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Les problèmes de la femme entre traditions stagnantes et traditions étrangères
Section : Comprenons l’Islam

Prisonnière de deux verrous : l’ignorance et la soumission

dimanche 30 décembre 2001

Je donnais une conférence dans un club au sujet des droits de la femme musulmane où je disais : "Elle a le droit d’appeler à Allâh, d’ordonner le bien et de réprouver le répréhensible, d’enseigner les préceptes de l’islam et d’en débattre avec les athées etc.". Alors un individu dit à son ami : "Nous croyions que ce conférencier était un homme pieux et voilà qu’il s’avère pire que Qâsim Amîn !"

Je me souvins du propos du professeur Ahmad Mûsâ Sâlim sur Qâsim Amîn et le rôle qu’il joua dans la défense de l’islam contre l’invasion culturelle française qui s’était attisé et ravivé à son époque... Cette invasion commença par une attaque de l’historien Ernest Renan sur les Arabes et les Musulmans contrée par Jamâluddîn Al-Afghânî. Ce dernier réfuta ses arguments, révéla son intolérance, et lava l’islam de ses mensonges. L’adversaire acharné s’assouplit et se plia à ce qu’il venait d’entendre !

Ensuite, le débat planifié reprit avec Sheikh Mohammad ʿAbduh qui répondit aux mensonges du ministre des Affaires Etrangères français M. Hanoto dont les calomnies vis-à-vis de l’islam et de son prophète - paix et bénédictions sur lui - se multipliaient. Sheikh Mohammad rédigea en une nuit un livre qui fit taire le ministre menteur.

Le professeur Ahmad Mûsâ dit : "Le rôle joué par Qâsim Amîn dans ce dialogue était prêt. Il était axé sur la femme dans la législation islamique. Le duel auquel il prit part fut avec le troisième adversaire français le Duc d’Harcourt auteur d’un livre publié en 1893 intitulé L’Égypte et les Egyptiens où il s’intéressait à la société égyptienne sous la domination des Mamelouks et des Turcs. Il s’agit d’une période aride longue de six siècles où les caractéristiques de la vie régressèrent chez les masses de la oummah musulmane. Ceci permit au Duc D’Harcourt d’employer sa plume malfaisante pour dépeindre une image obscure et vulgaire de l’ensemble du peuple et de réserver à la femme un surplus de diffamation et de mépris... Il attribuait tout cela à la nature même de l’islam qui serait réfractaire au progrès et à la civilisation !

Que fit Qâsim Amîn pour défendre sa religion et sa communauté ? Il s’empressa de rédiger un livre en français où il tria les propos de son adversaire. Il énonça les droits de la femme dans l’islam et ce que la religion lui garantit comme dignité matérielle et morale. Puis, il établit une comparaison entre le voile de la dignité et de la vertu et le dévergondage de la vie urbaine moderne et tout ce qui l’entourait concernant la femme en terme de dissolution et de dépravation !

L’oeuvre de Qâsim Amîn était régie par deux points : premièrement, la défense de l’islam tel qu’il est défini dans ses deux sources premières ; deuxièmement, le regret et l’attribution de la décadence de la femme à des coutumes étrangères aux instructions divines et émanant des erreurs des peuples !"

A l’évidence, l’homme ne pouvait pas faire autrement ! Supposons qu’un européen ou américain accuse l’islam d’empêcher la femme de se rendre à la mosquée et que, de ce fait, l’islam est une religion aberrante car toutes les religions n’empêche pas les femmes de se rendre à la maison de Dieu ni à un lieu de culte qui leur est dédié... Que puis-je lui dire ? Est-ce que je lui donne raison dans son accusation ? Ou bien, lui dis-je que cette interdiction ne fait pas partie des enseignements de l’islam et que cela provient des coutumes de certains milieux ? Est-ce que je défends l’islam en étant véridique ? Ou bien est-ce que je le défends par le mensonge ?

Je vis certains islamistes perdre leur raison dans la défense de coutumes héritées dépourvues de la moindre légitimité divine, comme s’il était facile pour eux que Dieu et Son Messager soient reniés pourvu que les coutumes reçues de leurs aïeux restent intactes !! Le faux dispose de gardiens dont le hululement atteint les horizons lorsque l’erreur est critiquée. Au début, je faisais peu de cas de ce hululement. Mais, je vis qu’il se transformait de jour en jour en une haine vis-à-vis des réformateurs et un attentat à leur honneur contre lesquels on ne pouvait se taire car la religion elle-même allait faire les frais d’un tel silence et ses vérités passeraient pour des mensonges...

