vendredi 9 novembre 2007
Sheikh Ahmad Ibn Mûsa Ibn Dawûd Al-ʿArûsî Ash-Shâfiʿî, l’un des nobles savants qui dirigèrent Al-Azhar, naquit en 1133 A.H. (1720 E.C.) dans le village de Minyat ʿArûs, dans la Province de Munûfiyyah, en Égypte. Il fut élevé au sein d’une famille aisée et bénéficiant d’une honorable renommée au sein de leur village.
Dans cette paisible campagne, au bord des rivières sommeillant sous les saules pleureurs et au pied des palmiers perdus à l’horizon, le jeune Ahmad Al-ʿArûsî franchit ses premiers pas et entama sa quête du savoir. Il se forma aux sciences religieuses dans son village et s’initia à la voie du tasawwuf (soufisme) et au dhikr selon les maîtres soufis en accompagnant le Sheikh Mustafâ Al-Bakrî, puis il se dirigea vers Al-Azhar Ash-Sharîf au Caire. Il se forma alors auprès des grands savants d’Al-Azhar et des érudits de la capitale égyptienne.
Il étudia le Sahîh d’Al-Bukhârî au sein de la Mosquée de l’Imâm Al-Husayn par les soins du Sheikh Ahmad Al-Malawî. Il étudia par ailleurs l’exégèse coranique, en particulier l’exégèse d’Al-Jalalayn et d’Al-Baydâwî, auprès du Sheikh ʿAbd Allâh Ash-Shabrâwî. Il assista aux cours du Sheikh Al-Hifnî qui enseignait le Sahîh d’Al-Bukhâri, avec son interprétation composée par l’Imâm Al-Qastillânî, le précis d’Ibn Abî Jamrah, Ash-Shamâ’il Al-Muhammadiyyah de l’Imâm At-Tirmidhî où il réunit de nobles mérites du Suzerain des Messagers, le commentaire d’Ibn Hajar sur les quarante hadiths réunis par l’Imâm An-Nawawî et Al-Jâmiʿ de l’Imâm As-Suyûtî. Il s’initia à la jurisprudence islamique et se forma auprès du Sheikh An-Nabarâwî, Sheikh Al-ʿAzîzî, Sheikh ʿAlî Qaytbay Al-Athîfî, Sheikh Hasan Al-Midbâghî, Sheikh ʿIsâ Al-Barrâwî et Sheikh ʿAtiyyah Al-Ajhûrî.
Il étudia les diverses branches des sciences islamiques auprès du Sheikh ʿAlî Ahmad As-Saʿîdî qu’il accompagna pendant de longues années. Il étudia aussi sous l’égide du Sheikh Ibrahîm Al-Halabî, Sheikh Ibrâhîm Muhammad Ad-Dalajî, et Sheikh Hasan Al-Jabartî, le père du célèbre historien ʿAbd Ar-Rahmân Al-Jabartî.
Il fit par ailleurs connaissance du Sheikh Ahmad Al-ʿIryân qui le combla de ses soins et lui accorda la main de l’une de ses filles. Des sources biographiques précisent que son beau-père, Sheikh Al-ʿIryân, lui prédit un avenir brillant et lui affirma, par la clairvoyance dont Dieu comble les gnostiques, qu’il sera un jour le Grand Imâm d’Al-Azhar – chose qui se réalisa après le décès du Sheikh Al-ʿIryân.
Sheikh Al-ʿArûsî endura de nombreuses épreuves au cours de sa vie, notamment lorsqu’il fut choisi par les savants azharites pour diriger cette citadelle du savoir. En effet, lorsque le Sheikh de l’Islâm Ahmad Ad-Damanhûrî fut atteint de la maladie de sa mort, le Sheikh ʿAbd Ar-Rahmân Al-ʿArîshî – le chef des juristes hanfites à Al-Azhar – prétendit que l’Imâm Ad-Damanhûri l’avait choisi comme suppléant ; il essaya à cette fin de gagner le soutien de certains princes influents et, après la mort d’Ad-Damanhûrî, il se proclama Grand Imâm d’Al-Azhar. Mais les juristes shaféites refusèrent ce fait accompli et choisirent Sheikh Al-ʿArûsî pour ce poste de Grand Imâm. Ibrâhîm Bek, le maire de la ville, s’opposa à leur plan et apporta son soutien au Sheikh Al-ʿArîshî, si bien que les maîtres shaféites se révoltèrent et se réunirent dans la Mosquée de l’Imâm Ash-Shâfiʿî, entourés par une grande foule venant leur apporter un soutien populaire massif. Les affrontements s’étendirent sur sept mois au terme desquels ce poste fut occupé par Sheikh Ahmad Al-ʿArûsî.
Il fut connu pour son courage, sa fermeté avec les princes et les gouverneurs, et son intransigeante défense des intérêts du peuple égyptien. Il fut par ailleurs un homme apaisé, au caractère raffiné, manifestant les nobles manières de l’islam et la quiétude des savants seigneuriaux. Outre son humilité, il éprouvait une grande compassion envers les plus faibles et les plus démunis. Son savoir, sa droiture et la bonté de son cœur lui valurent l’estime et l’amour des gens, ainsi que le respect des gouverneurs qui veillèrent à le solliciter pour bénéficier de ses conseils.
Voyant la situation économique du pays se dégrader, Sheikh Al-ʿArûsî fut tourmenté par la pauvreté qui s’abattit sur les siens. L’histoire retiendra sa bravoure le jour où il alla rencontrer le gouverneur, Hasan Pacha, et protesta contre la cherté de la vie et les prix qui asphyxient le peuple. Le gouverneur, après concertation avec les princes aisés, honora la requête du Sheikh Al-ʿArûsî et baissa de façon significative le prix du pain, la viande, le beurre et d’autres denrées alimentaires.
Malgré son poste à la tête d’Al-Azhar, le Sheikh continua à diffuser son savoir et son cercle d’enseignement attira d’innombrables étudiants qui bénéficièrent de son érudition, mais aussi de sa compassion, son affection paternelle et sa générosité, notamment envers les plus pauvres parmi eux.
Se dépensant dans l’enseignement et la présidence d’Al-Azhar Ash-Sharif, il composa peu d’ouvrages. Nous lui devons un commentaire d’un poème d’Al-Malawî en matière de tasawwuf et une glose en matière d’éloquence.
Sheikh Al-ʿArûsî décéda en 1208 A.H. (1794 E.C.) et fut enterré auprès de son beau-père, Sheikh Ahmad Al-ʿIryân. Son fils Muhammad lui succéda à son cercle d’enseignement au sein d’Al-Azhar, puis fut choisi plus tard au poste de Grand Imâm d’Al-Azhar en 1234 A.H. (1818 E.C.).
A sa mort, un voile de deuil couvrit Al-Azhar et une prière funéraire, réunissant une foule nombreuse d’étudiants, de savants et de gens du peuple, fut tenue au sein de la Mosquée Al-Azhar. Par ailleurs, des poèmes furent composés pour pleurer le départ du Sheikh de l’Islâm Al-ʿArûsî et Monsieur Ismâʿîl Al-Khashâb dit, dans un long poème de deuil :
Comment ne pas verser mes larmes amèrement, quand je vois chuter les astres du ciel de la gloire.
Puisse Dieu lui faire miséricorde.
Source biographique arabe : Shuyûkh Al-Azhar, v. 2, Ashraf Fawzî Sâlih.
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