mercredi 29 mai 2002
Zayd, fils de ʿAmr, se tenait au loin des Qurayshites lorsqu’ils célébraient leurs fêtes. Les hommes étaient vêtus de turbans de brocarde et de burdabs du yémen. Les femmes et les enfants se paraient également de leurs plus beaux vêtements et de bijoux scintillants. Zayd s’apercevait que les animaux voués au sacrifice étaient caparaçonnés et amenés pour être sacrifiés aux idoles. C’était trop difficile pour lui de rester silencieux. Appuyé contre un mur de la Kaʿbah, il cria : " Ô gens de Quraysh ! C’est Dieu qui a créé les moutons. C’est Lui qui a envoyé depuis le ciel la pluie qui les abreuve et c’est Lui qui a fait pousser de la terre le fourrage qui les nourrit. Et malgré cela, vous les égorgez au nom d’un autre que Lui. En vérité, vous êtes des ignorants. "
L’oncle de Zayd, Al-Khattâb, le père de ʿOmar Ibn Al-Khattâb, bouillit de colère. Il avança à grands pas vers lui, le gifla violemment et cria : " Maudit sois-tu ! Nous ne cessons d’entendre de telles stupidités de ta part. Nous l’avons supporté jusqu’ici mais notre patience a atteint ses limites. "
Al-Khattâb incita alors un certain nombre de personnes à harceler et persécuter Zayd et à rendre son existence pénible. Ces incidents, qui eurent lieu avant le début de la mission prophétique de Muhammad — paix et bénédictions sur lui —, donnèrent un avant-goût du violent conflit qui allait s’établir entre les tenants de la vérité et les partisans des pratiques idolâtres. Zayd faisait partie des rares hommes, nommés les hanîf, qui savaient vraiment ce qu’étaient les pratiques idolâtres et s’en démarquaient. Il refusait non seulement d’y prendre part mais encore de manger toute viande sacrifiée en l’honneur des idoles. Il proclamait son adoration du Dieu d’Ibrahim — paix sur lui — et ne craignait de s’opposer aux gens en public, tel qu’il est apparu dans le précédent incident l’a démontré.
Son oncle Al-Khattâb, fidèle aux vieilles coutumes païennes des Qurayshites, fut choqué du peu de considération que Zayd avait à l’égard des divinités qu’ils adoraient. Il le fit harceler et persécuter jusqu’à ce que ce dernier soit forcé de quitter la vallée de La Mecque et d’aller chercher refuge dans les montagnes avoisinantes. Il engagea même une bande de jeunes hommes à qui il donna l’instruction de l’empêcher d’approcher La Mecque et d’entrer dans le sanctuaire.
Zayd réussit à entrer secrètement à La Mecque. Là, il rencontra des gens comme Waraqah Ibn Nawfal, ʿAbd Allâh Ibn Jahsh, Uthman Ibn Al-Hârith et Umaymah Bint ʿAbd Al-Muttalib, la tante paternelle de Muhammad Ibn ʿAbd Allâh. Ils discutèrent longuement sur le profond égarement dans lequel les Arabes s’étaient engouffrés. Zayd s’adressa de la façon suivante à ses amis : " Certainement, par Dieu, vous savez que les croyances de ces gens ne sont pas valides et qu’ils ont déformé et transgressé la religion d’Ibrahim. Adoptez une religion que vous pourrez suivre et qui pourra pour apporter le salut. "
Zayd et ses amis allèrent alors trouver des rabbins et des érudits parmi les chrétiens des autres communautés afin d’en apprendre plus et revenir à la religion pure d’Ibrahim — paix sur lui —.
Parmi les quatre personnes mentionnées, Waraqah devint chrétien, ʿAbd Allâh Ibn Jahsh et Uthman Ibn Al-Hârith ne parvinrent pas à une conclusion nette. Quant à Zayd Ibn ʿAmr son histoire fut quelque peu différente. Trouvant impossible de rester à La Mecque, il quitta le Hijâz et se dirigea vers Mawsil, au Nord de l’Iraq puis vers le sud-ouest de la Syrie. Tout au long de son voyage il interrogea des moines et des rabbins à propos de la religion d’Ibrahim. Le moine lui conseilla, s’il lui venait à rencontrer le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, de n’avoir aucune hésitation à le reconnaître et à le suivre.
