dimanche 10 mars 2002
Lors de la neuvième année de l’Hégire, un roi arabe fit ses premiers pas vers l’Islam après l’avoir haï pendant des années. Il se rapprochait de plus en plus de la foi, après s’y être opposé et l’avoir combattue. Il prêta finalement allégeance au Prophète (Qu’Allah le bénisse et lui accorde la Paix) après avoir refusé catégoriquement de le faire.
C’étaitʿAdiyy, fils du fameux Hâtim At-Tâ’î, qui était connu pour sa noblesse et sa grande générosité. ʿAdiyy avait hérité de son père et son statut fut conforté par les gens de Tayy. Une partie de son pouvoir résidait dans le fait que le quart de tout montant obtenu comme butin à la suite des pillages devait lui être versé.
Quand le Prophète - paix et bénédictions sur lui - annonça ouvertement son appel à la guidée et à la vérité et que les Arabes, une région après l’autre, acceptèrent ses enseignements, ʿAdiyy vit dans cette mission une menace pour sa position privilégiée. Même s’il ne connaissait pas personnellement le Prophète - paix et bénédictions sur lui - et ne l’avait jamais vu non plus, il développa de forts sentiments d’hostilité envers lui. Il resta opposé à l’Islam pendant près de vingt ans jusqu’à ce que Dieu ouvre finalement son cœur à la religion de la vérité et de la guidée.
La façon dont ʿAdiyy devint musulman est remarquable et il est sûrement la personne qui en parla le mieux. Il dit :
"Nul homme parmi les Arabes ne détesta le Messager de Dieu - paix et bénédictions sur lui - autant que moi lorsque j’entendis parler de lui. Je jouissais d’un rang et d’une noblesse. J’étais chrétien et je touchais le quart du butin de mes sujets comme le faisaient d’autres rois arabes. Quand j’entendis parler du Messager de Dieu (Qu’Allah le bénisse et lui accorde la Paix), je me mis à le détester. Quand sa mission s’intensifia, que son pouvoir se mit à croître et que son armée et ses forces expéditionnaires dominèrent l’Est et l’Ouest des terres d’Arabie, je dis à un de mes serviteurs qui gardait mes chameaux : ’ Prépare un chameau d’un bon gabarit, que je puisse monter facilement et attache-le près de moi. Si tu entends dire qu’une armée ou qu’une force expéditionnaire de Muhammad approche cette terre, fais-le moi savoir ’. Un soir, mon serviteur vint vers moi et me dit :
- Seigneur ! Ce que tu planifiais de faire à l’approche de la chevalerie de Muhammad près de tes terres, fais-le maintenant !
- Pourquoi ? Que ta mère te perde ! "
- J’ai vu des éclaireurs faire du repérage près des habitations. Je me suis renseigné à leur sujet et j’ai appris qu’ils étaient de l’armée de Muhammad, dit-il.
- Apporte le chameau que je t’ai demandé de préparer, lui dis-je.
Je me levai et ordonnai aux gens de mon foyer, y compris mes enfants, d’évacuer la terre que nous chérissions. Nous nous dirigeâmes vers la Syrie pour rejoindre les gens qui partageaient la même foi que nous, les chrétiens, et nous installer auprès d’eux.
Je partis trop vite pour rassembler tous les habitants de mon foyer. Lorsque je fis le point sur notre situation, je me rendis compte qu’une partie de ma famille manquait. J’avais laissé ma propre sœur dans nos terres du Najd avec le reste des habitants de Tayy. Je n’avais aucun moyen de retourner auprès d’elle. Alors, je continuai avec ceux qui étaient avec moi, puis nous atteignîmes la Syrie et nous installâmes en ces lieux, parmi nos coreligionnaires. Je craignais pour l’avenir de ma sœur.
Alors que j’étais en Syrie, la nouvelle me parvint que les forces de Muhammad avaient atteint nos habitations et avaient emmené ma sœur ainsi que d’autres captifs à Yathrib. Là, elle était tenue captive avec d’autres prisonniers, juste à côté de l’entrée de la Mosquée. Le Prophète - paix et bénédictions sur lui - passa devant elle. Elle se leva et dit :
- Messager de Dieu ! Mon père est mort et mon protecteur n’est pas là. Sois miséricordieux envers moi et Dieu sera Miséricordieux envers toi !
