Hirah. Il y laissa sa famille à qui il demanda de patienter jusqu’à son retour. Il reprit la route, seul, et se fit le serment de ne jamais retourner vers eux tant qu’il n’aurait pas acquis suffisamment d’argent pour leur subsistance, fût-ce au péril de sa vie.

L’homme emporta quelques provisions avec lui, et marcha toute la journée à la recherche de quelque bien pour sa famille. A la tombée de la nuit, il arriva devant une tente près de laquelle était attelé un cheval. Considérant cette opportunité comme un " premier butin ", il se dirigea vers le cheval, le détacha et était sur le point de le monter lorsqu’une voix se fit entendre : " Laisse ce cheval et je te laisserai la vie sauve. "

Il s’empressa alors de fuir, renonçant au cheval. Il marcha ensuite pendant sept jours jusqu’à attendre où se trouvait un terrain de pâturage pour les chameaux. Tout près, était dressée une tente gigantesque pourvue d’un dôme, signe d’opulence. Devant cet étalage de richesse, l’homme supposa : " Ce pâturage est certainement réservé à des chameaux et cette tente doit sans aucun doute être habitée. ".

Le soleil était sur le point de se coucher lorsque l’homme s’introduisit dans la tente. Là, au milieu de la pièce, il vit un vieil homme. Il alla s’asseoir derrière lui sans que ce dernier ne s’aperçoive de sa présence.

A peine le soleil fut-il couché qu’un grand et vaillant cavalier s’approcha du campement. Il se tenait bien droit sur sa monture, et avait une fière allure. Deux serviteurs l’accompagnaient, l’un se tenant à sa droite et l’autre à sa gauche. Il était à la tête d’une centaine de chamelles qui suivaient un chameau immense. Il était de toute évidence un homme aisé et bien portant. S’adressant à un de ses serviteurs, et tout en pointant une chamelle bien grasse du doigt, il donna pour instruction : " Trais la chamelle et apporte le lait au vieil homme. "

Le vieil homme but alors une ou deux gorgées du récipient plein qui lui fut apporté, et laissa le reste. Le vagabond s’avança à la dérobée jusqu’au récipient et but le reste du lait. Le serviteur retourna dans la tente et dit : " Maître, il a tout bu. "

Le cavalier, ravi de cette nouvelle, ordonna que l’on traie une autre chamelle. Le vieil homme en but seulement une gorgée et le vagabond but en prenant soin de laisser un peu de lait de façon à ne pas éveiller les soupçons du cavalier. Il ordonna ensuite à son autre serviteur d’égorger un mouton. Une partie du mouton fut grillée, et le cavalier nourrit lui-même le vieil homme jusqu’à satiété. Après cela, ses serviteurs et lui-même mangèrent avant de tomber dans un profond sommeil, leur ronflement résonnant dans la tente.

Le vagabond en profita pour se saisir du chameau et s’enfuir avec. Toutes les chamelles le suivirent. Il voyagea toute la nuit. Au lever du jour, il regarda autour de lui, dans toutes les directions, et fut soulagé de voir que personne ne l’avait suivi. Il poursuivit ainsi sa route jusqu’en fin d’après-midi lorsque soudainement, il vit au loin une silhouette qui ressemblait à un aigle ou à une sorte de grand oiseau qui se dirigeait droit sur lui. Au fur et à mesure qu’elle s’approchait, l’homme se rendit compte qu’il s’agissait du cavalier, qui galopait vers lui à grande vitesse.

Le vagabond descendit de sa monture et attela le chameau. Il prit une flèche qu’il ajusta à son arc et se tint debout au devant des chamelles. Le cavalier s’arrêta à une certaine distance, et le somma de détacher le chameau. L’homme refusa, arguant qu’il avait une famille à charge, affamée et sans ressources à Hirah. Il déclara enfin qu’il préférait mourir plutôt que de retourner auprès de sa famille sans pouvoir subvenir à leurs besoins.

" Tu es un homme mort si tu ne détaches pas ce chameau ", répliqua alors le cavalier. Le vagabond persista dans son refus. Le cavalier le mit en garde une dernière fois : " Tiens les rênes du chameau. Tu y trouveras trois nœuds. Dis-mois dans lequel de ces nœuds tu souhaites que je tire ma flèche. " L’homme désigna celui du milieu et le cavalier s’exécuta. La flèche vint se loger en plein milieu de sa cible avec une telle précision qu’on aurait cru qu’il l’y avait placée de sa propre main. Il envoya deux autres flèches dans les autres nœuds. Face à une telle adresse, l’homme se résigna à ranger sa flèche dans son étui, et à se rendre au cavalier. Le cavalier rangea son épée et son arc, et le somma de le suivre. L’homme s’attendait au pire : sa vie était entièrement entre les mains de ce cavalier. C’est alors que celui-ci lui dit, à sa grande surprise : " Penses-tu que je causerais du mal à l’homme qui a partagé la nourriture de Muhalhil (le vieil homme, son père) la nuit dernière ? "

L’homme, auquel le nom de Muhalhil était familier, demanda surpris : " Es-tu Zayd Al-Khayl ? " Lorsque le cavalier confirma son identité, l’homme plaida : " Aie pitié de moi ! " " Ne t’inquiète pas ", répliqua Zayd Al-Khayl calmement. " Si ces chameaux étaient les miens, je te les aurais donnés. Mais ils appartiennent à l’une de mes sœurs. Reste avec moi quelques jours, je vais prochainement attaquer une caravane. "

Trois jours plus tard, il attaqua effectivement les Banû Numayr, et captura une centaine de chameaux en guise de butin. Il les remit tous à l’homme, et le fit même accompagner par quelques-uns de ses hommes jusqu’à Hîrah, où résidait sa famille.

