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Qui va rénover notre religion ?

mardi 27 juillet 2004

Question

Dans le hadith suivant : « Dieu enverra à cette Communauté, à chaque début de siècle, qui lui rénovera sa religion », que signifie le mot « qui » ? Par ailleurs, est-il nécessaire de penser qu’un rénovateur individuel fera son apparition à chaque début de siècle hégirien ?

Réponse du Docteur Yûsuf ʿAbd Allâh Al-Qaradâwî

Ce hadith rapporté par Abû Dâwûd dans ses Sunan, par Al-Hâkim dans son Mustadrak, par Al-Bayhaqî dans Maʿrifat As-Sunan Wal-Âthâr et par At-Tabarânî dans son Awsat pourvoit la Communauté d’une puissante lueur d’espoir. Il chasse loin d’elle les ténèbres du désespoir, et insuffle en elle une âme nouvelle pleine d’optimisme. Il lui dit que Dieu ne l’abandonnera pas longtemps entre les crocs de la faiblesse qui peuvent la dévorer, ni à la fumée de l’accablement qui peut l’étouffer, ni aux griffes du déchirement qui peuvent la tuer. Bien au contraire, Dieu lui enverra d’un siècle à l’autre qui la rassemblera de sa dispersion, qui lui redonnera vie après la mort, qui la réveillera de sa torpeur. Ce sont là quelques significations du concept du renouveau. Ainsi, la Communauté est rénovée grâce à la religion et la religion est rénovée grâce à elle.

La plupart des commentateurs du Hadith sont d’avis que l’expression « qui lui rénovera sa religion » fait allusion à un individu unique, auquel Dieu octroie des qualités intellectuelles, morales et physiques qui lui permettent de rajeunir la religion et de lui redonner sa force et sa vitalité, et ce, au travers d’un savoir profitable, d’une œuvre bénéfique ou d’une lutte courageuse. C’est pour cette raison que les commentateurs ont essayé, à chaque début de siècle, d’identifier ce « rénovateur ». Ils se sont mis parfois d’accord, et ont parfois divergé. Ils se sont mis d’accord par exemple pour dire que le rénovateur du premier siècle est le Cinquième Calife Bien-Guidé ʿUmar Ibn ʿAbd Al-ʿAzîz, que le rénovateur du deuxième siècle est l’Imâm Muhammad Ibn Idrîs Ash-Shâfiʿî, que le rénovateur du cinquième siècle est Abû Hâmid Al-Ghazâlî, que le rénovateur du septième siècle est Ibn Daqîq Al-ʿÎd. Mais en-dehors de ceux-là, on a largement divergé sur les autres.

Je pense que le mot « qui », dans le hadith et dans la langue arabe en général, peut désigner un pluriel, tout comme il peut désigner un singulier. Ici, le mot peut parfaitement désigner un pluriel, car celui qui rénove la religion à chaque siècle n’est pas nécessairement un individu spécifique, mais plutôt un groupe d’individus, pouvant comprendre aussi bien des savants, que des dirigeants politiques, que des chefs militaires, que des éducateurs, et ainsi de suite. Ils peuvent aussi bien être d’un même pays que dispersés dans de nombreux pays, chacun travaillant individuellement dans son domaine ou collaborant entre eux dans ce qu’on pourrait assimiler à une corporation ou à une association. Les uns peuvent être des rénovateurs dans le domaine de la prédication et de la culture, d’autres dans le domaine du droit et de la jurisprudence, d’autres dans le domaine de l’éducation et de la formation, d’autres dans le domaine de la réforme sociale, d’autres dans le domaine économique et d’autres enfin dans le domaine politique. Il n’y a rien qui empêche la diversification de ces domaines ou les différences de formes que peut prendre le renouveau, du moment que cette diversité est de l’ordre de la spécialisation, et non de l’ordre de l’opposition et de la dissension. Je veux dire par-là qu’il faut qu’il y ait entre ces différents aspects du renouveau une complémentarité, une harmonie et une collaboration, de sorte qu’ils se complètent et se soutiennent tous mutuellement, et non qu’ils se condamnent les uns les autres ou qu’ils se sèment des obstacles les uns aux autres, ce qui mène inévitablement à leur affaiblissement à tous et au renforcement de leurs ennemis.

Relier le renouveau de l’Islam à un individu particulier et unique pousse les gens à vivre passivement en attendant l’apparition de celui-ci. Tout ce qu’ils auraient à faire serait de l’attendre jusqu’à ce qu’il sorte de sous terre et qu’il rénove ce qu’ils ont été incapables de rénover. C’est la raison pour laquelle les masses populaires sont si attachées à l’idée du « Mahdî attendu ». À mon avis, le renouveau doit être relié à un groupe, à une école ou à un mouvement, au sein duquel tout Musulman jaloux de sa religion peut accomplir son rôle dans le cortège de la rénovation et participer selon ses capacités dans le parcours de celle-ci. La question ne sera dès lors plus : « Quand apparaîtra le rénovateur de la religion ? », mais plutôt : « Que dois-je faire pour rénover la religion ? »

Et Dieu est le plus Savant.

P.-S.

Traduit de l’arabe du site Islamonline.net. La version originale est consultable sur archive.org.

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