samedi 8 novembre 2003
L’objectif premier de l’Islam est la formation de "l’individu pieux", digne d’être le vicaire de Dieu sur terre, généreusement honoré par Dieu, créé sous la plus belle forme, et à qui Dieu soumit ce qu’il y a dans les cieux et sur terre. Il s’agit d’un individu qui réunit toutes les caractéristiques de l’humanité et s’élève au-dessus de la bestialité et de la sauvagerie. Cet individu pieux constitue la brique de base de la famille saine, de la bonne société et de la communauté droite.
L’homme éduqué par l’Islam est, avant tout, un homme de foi et de Credo, ayant une vision claire de lui-même et du monde qui l’entoure. Ce n’est pas une herbe sauvage poussant dans la broussaille sans semeur. De même, il a la conviction que le monde autour de lui n’est point apparu de lui-même sans Créateur le façonnant et le gérant. Le musulman croit qu’il a un Seigneur Qui l’a créé, modelé et constitué harmonieusement. Il lui a appris à s’exprimer en toute clarté. Il lui a fait don de la raison et de la volonté. Il lui a envoyé les Messagers, révélé les Livres Sacrés, en guise d’arguments ne laissant place à quelque excuse que ce soit. Il lui a fait connaître la finalité de son existence et lui a indiqué la voie à suivre pour sa félicité.
De même que ce monde merveilleux a un Créateur Qui créa toute chose en lui donnant ses justes proportions et Qui donna à chaque chose sa propre nature et la guida, il sera réduit à néant par l’Ordre divin et sera remplacé par un autre monde - celui de l’éternité où chacun sera rétribué selon son oeuvre, sans injustice aucune.
"Nous n’avons pas créé le ciel et la terre et ce qui existe entre eux en vain. C’est ce que pensent ceux qui ont mécru. Malheur à ceux qui ont mécru pour le feu (qui les attend) !" [1]
"Ceci ne dépend ni de vos désirs ni des désirs des gens du Livre. Quiconque fait un mal sera rétribué pour cela, et ne trouvera en sa faveur, hors d’Allah, ni allié ni secoureur." [2]
Ainsi le musulman vit-il avec sa foi en Dieu, en Ses Messages, en Ses Livres Sacrés et en Ses Messagers - le dernier Message étant celui du Prophète Muhammad - paix et bénédiction de Dieu sur lui. Le musulman croit au retour à Dieu - Exalté Soit-Il -, Son Jugement, Sa Justice, le Jour où, ni les biens, ni les enfants, ne seront d’aucune utilité, sauf pour celui qui vient à Dieu avec un cœur sain : "Ce jour-là, l’intercession ne profitera qu’à celui auquel le Tout Miséricordieux aura donné Sa permission et dont Il agréera la parole § Il connaît ce qui est devant eux et ce qui est derrière eux, alors qu’eux-mêmes ne Le cernent pas de leur science. § Et les visages s’humilieront devant Le Vivant, Celui qui subsiste par Lui-même (Al-Qayyûm), et malheureux sera celui qui (se présentera devant Lui) chargé d’une iniquité. § Et quiconque aura fait de bonnes œuvres tout en étant croyant, ne craindra ni injustice ni oppression." [3].
Cette foi est la caractéristique première du musulman. Il adhère à un Credo qui a pour essence le Monothéisme Pur (Tawhîd) qui signifie que Dieu est l’Unique Créateur et qu’Il est le Seul digne d’être adoré. C’est un monothéisme à la fois de la seigneurie (Rubûbiyyah) et de la divinité (Ulûhiyyah) [4], sachant que l’on ne peut se contenter de l’un et faire l’économie de l’autre. En effet, le Coran nous apprend que les polythéistes arabes croyaient que Seul Dieu était le Créateur de la terre et des cieux : "Si tu leur demandes : ’Qui a créé les cieux et la terre, et assujetti le soleil et la lune ?’, ils diront très certainement : ’Allah’ [...]." [5]. Malgré leur profession du monothéisme par rapport à la seigneurie, ils ont adoré d’autres divinités avec Dieu, sans la moindre preuve ni argument probant, en se basant seulement sur de fausses allégations : "Ceux-ci sont nos intercesseurs auprès d’Allah [...]." [6] et " [...]Nous ne les adorons que pour qu’ils nous rapprochent davantage d’Allah [...]." [7].
