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Sâlim Mawlâ Abî Hudhayfah

dimanche 19 mai 2002

En donnant conseil à ses compagnons, le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — dit un jour : "Apprenez le Coran auprès de quatre personnes : ʿAbd Allâh Ibn Masʿûd, Ubayy Ibn Kaʿb, Muʿâdh Ibn Jabal et Sâlim Mawla Abi Hudhayfah."

Qui était ce quatrième compagnon en qui le Prophète — paix et bénédictions sur lui — avait tellement confiance qu’il le considérait comme hujjah (une référence probante et une autorité respectable) et comme ayant les compétences pour enseigner le Coran et en être une référence ?

Sâlim était un esclave et lorsqu’il accepta l’islam il fut adopté par un musulman qui était un ancien noble des Quraysh. Quand la pratique de l’adoption (où la personne adoptée portait le nom de son père adoptif) fut bannie, Sâlim devint un simple frère, un compagnon et un mawlâ (personne protégée) de celui qui l’avait adopté, Abû Hudhayfah Ibn ʿUtbah. Par les bénédictions de l’islam, Sâlim s’éleva à une position d’homme de haute estime au sein des musulmans du fait de ses vertus ainsi que de sa piété.

Sâlim et Abû Hudhayfah acceptèrent tous deux très tôt l’islam. Abû Hudhayfah l’avait fait en s’opposant à son père, le fameux ʿUtbah Ibn Rabi’ah qui était très virulent dans ses attaques contre le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et ses compagnons.

Quand le verset du Coran abolissant l’adoption fut révélé, certains hommes tels que Zayd et Sâlim durent changer leur nom. Zayd, qui était connu sous le nom de Zayd Ibn Muhammad, devait désormais porter le nom de son père naturel. Ainsi, il adopta le nom de Zayd Ibn Hârithah. Sâlim, cependant, ne connaissait pas le nom de son père car ne savait qui il était. Il resta sous la protection d’Abû Hudhayfah et fut donc appelé Sâlim Mawlâ Abû Hudhayfah.

En abolissant la pratique de l’adoption, l’islam voulait mettre l’accent sur les obligations et les responsabilités inhérentes à la parenté naturelle. Cependant, aucune relation n’était plus forte que les liens unissant les gens dans l’islam et la foi et qui étaient à la base de la fraternité. Les premiers musulmans le savaient très bien. Il n’y avait personne de plus cher pour eux qu’Allah, Son Messager — paix et bénédictions sur lui — et leurs frères dans la foi.

Nous savons comme les Ansârs (Auxiliaires) de Médine ont accueilli et accepté les Muhâjirîns de la Mecque et comme ils ont partagé avec eux leurs maisons, leurs richesses et leurs cœurs. C’est ce même esprit de fraternité qui était présent entre l’aristocrate de Quraysh, Abû Hudhayfah, et l’humble esclave qu’était Sâlim. Ils furent bien plus que de simples frères jusqu’à la fin de leur vie ; ils moururent ensembles, un corps à côté de l’autre, une âme avec l’autre. Telle est l’essence et la grandeur de l’islam. Les considérations ethniques et sociales n’ont pas d’importance aux yeux d’Allah. Seules la foi et la piété comptaient, comme les versets du Coran et les dires du Prophète — paix et bénédictions sur lui — le rappelaient incessamment : "Le plus honorable parmi vous pour Dieu c’est le plus pieux", dit le Coran. "Aucun arabe n’a l’avantage sur un autre, excepté par la piété.", enseigna le Prophète — paix et bénédictions sur lui — qui dit également : "Le fils d’une femme blanche n’a aucun avantage sur celui d’une femme noire, excepté par la piété."

Dans cette société nouvelle et juste, régie par l’islam, Abû Hudhayfah trouva honorable pour lui-même de protéger celui qu’il avait eu pour esclave.

Dans cette société nouvelle et bien guidée régie par l’islam, qui mettait fin à la division injuste des classes et aux fausses distinctions sociales, Sâlim se trouva, grâce à son honnêteté, sa foi et sa volonté à se sacrifier, en tête des croyants. Il fut l’imam des Muhajirîns de la Mecque à Médine, guidant la prière dans la mosquée de Qubâ qui fut construite des mains du Prophète — paix et bénédictions sur lui — en personne. Il devint une référence en ce qui concerne le livre de Dieu, à tel point que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — recommanda aux musulmans d’apprendre le Coran auprès de lui. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — avait une très haute estime de lui et il dit à son propos : " Louange à Dieu qui a placé dans ma communauté quelqu’un comme toi ! " Même ses frères musulmans l’appelaient "Sâlim min as-Salihin - Sâlim est un pieux".

L’histoire de Sâlim est la même que celle de Bilâl ainsi que celles de dizaines d’autres esclaves et de pauvres personnes que l’islam a tirées de l’esclavage et de la dégradation pour en faire des imams et des commandants dans une société de guidée et de justice. La personnalité de Sâlim fut façonnée par les vertus islamiques. Parmi ses qualités, son franc parler lorsqu’il sentait qu’il était de son devoir de prendre la parole, surtout lorsqu’un mal était commis.

Un incident qui eut lieu après la libération de la Mecque illustre bien cela. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — envoya quelques-uns de ses compagnons vers les villages et les tribus qui entouraient la ville. Il leur rappela qu’ils étaient envoyés pour inviter les gens à l’islam et non pour se battre. Khâlid Ibn Al-Walîd en fit partie. Durant la mission, Khâlid se battit et tua un homme bien que celui-ci ait témoigné qu’il était devenu musulman. Khâlid avait agi ainsi croyant que cet homme n’était pas sincère dans sa déclaration de foi et que celle-ci n’était qu’un artifice pour échaper à la mort.

