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A l’époque des Ayyoubides

vendredi 15 septembre 2000

Le déclin des Fatimides

Les Fatimides gouvernèrent l’Égypte pendant deux cents ans. Malgré l’appartenance des Fatimides à la secte chiite-ismaélite, le peuple Egyptien resta fidèle à la tendance sunnite, enseignée dans des anciennes mosquées comme Jâmiʿ ʿAmr Ibn Al-ʿÂs. Cette différence de tendance entre gouverneurs et gouvernés n’était pas sans occasionner
des problèmes.

De plus, les Fatimides devaient faire face à des menaces externes croissantes. Des révoltes au Maghreb mirent fin à leur domination dans cette région. Ils perdirent également leurs provinces de l’Est, comme la Palestine, la Syrie et le Hijâz, désormais sous le contrôle turc, combattant pour le califat abbasside.

Au 11e siècle, des menaces de l’Europe surgirent. Les Croisés Francs avaient les yeux rivés sur des parties de l’empire fatimide agonisant. En 1095, Jérusalem fut envahie par les Croisés et bientôt toute la Palestine, ouverture stratégique sur la Syrie, la Haute Mésopotamie et l’Égypte. Les Fatimides étaient désormais incapables de défendre leur empire.

Trente ans après la prise de Jérusalem, le gouverneur
de Moussoul, Zangui, fonda la dynastie zanguide dans la Syrie et le Liban actuels. Il se lança dans la lutte contre les Francs. Il reprit en 1144 Edesse, la capitale de l’un des royaumes francs existants depuis 1099. A sa mort, son fils Nûr Ad-Dîn Mahmûd lui succèda. Guerrier exceptionnel, musulman sunnite, Nûr Ad-Dîn [ littéralement "La lumière de la Religion"] poursuivit farouchement les efforts de son père. Il libéra les forteresses franques au Nord de la Syrie. Les royaumes francs d’Edesse et d’Antioche tombèrent. La justice avec laquelle Nûr Ad-Dîn administra la Syrie fut légendaire.

Voyant que le roi chrétien de Jérusalem, Armaury Ier, avait des vues sur l’Égypte, Nûr Ad-Dîn anticipa en envoyant son armée dans les terres Egyptiennes sous le commandement de deux grands guerriers kurdes : Asad Ad-Dîn Shirkûh et Salâh Ad-Dîn Al-Ayyûbi (i.e. « Saladin » en occident). L’expédition de l’armée Syrienne en Égypte fut un grand succès pour Nûr Ad-Dîn. Les Croisés furent chassés, leurs collaborateurs parmi les fatimides également. Salâh Ad-Dîn [littéralement : "la droiture de la religion"] devint le grand vizir d’Égypte.

Avec la mort du dernier calife fatimide, Salâh Ad-Dîn instaura la dynastie des Ayyûbides où il rétablit le sunnisme.

Salâh Ad-Dîn Al-Ayyûbî (Saladin)

Salâh Ad-Dîn naquit dans une famille kurde en 1138 à Takrît, en Iraq. Musulman sunnite, il rêvait de la libération des territoires musulmans envahis par les Croisés. Il réalisa son rêve et fut glorifié par l’histoire. Les Egyptiens ont gardé leur tendance sunnite pendant le règne fatimide qui dura deux siècles. Cependant, de nombreuses habitudes fatimides avaient fini par déteindre sur la vie religieuse populaire du pays. Salâh Ad-Dîn commença par éradiquer toute influence fatimide sur la rue égyptienne. Il fit appel aux savants musulmans sunnites égyptiens, autrefois contraints à faire profil bas sous la dynastie fatimide. Il rétablit donc le sunnisme et après la mort de Nûr Ad-Dîn Mahmûd, les princes syriens lui prêtèrent allégeance. Il devint alors le Sultan d’Égypte et de Syrie qu’il rattacha au califat abbasside.

Les Fatimides restants se sont révoltés contre lui et
réunirent leurs forces en Haute-Égypte. Dirigée par son frère Al-ʿÂdil [Le Juste], l’armée écrasa la révolte.

Comme Al-Azhar était la mosquée officielle des Fatimides et un centre d’enseignement chiite, Salâh Ad-Dîn y arrêta la prière du vendredi ainsi que les cours chiites autrefois dispensés dans les halaqahs. Toutefois, il approuva l’enseignement des quatre écoles de jurisprudence sunnites à Al-Azhar.