L’Islam est un Message libérateur majeur. Il vise à libérer l’individu de la servitude non vouée exclusivement à Dieu : la servitude envers la nature, ou envers quelque objet qu’il soit sur terre ou dans le ciel, la servitude envers les animaux, la servitude envers Satan, mais aussi sa servitude vis-à-vis d’un autre être humain, que ce soit un roi ou un devin. Il l’a même libéré de sa servitude envers lui-même et ses viles passions. Aussi le musulman adore-t-Il Dieu Seul, sans le moindre associé. C’est pour cela que lorsque le Messager de Dieu - paix et bénédiction de Dieu sur lui - envoyait des lettres aux rois et princes les invitant à embrasser l’Islam, il concluait son écrit par : " [...] Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions que Dieu, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors de Dieu [...]." [8].
L’individu façonné par l’Islam est aussi un être de dévotion et d’adoration de Dieu. Il sait pertinemment que le monde qui l’entoure fut créé pour lui, et il fut créé, quant à lui, pour Dieu Seul. C’est ainsi qu’il cerne la finalité de sa vie et le secret de son existence.
L’adoration de Dieu Seul, Exalté Soit-Il, sans associé, constitue son objectif ultime et sa finalité suprême. C’est pour cette adoration qu’il fut créé, et c’est pour elle, que ce qu’il y a sur terre et dans les cieux lui fut soumis. Dieu - Exalté soit-Il - dit : "Je n’ai créé les djinns et les hommes que pour qu’ils M’adorent § Je ne cherche pas de subsistance auprès d’eux ; et Je ne veux pas qu’ils me nourrissent. § En vérité, c’est Allah qui est le Grand Pourvoyeur, Le Détenteur de la force, l’Inébranlable." [9]
Les créatures sont les unes au service des autres, chaque espèce étant au service de ce qui lui est supérieur. Dans cette perspective, les minéraux inertes sont au service des plantes, les plantes quant à elles sont au service des animaux, les animaux à leur tour sont au service de l’homme. Et l’homme, au service de qui ?
L’être humain ne fut créé que pour être au service de Son Seigneur et Créateur, c’est-à-dire pour l’adorer, Lui Seul, sans lui associer quelque créature au ciel ou sur terre.
C’est par ce Message que Dieu envoya les Messagers à travers les époques : "Nous avons envoyé dans chaque communauté un Messager, (pour leur dire) : "Adorez Allah et écartez-vous du Tâghût [...]." [10]
"Et Nous n’avons envoyé avant toi aucun Messager à qui Nous n’ayons révélé : Point de divinité en dehors de Moi. Adorez-Moi donc." [11]
C’est ainsi que le musulman est dévoué à l’adoration de Dieu, Exalté et Glorifié Soit-Il. Il obéit à Ses Ordres, s’abstient de ce qu’Il a interdit, en ne perdant jamais de vue la crainte révérencielle et la piété envers Dieu car : "[...] Allah n’accepte que de la part des pieux." [12]
L’adoration de Dieu se cristallise tout d’abord dans l’accomplissement des oeuvres cultuelles majeures que l’Islam prescrit et établit comme piliers fondamentaux, tels la prière, le jêune, l’aumône légale, le pélerinage. Puis viennent s’ajouter le dhikr [13], l’invocation de Dieu, la récitation du Noble Coran, le tasbîh [14], le tahlîl [15] et le takbîr [16].
