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La zakât, sa philosophie et ses conditions

La zakât des métaux et des trésors enfouis

lundi 12 décembre 2005

Les jurisconsultes ne sont pas d’accord sur la définition des métaux et des trésors enfouis sous terre.

Abû Hanîfah n’opère aucune distinction entre métaux et trésors.

Pour les Malékites, le métal correspond à tout corps se trouvant au sein de la terre, comme les veines d’or et d’argent, le cuivre, le plomb, le soufre, le sel, le pétrole, ou dans la mer comme les perles, le corail, etc. Les trésors enfouis correspondent à l’or et à l’argent cachés sous terre par les hommes, comme faisaient les Arabes païens. La différence entre métal et trésor se rapporte au fait que le métal est d’origine terrestre — donc créé par Dieu —, alors que le trésor est une épargne mise sous terre par les soins de son propriétaire.

De même, les jurisconsultes ne sont pas en parfait accord quant au droit revenant au pauvre ou à l’État, de ces dits métaux et trésors. À ce sujet, je citerai plusieurs opinions, puis je choisirai celle qui est la plus favorable au pauvre.

La zakât des métaux non travaillés

  1. Les Hanbalites prélèvent le quart du dixième, soit 2,5%, sur tout ce qu’on extrait de la terre, si sa valeur atteint le seuil imposable.
  2. Les Hanafites prélèvent le cinquième, soit 20%, sur tout métal devant subir le feu, comme l’or, l’argent, le fer. Ce cinquième doit être distribué au profit des catégories de personnes citées dans le verset : « Sachez que sur le butin, le cinquième revient à Dieu, à son Prophète, à ses proches parents, aux orphelins, aux pauvres et aux voyageurs, si vous croyez en Dieu, et à ce que nous avons révélé à notre Serviteur le jour où l’Islam reçût sa consécration, et où les deux armées se rencontrèrent. Dieu est Tout-Puissant. » [1]

    Ce cinquième doit être versé par le croyant, ou même par le scripturaire, qui a trouvé le métal ou le trésor dans une terre n’appartenant à personne, comme le désert. Ce qui reste de ce cinquième revient au découvreur. Mais, si ce dernier trouve le métal ou le trésor dans sa maison, ils deviendront sa propriété et il versera la zakât selon leur valeur respective sans attendre l’échéance d’une année.

  3. Les Shafiʿites prélèvent le quart du dixième, soit 2,5%, sur l’or et l’argent, et rien sur les autres métaux.

Personnellement, je considère que l’opinion des Hanbalites est la plus profitable pour les pauvres, car ce métal est un bien trouvé c’est-à-dire acquis sans effort ni dépense. Il en est de même pour le trésor caché, et le moins qu’on puisse faire humainement est d’en faire profiter les déshérités, en signe de reconnaissance à Dieu le véritable Bienfaiteur.

Si l’or, l’argent ou le trésor que l’on trouve n’atteint pas le seuil canonique imposable, il faut dans ce cas, ajouter sa valeur à celle des biens imposables que l’on possède déjà, et verser la zakât sur leur total s’il dépasse le seuil imposable.

Si l’on trouve le métal ou le trésor dans une maison ou un endroit appartenant à une personne, il faut le lui rendre car elle en est le véritable propriétaire.

Concernant ce que la mer rejette, comme les perles, le corail, l’ambre gris, il n’y a pas de zakât à prélever sur leur valeur conformément à l’unanimité des opinions des Ulémas, vu qu’aucun hadith n’a été rapporté à leur sujet.

La zakât imposée sur le métal est instituée dans le verset : « Ô Croyants, faîtes l’aumône des meilleures choses que vous avez acquises, et de ce, que nous avons fait sortir de terre pour vous. » [2] c’est-à-dire les métaux et les veines d’or et d’argent.

Tous les Imâms s’accordent sur le fait que les pauvres ont un droit sur les biens des riches, quelles que soient leurs dénominations à partir du seuil financier imposable.

Quant au cinquième, il est mentionné dans ce hadith : « Acquittez-vous du cinquième sur les trésors enfouis sous terre ».

Cependant, Al-Hasan Al-Bas se distingue des autres Ulémas, car, selon lui, il faut prélever le cinquième (20%) si le trésor se trouve dans un territoire de guerre, et 2,5% dans le cas contraire.

Parlons maintenant des métaux précieux travaillés.

La zakât des bijoux et des métaux travaillés

Les Ulémas sont en désaccord quant à la zakât à prélever sur l’or et l’argent travaillés. Il faut distinguer, selon leurs opinions, deux sortes de bijoux : ceux destinés à la parure, et ceux destinés au commerce.

Voici en résumé les opinions des trois Imams : Mâlik, Ibn Hanbal et Ash-Shafiʿî.

  1. Les bijoux destinés à la parure des femmes, mais sans exagération dans leur quantité, sont exempts de toute zakât.
  2. L’exagération dans leur quantité les assujettit à la zakât, car ils sont alors considérés comme une épargne pour les jours difficiles.
  3. Les bijoux dont l’usage est défendu aux hommes, comme les bagues, les bracelets et les colliers en or doivent être grevés de la zakât.

    Il en est de même pour les plats et les autres ustensiles en or et en argent, car ils seront considérés, dans ce cas, comme un accessoire de luxe défendu par l’Islam.

  4. Les bijoux destinés au commerce doivent être assujettis, à l’unanimité des savants, à la zakât.

L’Imâm An-Nawawî rapporte, dans son ouvrage intitulé Al-Majmûʿ (La somme) », que l’Imâm Ash-Shâfiʿî a dit : « L’or et l’argent travaillés sont grevés de la zakât, excepté les bijoux que portent les femmes comme parure, mais sans exagération dans leur quantité ».

Les articles 1 et 2 correspondent à l’opinion des trois Imâms susmentionnés. Les articles 3 et 4 correspondent à l’opinion des jurisconsultes ultérieurs.

Ibn Qudâmah dit dans son ouvrage intitulé Al-Mughnî (Le suffisant), renfermant les références du rite hanbalite : « L’usage des ustensiles en or et en argent est défendu indistinctement aux hommes et aux femmes. Ainsi, leurs propriétaires doivent prélever la zakât sur la valeur de leur poids. Si cette valeur n’atteint pas le seuil imposable, il faut l’ajouter à la valeur des autres biens possédés, et verser la zakât selon leur valeur totale. » Puis il ajoute : « Il n’est pas permis d’orner d’or ou d’argent les exemplaires du Coran, ni les mihrabs des mosquées (niches), ni employer des lampes en or ou en argent, car ils entreraient dans la catégorie des ustensiles. »

Quant à Abû Hanîfah, il exige le prélèvement de la zakât sur les bijoux et les objets en or ou en argent qu’ils soient destinés à la parure des femmes ou au commerce.

P.-S.

Ouvrage publié par le Conseil Supérieur des Affaires Islamiques d’Égypte, Al-Ahram Commercial Presses, 1993. Revu et adapté par Islamophile.org.

Notes

[1Sourate 8, Al-Anfâl, Le butin, verset 41.

[2Sourate 2, Al-Baqarah, La génisse, verset 267. NdT.

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