J’entendis des gens insulter Jamâluddîn Al-Afghânî, Mohammad ʿAbduh et Rashîd Ridâ. J’entendis même des gamins porter atteinte aux rangs des Imâms illustres sans raison si ce n’est d’avoir soutenu des choses auxquelles leurs parents, non moins ignorants qu’eux, ne les avaient pas habitués. Je fus étonné que des individus religieux me réservent des propos plus durs que ceux tenus par les sionistes et les croisés à mon égard ! Alors je compris ce que disait monsieur ʿIsâm Al-ʿAttâr : "Si les prétendants à l’islam dépensaient dans le combat des ennemis de Dieu et des falsificateurs le dixième de l’énergie qu’ils dépensent dans leur lutte contre les alliés véridiques de Dieu, l’islam aurait triomphé depuis longtemps. Mais il y a des âmes qui s’activent dans le faux plus que pour la vérité et qui s’élancent derrière leurs passions et leur vie ici-bas plus que pour leur vie dans l’au-delà et l’obtention de l’agrément de Dieu, Exalté soit-Il..." Puis, ʿIsâm Al-ʿAttâr dit : "Combien je méprise ceux qui prétextent des grands principes pour desservir leurs intérêts les plus vils et leurs passions ! "

Ce propos résulte de la souffrance amère endurée par les gens sérieux qui appellent à Dieu. Nous sommes attachés à la révélation divine dont nous ne nous écartons pas d’un iota. Nous sommes attachés à l’époque du Prophète et des caliphes biens guidés. Quant au parcours historique de la oummah musulmane, il faut noter que l’histoire est forgée par des gouverneurs et par les attitudes des peuples et que ni les uns et les autres ne sont infaillibles. Bien au contraire, elles sont sujettes à l’erreur tout comme elles peuvent avoir raison. En d’autres termes, elles sont soumises au jugement et ne servent pas en elles-mêmes de référence, la référence infaillible étant le livre de Dieu et la voie de son prophète...

Je constate que vers la fin du temps de la jâhiliyyah et les débuts de l’ère islamique, la femme assistait au pacte d’Al-ʿAqabah sans la moindre objection. En outre, elle prêta serment sous l’arbre de mourir ou de ne pas fuir. En revanche, il ne lui serait pas permis vers la fin de l’histoire musulmane de faire une telle chose ! Qu’est-ce que cela veut dire ?

Laissons de côté le serment d’allégeance et les affaires supérieures des musulmans. J’assistai au début de ma vie à une lutte qui avait éclaté lorsqu’on eut découvert que Dr. Tâha Hussein avait autorisé à un nombre d’étudiantes de s’inscrire à la faculté de lettres dont il était le doyen... La position de la foi ou, plus précisément, la position des croyants, était contre. A l’opposé, le camp de l’athéisme (ou de l’hérésie) soutenait l’éducation de la femme jusqu’au plus haut niveau ! Quelle justice rend-on à l’islam dans cette lutte stupide ? La religion serait-elle du côté de l’ignorance alors que l’athéisme soutiendrait le savoir ? Jusqu’à quand laisserons-nous des gens mentir au nom de la religion ?

Je me suis entretenu avec les responsables au ministère des affaires religieuses en Algérie afin que soient tenus au sein des grandes mosquées des cercles, des prêches et des cours réservés aux femmes à des heures bien choisies et dispensés par des diplômées de l’université islamique ! J’ignore si nous réussirons dans cette initiative ou si les ignorants prétendants au savoir religieux qui hurlent de temps en temps que la voix de la femme est une ʿawrah l’emporteraient ! Ces gens qui hurlent ne sont pas dérangés le moins du monde par les expéditions d’évangélisation où les nones chrétiennes réussissent à atteindre leurs objectifs !

Ceux-là sont occupés par une seule chose : faire que la femme soit emprisonnée sous les deux verrous que sont l’ignorance et la soumission... et faire que la oummah toute entière chancèle sous l’emprise du retard culturel et politique à l’ère de l’atome et de l’espace.

P.-S.

Notes :

  1. Cet article est traduit du livre de Sheikh Muhammad Al-Ghazâlî intitulé Les Problèmes de la Femme Entre des Traditions Stagnantes et des Traditions Etrangères. Ce livre est une compilation d’articles de journaux destinés à une audience très large, il ne s’agit pas d’un traité de jurisprudence à proprement parler.

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