Le musulman mentionne son Seigneur à tout instant et dans toute situation : au moment de manger ou de boire, avant de se coucher ou à son éveil, le matin et le soir, en rentrant ou en sortant, le jour de son voyage ou celui de son retour, pendant qu’il met ses habits, ou lorsqu’il prend sa monture, et même lorsqu’il a un rapport intime avec son conjoint. En toute situation, il n’oublie pas de mentionner Dieu - Exalté Soit-Il. Cette attitude est le propre des gens doués de sens "qui, debout, assis, couchés sur leurs côtés, invoquent Allah [...]." [17]
Si la plupart des adeptes des autres religions n’adorent leur Seigneur qu’une fois par semaine, le musulman, quant à lui, à un rendez-vous avec son Seigneur cinq fois par jour, lors de ses prières prescrites. En outre, il est constamment avec Dieu par les prières surérogatoires, l’invocation de Dieu, et la demande de Son Pardon : "Ô vous qui croyez ! Evoquez Allah d’une façon abondante, et glorifiez-Le à la pointe et au déclin du jour." [18]
De cette manière, le musulman peut faire de sa vie une adoration permanente de Dieu, s’il observe la voie divine, et s’il vise par ses oeuvres, y compris celles relevant des choses de l’ici-bas, l’Agrément de Dieu - Exalté Soit-Il.
Outre le fait que c’est un homme de foi et de Credo, un homme de dévotion et d’adoration, le musulman est un homme de bonnes manières et de vertus. La pureté, sous sa forme parfaite, se cristallise en lui. Les vertus de la justice, de la miséricorde et de l’altruisme se manifestent en lui. En effet, le musulman prend pour noble modèle, la personne du Messager de Dieu que Dieu envoya pour parachever les nobles manières. Dieu le décrit comme étant "doué d’excellentes manières". Il convient de puiser dans sa lumière, suivre sa guidance, s’approprier ses nobes manières, afin d’être plus proche de lui le Jour du Jugement Dernier. Le musulman est un homme qui vainc ses penchants propres et ses passions. Il purifie son être par l’effort physique de la dévotion, l’effort spirituel contre la passion, et l’observance de Dieu, si bien que son ego passa du statut de "l’ego enjoignant le mal" à "l’ego qui ne cesse de se faire des reproches". C’est un être qui mérite "la réussite" (Al-Falâh) dès lors que, dans son combat intérieur, la piété vainc l’immoralité. Dieu - Exalté soit-Il - dit : "Et par l’âme et Celui qui l’a harmonieusement façonnée ; § et lui a alors inspiré son immoralité, de même que sa piété ! § A réussi, certes, celui qui la purifie § Et est perdu, certes, celui qui la corrompt." [19]
L’Islam nous apprend que les nobles manières et la vertu sont requises par le Credo. Elles sont nécessaires pour parachever la foi. Ce sont des fruits de la dévotion authentique. Si la dévotion ne porte pas ses fruits dans le champ des nobles manières et de l’éthique cela prouve que c’est une dévotion troublée.
Le Noble Coran traita de la foi incarnée dans les nobles manières et les vertus : "Bienheureux sont certes les croyants § ceux qui sont humbles dans leur prières § qui se détournent des futilités § qui s’acquittent de la Zakâh § qui préservent leur chasteté [...] § et qui veillent à la sauvegarde des dépôts qui leur sont confiés et honorent leurs engagements."
De même, le Noble Messager nous parla de la foi caractérisée par les nobles manières, les oeuvres pies et les vertus. Il dit, paix et bénédiction de Dieu sur lui : "Quiconque croit en Dieu et au Jour Dernier, qu’il honore ses liens de parenté. Quiconque croit en Dieu et en le Jour Dernier, qu’il ne nuise point à son voisin. Quiconque croit en Dieu et en le Jour Dernier, qu’il dise une bonne parole ou se tait." Il dit aussi : "La foi compte soixante-dix et quelques branches. La plus haute c’est Lâ Ilâha Illâ Allâh, et la moins élevée consiste à écarter le mal sur le chemin. Et la pudeur fait partie de la foi."
L’Imâm Al-Bayhaqî composa un ouvrage volumineux intitulé Al-Jâmiʿ li Shuʿab Al-Îmân (La somme des branches de la foi). Ce livre recouvre les vertus et les oeuvres pies auxquelles l’Islam appelle. Il les considéra toutes comme étant des ramifications de la foi, conformément au hadîth précité.