La seconde priorité pour Salâh Ad-Dîn fut de reconquérir les Lieux Saints (Jérusalem). Son armée était essentiellement composée d’Egyptiens, de Syriens, et un certain nombre de généraux d’origine turque ou kurde. En réponse à l’attaque faite par les Croisés du château des Cracks de Chevaliers contre des pèlerins musulmans, Salâh Ad-Dîn ordonna son armée de se diriger au Nord de la Palestine. Dans une bataille historique à Hittîn, l’armée musulmane fut victorieuse de l’armée des Croisés malgré le désavantage numérique. La victoire à Hittîn ouvra la voie vers Jérusalem. Il entra dans la ville sans affrontement ni résistance et fit preuve de miséricorde envers les prisonniers de guerre. Le nom de Salâh Ad-Dîn fut gravé avec des lettres d’or dans la mémoire de l’Islam. Il devint le héros musulman de son temps et avec ses victoires, l’Égypte émergea dans le monde musulman comme le pays des chevaliers.

Salâh Ad-Dîn dut faire face à une troisième expédition de Croisés conduite par trois souverains européens : Philippe Auguste (France), Frédéric Barberousse (Allemagne) et Richard Cœur de Lion (Angleterre). L’armée de Salâh Ad-Dîn, essentiellement constituée d’Egyptiens, de Syriens et quelques Turcs, s’opposa aux forces croisées dans des batailles en Palestine. Le 10 juin 1190, l’Empereur d’Allemagne mourut à Sélef. Affaiblis par les forces de Salâh Ad-Dîn, les Croisés ont dû abandonner en 1192.

Salâh Ad-Dîn ne vécut pas longtemps après
ces victoires. Il retourna à Dieu en 1193 à Damas où il fut enterré. Dévoué pour la cause de l’islam, il ne cherchait pas sa propre fortune. Même en Occident, son nom est associé à la bravoure et à la chevalerie.

Ses successeurs devinrent les sultans d’Égypte, de Syrie, du nord de l’Iraq et la majeure partie de la Palestine. La capitale de leur dynastie fut le Caire, Damas était la deuxième ville la plus importante.

Les Ecoles ayyoubides

Bien que Salâh Ad-Dîn fit de l’Égypte la citadelle de l’Islam, repoussant toutes les menaces externes, il n’éprouvait pas de sympathie pour Al-Azhar. Il y voyait un outil mis en place par les Fatimides pour répandre leurs croyances, jugées non orthodoxes et hérétiques par les autres musulmans.

Afin d’affirmer avec force les croyances sunnites, Salâh Ad-Dîn entreprit des projets d’éducation. Il emprunta l’idée à son maître Nûr Ad-Dîn qui fit de la Syrie un grand centre intellectuel et construisit de nombreuses Ecoles islamiques sur tout le territoire Egyptien. Il paya généreusement les savants chargés d’y enseigner si bien que ces nouvelles Ecoles attirèrent de nombreux imâms. L’Égypte et la Syrie constituèrent alors le centre de gravité des sciences islamiques.

Les nouvelles Ecoles ou madrasah concurrencèrent Al-Azhar et contestèrent son rôle. Cela dit, Al-Azhar conservait un avantage par rapport à ces madrasah. En effet, la plupart de ces écoles étaient spécialisées dans l’enseignement de l’une des quatre écoles sunnites de jurisprudence (Hanafî, Maléki, Shâfîʿî ou Hanbalî) alors qu’à Al-Azhar les quatre écoles de jurisprudence étaient représentées et enseignées.

Savants d’Al-Azhar sous les Ayyoubides

Malgré la crise que connut Al-Azhar sous le règne Ayyoubide, cette université séculaire continuait à attirer de nombreux savants de renommée comme : Abû Al-Qâsim Al-Manfalûtî, Shams Ad-Dîn At-Tabeki, le soufî ʿOmar Ibn Al-Fârid, Saʿd Ad-Dîn Al-Hârithî, Jamâl Ad-Dîn Al-Asyûtî et le célèbre historien musulman Shams Ad-Dîn Ibn Khalikân.

P.-S.

RERERENCES

  • Muhammad Abd-Allah ʿInan, 1958, Tarikh al-Jamiʿ al-Azhar (L’histoire de la mosquée Al-Azhar).
  • Saniya Qura’a, 1968, Tarikh al-Azhar fî Alf ʿÂm (L’histoire d’Al-Azhar en mille ans).
  • ʿAbd al-ʿAziz al-Shinnâwî, 1983, al-Azhar Jamiʿan wa Jamiʿatan(Al-Azhar, une mosquée-université).

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