Sâlim et d’autres accompagnaient Khâlid lors de cette mission. Aussitôt que Sâlim vit ce que Khâlid avait fait, il se dirigea vers lui et le réprimanda sur les erreurs qu’ils avaient commises. Khâlid, ce grand leader et commandant militaire à la fois durant l’époque de la Jahiliyyah et après l’arrivé de l’islam, resta muet un instant. Il essaya ensuite de se défendre avec ferveur mais Sâlim resta ferme sur ses positions considérant que Khâlid venait de commettre une grave erreur. Sâlim ne se comporta pas avec Khâlid comme un pauvre esclave se comporterait face un noble de Quraysh car l’islam les avait placés sur un pied d’égalité. C’est la justice et la vérité qu’il fallait défendre. Il ne le considéra pas comme un leader dont les erreurs devaient être couvertes ou justifiées mais comme un partenaire partageant de façon égale une responsabilité et une obligation. Il ne s’opposa pas non plus à Khâlid de façon passionnée ou injustifiée mais avec le souci de faire part d’un conseil sincère ainsi que d’une auto-critique mutuelle que l’islam avait autorisée. Une telle sincérité mutuelle était constamment mise en avant par le Prophète — paix et bénédictions sur lui — par ces paroles : " Ad-dinu an-Nasihah. Ad-dinu an-Nasihah. Ad-dinu an-Nasihah. - La religion, c’est le conseil sincère. La religion, c’est le conseil sincère. La religion, c’est le conseil sincère. "

Lorsque le Prophète — paix et bénédictions sur lui — entendit ce que Khâlid avait fait, il fut profondément affligé et adressa de longues et ferventes supplications à son Seigneur : " Ô Seigneur, dit-il, Je suis innocent devant toi pour ce que Khâlid a fait ", puis il demanda : "Quelqu’un l’a-t-il réprimandé ? "

La colère du Prophète — paix et bénédictions sur lui — s’apaisa lorsque quelqu’un lui dit : " Oui, Sâlim l’a réprimandé et s’est opposé à lui. "

Sâlim vécut auprès du Prophète — paix et bénédictions sur lui — et des croyants. Jamais il ne fut lent ou réticent dans l’accomplissement des actes d’adoration, il ne râta aucune campagne et la relation de fraternité qu’il entretenait avec Abû Hudhayfah grandit de jour en jour.

Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — fut rappelé par son Seigneur et Abû Bakr prit la responsabilité des affaires des musulmans et il dut immédiatement faire face aux conspirations des apostats qui menèrent à la bataille de Yamâmah. Sâlim et son " frère " Abû Hudhayfah furent parmi les forces musulmanes qui se dirigèrent vers les terres centrales d’Arabie.

Au début de la bataille, les forces musulmanes subirent un terrible revers. Les musulmans se battaient de façon individuelle, la force générée par la solidarité était donc absente. Alors, Khâlid Ibn Al-Walîd regroupa les hommes et réussit à organiser une coordination surprenante.

Abû Hudhayfah et Sâlim s’étreignirent et firent le vœu de chercher le martyr pour la cause de la religion de la vérité et ainsi d’obtenir le bonheur dans l’au-delà. Yamâmah fut leur rendez-vous avec le destin. Pour motiver les troupes, Abû Hudhayfah cria : " Yâ Ahl Al-Quran ! - Ô gens du Coran ! Honorez le Coran par vos actions !", alors que son épée transperçait l’armée de Musaylamah l’imposteur telle un tourbillon. Sâlim cria à son tour : "Quel misérable porteur du Coran je fais si les musulmans sont attaqués de mon côté ! Loin de toi cette situation, Ô Sâlim ! Sois le digne porteur du Coran ! "

Il plongea alors dans la bataille avec courage. Quand le porteur de l’étendard des Muhâjirîns (Emigrés), Zayd Ibn Al-Khattâb, tomba, Sâlim porta le drapeau et continua à se battre. Sa main droite ayant été touchée, il porta l’étendard de la main gauche tout en récitant des versets du glorieux Coran : "Combien de prophètes ont combattu, en compagnie de beaucoup de disciples seigneuriaux, ceux-ci ne fléchirent pas à cause de ce qui les atteignit dans le sentier d’Allah. Ils ne faiblirent pas et ils ne cédèrent point. Et Allah aime les endurants." (3:146) Combien ce verset était motivant dans une telle situation ! Et combien pertinent est cet épithète pour quelqu’un qui dépense sa vie pour l’islam !

Un groupe d’apostats entourèrent Sâlim et le blessèrent très sévérement. Une souffle de vie subsista en lui jusqu’à ce que la bataille prenne fin par la mort de Musaylamah. Quand les musulmans allèrent à la recherche des victimes et des martyrs, ils trouvèrent Sâlim à l’agonie. Alors que son sang s’écoulait, il demanda :
" Qu’est-il arrivé à Abû Hudhayfah ?
- Il est tombé en martyr.
- Alors étendez-moi auprès de lui.
- Il est près de toi, Sâlim, il est tombé à cet endroit même. "

Sâlim fit un dernier sourire et cessa de parler. Les deux hommes avaient réalisé ce qu’ils avaient espéré. Ensemble ils entrèrent dans l’islam. Ensemble ils vécurent. Ensemble ils tombèrent en martyrs.

Sâlim, ce grand croyant fut rappelé par son Seigneur. À son propos, alors qu’il était en train de mourir, le grand ʿOmar Ibn Al-Khattâb dit : " Si Sâlim avait survécu, j’aurais fait de lui mon successeur. "

P.-S.

Basé sur "Companions of The Prophet", Vol. 1, de Abdul Wâhid Hâmid.

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