Zayd revint sur ses pas et se dirigea vers La Mecque avec l’intention de rencontrer ce fameux prophète. Alors qu’il passait par le territoire de Lakhm, à la frontière sud de la Syrie, il fut attaqué par un groupe de nomades arabes puis tué avant d’avoir pu voir le Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Avant de pousser son dernier soupir, il leva les yeux au ciel et dit : " Ô Seigneur ! Si Tu m’as empêché d’atteindre ce bien, n’empêche pas mon fils d’en faire autant. "
Il est dit que, quand Waraqah apprit la mort de Zayd, il écrivit une éloge à son sujet. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — le loua également et dit : " Le jour de la résurrection, il sera élevé comme ayant, à lui tout seul, la valeur de tout un peuple. "
Dieu, qu’Il soit glorifié, entendit la prière de Zayd. Lorsque Muhammad, le Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui —, invita les gens à l’islam, son fils fut parmi les premiers à croire à l’unicité de Dieu et à affirmer sa foi en la prophétie de Muhammad — paix et bénédictions sur lui —. Cela n’est pas étrange puisque Saʿîd grandit dans un foyer qui répudiait les coutumes idolâtres des Qurayshites et qu’il fut élevé par un père qui passa sa vie à rechercher la vérité et qui mourut à la poursuite de celle-ci.
Saʿîd n’avait pas encore vingt ans lorsqu’il embrassa l’islam. Sa jeune et sérieuse épouse Fâtimah, fille d’Al-Khattâb et sœur de ʿOmar, accepta également l’islam assez tôt. Ils réussirent tous deux à cacher leur appartenance à cette religion aux yeux des Qurayshites et surtout de la famille de Fâtimah pendant un certain moment. Elle craignait à la fois son père et son frère ʿOmar qui avaient appris à vénérer la Kaʿbah et étaient attachés à l’unité des Qurayshites ainsi qu’à leur religion.
ʿOmar était un jeune homme têtu et d’une grande détermination. Il vit en l’islam une menace pour les Qurayshites et devint très violent dans ses attaques envers les Musulmans. Il décida que le seul moyen de mettre fin à ces troubles était d’éliminer l’homme qui les avait causés. Guidé par une fureur aveugle, il saisit son épée et partit en direction du Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Sur son chemin il tomba nez à nez avec un homme qui croyait secrètement au Prophète — paix et bénédictions sur lui — et qui, en voyant l’expression de son visage, lui demanda ce qu’il faisait. " Je vais tuer Muhammad… ", répondit-il.
Il n’y avait aucun doute sur son amertume et ses intentions meurtrières. Le croyant chercha à l’en dissuader mais ʿOmar n’écouta aucun de ses arguments. Il essaya alors de le divertir pour avoir au moins le temps de prévenir le Prophète — paix et bénédictions sur lui —.
" ʿOmar !, dit-il, pourquoi ne vas-tu pas d’abord voir les gens de ta propre maison pour les remettre dans le droit chemin ?
- Quels gens de ma maison ?, demanda ʿOmar.
- Ta sœur Fâtimah et ton beau-frère Saʿîd. Ils ont tous deux abandonné ta religion et suivent celle de Muhammad. "
ʿOmar se dirigea alors vers la maison de sa sœur et l’appela avec colère. Khabbâb Ibn Al-Aratt, qui venait souvent réciter le Coran à Saʿîd et Fâtimah, était avec eux. Lorsqu’ils entendirent la voix de ʿOmar, Khabbâb se cacha dans un coin et Fâtimah dissimula le manuscrit mais ʿOmar avait entendu leur récitation et il dit en entrant : " Quel est ce balbutiement que j’ai entendu ?! ".
Ils tentèrent de lui faire croire qu’il avait entendu une conversation normale mais il insista : " Je l’ai entendu, dit-il, et il est possible que vous soyez tous deux devenus des renégats.
- As-tu déjà pensé que la vérité pouvait ne pas se trouver dans ta religion ? ", dit Saʿîd à ʿOmar en essayant de le raisonner. ʿOmar se jeta, malgré tout, sur son beau-frère en le frappant aussi fort qu’il le put. Fâtimah alla défendre son mari et ʿOmar frappa son visage qui se mit à saigner.
" Ô ʿOmar !, dit Fâtimah en colère, et si la vérité ne se trouvait pas dans ta religion ? Je témoigne qu’il n’y a de Dieu qu’Allah et je témoigne que Muhammad est le Messager de Dieu. "
La blessure de Fâtimah saignait. Lorsque ʿOmar vu le sang, il fut horrifié de ce qu’il venait de faire. Un changement s’opéra en lui et il dit à sa sœur : " Donne-moi ce texte que tu as pour que je le lise. " Comme eux, ʿOmar savait lire mais lorsqu’il demanda le texte, Fâtimah lui dit : " Tu es impur et seuls les purs peuvent le toucher. Accomplis les grandes ablutions d’abord. "
C’est ainsi que ʿOmar alla se laver. Sa sœur lui donna la page sur laquelle étaient écrits les premiers versets de la sourate Ta Ha. Il commença à lire et lorsqu’il atteint le verset : " Moi, en vérité, je suis Dieu ! Adore-moi donc ! Observe la prière en invoquant mon nom ! " (Sourate 20, Tâ Ha, verset 14), il dit : " Montrez-moi où se trouve Muhammad ! "
ʿOmar se dirigea alors vers la maison d’Al-Arqam et déclara son entrée en islam. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — ainsi que ses compagnons en furent réjouis.