Les oeuvres cultuelles prescrites visent à élever l’âme par les vertus et à la purifier des vices. Le Coran témoigna de cela, lorsqu’il dit de la prière : "En vérité, la prière (salâh) préserve de la turpitude et du blâmable." [20] Il établit au sujet de l’aumône légale (zakâh) : "Prélève de leurs biens une aumône par laquelle tu les purifies et les bénis [...]" [21]
Dieu dit au sujet de la finalité même du jeûne : "Ô les croyants ! On vous a prescrit le jeûne comme on l’a prescrit à vos prédécesseurs, afin que vous atteigniez la piété." [22] Dans un hadîth selon Al-Bukhârî : "Celui qui ne s’abstient pas du faux témoignage et du mensonge, alors Dieu n’a guère besoin qu’il s’abstienne de manger et de boire." Et selon un autre hadîth : "Il se peut qu’un jeûneur ne récolte de son jeûne que la faim, et il se peut qu’un prieur n’obtienne par sa prière nocturne que la veillée." [23] L’éthique du musulman est une unité intègre et cohérente, à la différence du juif qui s’interdit l’usure avec ses coreligionnaires tout en la pratiquant avec les autres, ou le colon occidental qui, chez lui, manifeste éthique et vertus, mais dans les autres pays pille, lèse, se livre à l’injustice et suinte l’orgueil.
Le musulman est tenu d’être juste avec ceux qu’il aime et avec ceux qu’il déteste, avec le parent proche et avec son ennemi le plus farouche : "Ô vous qui avez cru ! Observez strictement la justice et soyez des témoins (véridiques) comme Dieu l’ordonne, fût-ce contre vous-mêmes, contre vos père et mère ou proches parents [...]." [24]
"[...] Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Soyez équitables, cela est plus proche de la piété. Et craignez Dieu. [...]." [25]
Traduit de l’arabe du site de Sheikh Al-Qaradâwî.
[1] Sourate 38, Sâd, verset 27.
[2] Sourate 4, An-Nisâ’, verset 123.
[3] Sourate 20, Tâhâ, versets 109 à 112.
[4] Cette formulation du sens du Tawhîd, distinguant l’Unicité de la seigneurie et l’Unicité de la divinité, est selon de nombreux savants artificielle et sans antécédent dans le Noble Coran, ni la Sunnah. Sheikh Al-Boutî estime ainsi que la seigneurie de Dieu c’est Sa divinité, et vice versa. NdT.
[5] Sourate 29, Al-ʿAnkabût, verset 61
[6] Sourate 10, Yûnus, verset 18.
[7] Sourate 39, Az-Zumar, verset 3.
[8] Sourate 3, Âl ʿImrân, verset 64.
[9] Sourate 51, Adh-Dhâriyât, versets 56 à 58.
[10] Sourate 16, An-Nahl, verset 36.
[11] Sourate 21, Al-Anbiyâ’, verset 25.
[12] Sourate 5, Al-Mâ’idah, verset 27.
[13] Le dhikr : la mention de Dieu, Exalté Soit-Il.
[14] C’est le fait de dire Subhân Allâh : Gloire à Dieu, ou toute autre formule dérivée. NdT.
[15] C’est le fait de dire Lâ Ilâha illâ Allâh, il n’y a d’autre divinité que Dieu. NdT.
[16] C’est le fait de dire Allâhu Akbar, Dieu est le Plus Grand. NdT.
[17] Sourate 3, Âl ʿImrân, verset 191.
[18] Sourate 33, Al-Ahzâb, versets 41 à 42.
[19] Sourate 91, Ash-Shams, versets 7 à 10.
[20] Sourate 29, Al-ʿAnkabût, verset 45.
[21] Sourate 9, At-Tawbah, verset 103.
[22] Sourate 2, Al-Baqarah, verset 183.
[23] Si l’oeuvre est dépourvue de son âme et de sa finalité, avec des entorses à la loi, il se peut qu’elle soit vaine et sans la moindre rétribution. Une telle oeuvre est une forme dont l’unique fruit est la fatigue. NdT.
[24] Sourate 4, An-Nisâ’, verset 135.
[25] Sourate 5, Al-Mâ’idah, verset 8.
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