- Et qui est ton protecteur ?, demanda le Prophète.
- ʿAdiyy Ibn Hâtim, dit-elle.
- Celui qui a fui devant Dieu et son Prophète ?, demanda-t-il. Puis il la laissa et poursuivit son chemin.
Le lendemain, la même chose se passa. Elle lui parla exactement comme elle l’avait fait la veille et il répondit de la même manière. Le jour suivant, la même conversation eut lieu et elle désespéra de pouvoir obtenir une concession de sa part car il ne disait pas un mot. Puis, un homme qui était derrière lui, lui indiqua qu’elle devait se lever et lui parler. Elle se leva et dit :
- O Messager de Dieu ! Mon père est mort et mon protecteur est absent.
Sois miséricordieux envers moi et Dieu le sera envers toi !
- Je suis d’accord, dit-il. Il se tourna vers ceux qui étaient avec lui et ordonna : " Laissez la partir car son père aimait les manières nobles, et Dieu les aime aussi. "
- Je veux rejoindre ma famille en Syrie, dit-elle.
- Mais ne pars pas si rapidement, dit le Prophète - paix et bénédictions sur lui - "avant d’avoir trouvé une personne parmi les tiens qui soit digne de confiance pour t’accompagner en Syrie. Quand tu auras trouvé cette personne, fais-le moi savoir. "
Quand il partit, elle demanda qui était l’homme qui lui avait suggéré de parler au Prophète - paix et bénédictions sur lui - et su qu’il s’agissait de ʿAlî Ibn Abî Tâlib, que Dieu l’agrée. Elle resta à Yathrib jusqu’à ce qu’un groupe arrive, dont une personne en qui elle pouvait placer sa confiance. Elle alla donc voir le Prophète - paix et bénédictions sur lui - et dit :
- O Messager de Dieu ! Un groupe des miens est venu à moi, et parmi eux il y a une personne digne de confiance qui pourrait m’emmener vers ma famille.
Le Prophète (Qu’Allah le bénisse et lui accorde la Paix) lui donna des vêtements décents et une somme d’argent convenable. Il lui donna également un chameau et elle partit avec le groupe. Ainsi, nous suivions son avancée progressivement et attendions son retour. Nous pouvions à peine croire ce que nous avions entendu à propos de la générosité de Mohammad envers elle, et ce, malgré mon attitude envers lui. Par Dieu, moi qui suis chef parmi les miens, lorsque je vis une femme dans son palanquin venir vers nous, je dis : " La fille de Hâtim ! C’est elle ! C’est elle ! "
Quand elle se trouva devant nous, elle me dit d’un ton sec :
- Celui qui rompt les liens de parenté agit mal. Tu as pris ta famille et tes enfants et tu as laissé le reste de tes proches et ceux que tu aurais dû protéger. "
- Oui ma sœur, dis-je, tu ne dis que la vérité.
J’essayai de l’apaiser jusqu’à ce qu’elle soit satisfaite. Elle me raconta ce qui lui était arrivé et cela correspondait à ce que j’avais entendu. Puis, je lui demandai, puisqu’elle était une personne intelligente et judicieuse :
- Que pense-tu de la mission de cet homme ? (c’est à dire Muhammad Qu’Allah le bénisse et lui accorde la Paix).
- Je pense, par Dieu, que tu devrais rapidement te joindre à lui, dit-elle. "
- S’il s’agit d’un Prophète, celui qui se hâte de le suivre profitera de sa grâce. Et s’il s’agit d’un roi, tu ne te sentiras pas honteux devant lui alors que tu es ce que tu es.
Je me préparai immédiatement au voyage et partis à la rencontre du Prophète - paix et bénédictions sur lui -, à Médine, sans aucune protection ni aucune lettre. J’avais entendu qu’il avait dit : " J’aimerais que Dieu place la main de ʿAdiyy dans la mienne " Je me rendis jusqu’à lui. Il était dans la mosquée. Je le saluai et il dit : " Qui est cet homme ? ". "ʿAdiyy Ibn Hâtim", répondis-je. Il se leva, me prit par la main et nous nous dirigeâmes vers sa maison.