Saʿîd et sa femme Fâtimah avaient été la cause immédiate de la conversation de l’homme fort et déterminé qu’était ʿOmar et ceci vint s’ajouter au pouvoir et au prestige de cette foi émergente.
Saʿîd Ibn Zayd était entièrement dévoué au Prophète — paix et bénédictions sur lui — et au service de l’islam. Il participa à toutes les grandes campagnes et rencontres engagées par le Prophète — paix et bénédictions sur lui — à l’exception de celle de Badr. Avant Badr, il fut envoyé par le Prophète — paix et bénédictions sur lui — ainsi que Talhah à Hawra sur les côtes de la mer rouge, à l’ouest de Médine, afin de lui apporter des nouvelles concernant une caravane des Qurayshites qui revenait de la Syrie. Quand Saʿîd et Talhah retournèrent à Médine, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — était déjà parti pour Badr avec la première armée musulmane composée de trois cents hommes.
Après la mort du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, Saʿîd continua à jouer un rôle important dans la communauté musulmane. Il fut parmi ceux qu’Abû Bakr consulta à propos de sa succession et son nom fut souvent lié à des compagnons tels que ʿUthmân, Abû Ubaydah et Saʿd Ibn Abî Waqqâs au cours des batailles qui furent menées. Il était connu pour son courage et son héroïsme. Le récit de la bataille de Yarmûk en donne un aperçu. Il dit : " Pour la bataille de Yarmûk, nous étions à peu près vingt quatre mille. Les Byzantins avaient mobilisés vingt mille et cent hommes. Il avancèrent vers nous dans un mouvement lourd comme si les montagnes étaient en train de bouger. Les évêques et les prêtres progressaient à leur tête en portant des croix et chantant des litanies qui étaient répétées par les soldats derrière eux.
Lorsque les Musulmans se rendirent compte de leur vaste mobilisation, ils s’inquiétèrent de leur grand nombre et un sentiment d’anxiété et de peur envahit leur cœur. Alors, Abû Ubaydah se tint devant les Musulmans et les encouragea à se battre : " Adorateurs de Dieu !, dit-il, aidez Dieu et Dieu vous aidera et affermira vos pas. Adorateurs de Dieu ! Soyez patients et résolus car ce sont des qualités qui vous apporteront le salut, c’est un moyen d’atteindre la satisfaction de Dieu et une défense contre l’ignominie et le déshonneur. Déployez vos lances et protégez-vous avec vos boucliers. Ne prononcez aucune parole si ce n’est l’évocation de Dieu Le Très-Haut jusqu’à ce que je vous en donne l’ordre, si Dieu veut. "
Alors, un homme sortit des rangs des musulmans et dit : "J’ai décidé de mourir durant cette heure. Avez-vous un message à passer au Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — ?
- Oui, répondit Abû Ubaydah, passe lui le salâm de ma part ainsi que de celle des musulmans et dis-lui : " Ô Messager de Dieu ! Ce que notre Seigneur nous a promis est véridique. "
Lorsque je vis cet homme parler ainsi puis saisir son épée pour affronter l’ennemi, je me jetai au sol et rampai à quatre pattes et, avec mon épée, je fis tomber le premier ennemi à cheval qui avançait vers nous. Puis, je me lançai sur l’ennemi et Dieu ôta de mon cœur toute peur. Les musulmans s’engagèrent alors et continuèrent à se battre jusqu’à la victoire. "
Saʿîd fut qualifié par le Prophète — paix et bénédictions sur lui — d’un des hommes les plus exceptionnels de sa génération. Il fut parmi les dix compagnons à qui le Prophète rendit visite un jour et promit le Paradis. Ces dix élus sont : Abû Bakr, ʿOmar, Uthman, ʿAlî, ʿAbd Ar-Rahmân Ibn Awf, Abû Ubaydah, Talhah, Az-Zubayr, Saʿd de Zuhrah et Saʿîd fils de Zayd le Hanif. Les livres relatant les propos du Prophète — paix et bénédictions sur lui — citent ses grands éloges à l’égard de ces Dix Promis ainsi que d’autres à qui, à diverses occasions, il annonça également la bonne nouvelle du Paradis.
Traduit de l’anglais de "Companions of The Prophet", Vol.1, écrit par Abdul Wâhid Hâmid.
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