Ce récit, qui nous est conté par l’historien Ash-Shaybani, correspond à une période antérieure à la conversion à l’islam de Zayd Al-Khayl. Les archives de biographies nous donnent un nouvel aperçu de la vie de Zayd Al-Khayl après sa conversion.

Lorsque Zayd Al-Khayl eut connaissance de la mission du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, il décida de se renseigner personnellement sur lui. Il se rendit à Médine pour le rencontrer en compagnie d’une importante délégation de sa tribu, parmi lesquels Zurr Ibn Sadûs, Mâlik Ibn Jubayr et ʿÂmir Ibn Duwayn.

A leur arrivée à Médine, ils allèrent directement à la mosquée du Prophète — paix et bénédictions sur lui — prenant soin d’atteler leurs montures à l’entrée de la mosquée. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — était en train de faire un sermon public sur son minbar (chaire de mosquée). Son sermon émut Zayd ainsi que les membres de sa délégation. Ils étaient, par ailleurs, étonnés de la vive attention que les musulmans portaient à ses paroles et de l’effet qu’elles avaient sur eux. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — disait alors : " Il est plus dans votre intérêt de me suivre que d’adorer Al-ʿUzza (une des principales idoles des arabes au temps de l’ignorance) ou toutes autres idoles que vous vénérez. Il est plus dans votre intérêt de me suivre que de vénérer le chameau noir que vous déifiez en dehors de Dieu. "

Ce sermon guida Zayd Al-Khayl et certains de ces compagnons vers la voie de la vérité tandis que d’autres, tel que Zurr Ibn Sadûs rejetèrent le message du Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Lorsque Zurr vit la dévotion des compagnons du Muhammad, son cœur s’emplit à la fois d’envie et de crainte. Il dit à ses compagnons : " Cet homme détient le pouvoir de conquérir toute l’Arabie et tous les Arabes finiront par tomber sous son emprise. Je ne le laisserai jamais exercer une telle influence sur moi. " Il partit ensuite en Syrie où il se serait raser les cheveux (selon la coutume de certains moines) et se serait converti au christianisme.

La réaction de Zayd et d’autres personnes était tout autre. Lorsque le Prophète — paix et bénédictions sur lui — eut terminé son sermon, Zayd se leva, avec sa carrure et sa taille impressionnantes, et, d’une voix haute et claire, s’adressa à lui : " Ô Muhammad, j’atteste qu’il n’y a d’autre Dieu qu’Allah, et que tu es Son messager. " Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — vint à lui et lui demanda : " Qui es-tu ? - Je m’appelle Zayd Al-Khayl, fils de Muhalhil. - Dorénavant, tu es Zayd Al-Khayr, répondit le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, louange à Dieu qui t’a amené d’au-delà des collines et des vallées de ta terre natale et t’a rendu bienveillant à l’égard de l’islam. "

A partir de cet instant, Zayd fut connu sous le nom de Zayd Al-Khayr (Zayd le Bon). Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — l’invita chez lui ; d’autres compagnons du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, parmi lesquels ʿUmar Ibn Al-Khattâb, étaient présents. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — lui offrit un coussin pour s’asseoir mais Zayd déclina l’offre, embarrassé de se détendre ainsi en sa présence. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — réitéra son offre, et à nouveau Zayd déclina son offre. Cette scène se produisit à trois reprises. Finalement, lorsqu’ils furent tous installés, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — lui dit : " Ô Zayd, je n’ai auparavant jamais rencontré un homme - autre que toi - dont la description qui m’a été faite corresponde autant à la réalité. Tu possèdes deux qualités qui plaisent à Dieu et à son Prophète.

— Quelles sont-elles ? demanda Zayd.

— La persévérance et la sagacité, répondit le Prophète — paix et bénédictions sur lui —.

— Louange à Dieu qui m’a comblé de tels mérites qui obtiennent Son agrément ainsi que celui de son Prophète, répondit Zayd.

Il se tourna alors vers le Messager de Dieu et lui dit : " Ô Messager de Dieu, donne-moi trois cent cavaliers et je te fais la promesse de conquérir l’empire byzantin. "

Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — loua sa détermination. Durant cette visite, tous ceux qui séjournèrent avec Zayd se convertirent à l’islam. Ils souhaitèrent ensuite retourner chez eux à Najd et le Prophète — paix et bénédictions sur lui — leur fit ses adieux. Le désir de Zayd Al-Khayr d’œuvrer et de combattre pour la cause de l’islam ne devait cependant pas se concrétiser.

Il y avait à cette époque, à Médine La Lumineuse, une épidémie de fièvre. Avant d’y succomber, Zayd dit à ceux qui étaient restés avec lui : " Emmenez-moi loin de la terre de Qays. Je suis atteint de la maladie de la variole. Par Dieu, je ne suis pas destiné à combattre en tant que musulman avant ma rencontre avec Allah, le Très Grand, le Tout-puissant. "

Zayd prit la route du retour en direction de Najd malgré la gravité de sa fièvre. Il espérait retourner à temps vers sa famille et avoir l’honneur de les convertir lui-même à l’islam, par la grâce de Dieu. Il lutta de toutes ses forces contre la fièvre mais la maladie eut raison de lui, et il rendit le dernier souffle en cours de route avant d’avoir pu atteindre Najd. Entre le moment de sa conversion à l’islam et celui de sa mort, il n’avait commis aucun pêché.

P.-S.

Traduit de l’anglais de "Companions of The Prophet", Vol.1, de Abdul Wâhid Hâmid.

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