Par Dieu, alors qu’il marchait vers sa demeure, une vieille femme affaiblie le rencontra. Il y avait un jeune enfant avec elle. Elle l’arrêta et commença à lui parler de ses problèmes. Alors que j’assistais à la scène, je me dis : " Par Dieu, ce n’est pas un roi. " Il me prit alors par la main jusqu’à ce que nous arrivâmes à sa maison. Là, il prit un coussin en cuir, rempli de fibres de palme, me le tendit et dit :
- Assieds-toi dessus !
Je me sentais embarrassé et dis : " Assieds-toi plutôt dessus. "
- Non, toi, dit-il. Je cédai et m’assis dessus. Le Prophète - paix et bénédictions sur lui - s’assit sur le sol car il n’y avait pas d’autre coussin. Je me dis : " Par Dieu, cet n’est en aucun cas un roi ! " Il se tourna alors vers moi et dit : "
- Oui, ʿAdiyy Ibn Hâtim ! N’as-tu pas été un Rukusiqui prêchait une religion entre le christianisme et le sabéisme ?
- Oui, répondis-je.
- N’as-tu pas extorqué à tes sujets le quart du butin, prenant ainsi ce que la religion ne t’autorise pas à prendre ?
- Oui, dis-je. Je sus à cet instant qu’il était un Prophète envoyé par Dieu.
Puis, il me dit :
- Peut-être, ô ʿAdiyy, que la seule chose qui t’empêche d’entrer dans cette religion est la vue que tu as de la destitution des musulmans et de leur pauvreté. Par Dieu, le temps est proche, où les richesses circuleront parmi eux à tel point qu’on ne trouvera plus personne dans le besoin. Peut-être, ô ʿAdiyy, que la seule chose qui t’empêche d’entrer dans cette religion est le fait de voir le petit nombre de musulmans et leurs nombreux ennemis. Par Dieu, bientôt tu entendras parler d’une femme quittant Qadisiyyah sur son chameau pour rejoindre cette maison sans craindre personne excepté Dieu. Peut-être que ce qui t’empêche d’entrer dans cette religion est le fait de voir que la souveraineté et le pouvoir sont entre les mains de ceux qui ne sont pas musulmans. Par Dieu, tu entendras bientôt parler des palaces blancs de la terre de Babylone s’ouvrant à eux et des trésors de Chosroes, fils de Hormuz, tombant entre leurs mains.
- Les trésors de Chosroes, fils de Hormuz ?, demandai-je avec étonnement. "
- Oui, les trésors de Chosroes, fils de Hormuz, dit-il. A cet instant, je professai le témoignage de la vérité et déclarai mon acceptation de l’Islam.
Un hadith dit que ʿAdiyy voyant la simplicité du style de vie du Prophète - paix et bénédictions sur lui - lui dit : " Je témoigne que tu ne recherche ni une place élevée en ce bas monde, ni la corruption ", et il annonça son acceptation de l’Islam. Certains remarquèrent le traitement que le Prophète - paix et bénédictions sur lui - réserva à ʿAdiyy et lui dirent :
- Ô Prophète de Dieu ! Nous t’avons vu faire une chose que jamais personne n’a faite auparavant.
- Oui, répondit le Prophète - paix et bénédictions sur lui. Voici un homme qui occupe une place d’honner parmi les siens. Si un tel homme vennait à vous, traitez-le de façon honorable.
ʿAdiyy Ibn Hatim, qu’Allah soit satisfait de lui, vécut de longues années. Il dit plus tard : " Deux des choses que le Prophète avait annoncées se sont produites et il ne reste que la troisième. Par Dieu, cette chose va certainement arriver. " J’ai vu la femme quittant Qadisiyyah sur son chameau, ne ressentant aucune peur, jusqu’à ce qu’elle arrive à cette maison (celle du Prophète, à Médine). J’ai fait moi-même partie de l’avant-garde de la chevalerie qui tomba sur les trésors de Chosroes et en prit possession. Et je jure par Dieu que le troisième événement va se réaliser." Par la volonté de Dieu, la troisième affirmation du Prophète - paix et bénédictions sur lui -, eut lieu lors du Califat du dévot et ascète ʿUmar Ibn ʿAbd Al-ʿAzîz. Les richesses circulèrent parmi les musulmans, à tel point que les hérauts appelèrent les gens à venir bénéficier de la zakat et que personne ne répondit à cet appel.
source anglaise : "Companions of The Prophet"
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