mardi 12 décembre 2006
Mais les Musulmans aujourd’hui sont instrumentalisés dans l’univers au bénéfice des puissants, après avoir perdu leur intelligence et leur sens du combat sur cette terre.
Les piliers de l’hypocrisie, ainsi que les a définis notre Prophète, sont le mensonge, la traîtrise, la perfidie et l’obscénité. Qu’avons-nous fait pour bâtir l’individu et la société sur les valeurs d’honnêteté, de loyauté, de fidélité et d’honneur ?
Nous avons abandonné la bonne direction et nous nous sommes mis à déclarer que l’hypocrisie est de deux sortes : l’hypocrisie au plan de la foi et l’hypocrisie au plan de l’action ; la première est infidélité ; la seconde est désobéissance ; l’infidélité n’est absoute qu’en prononçant la parole du monothéisme, alors que la désobéissance, si grave soit-elle, est renvoyée à la Volonté Suprême qui peut absoudre tous les péchés ; soyons donc optimistes...
De ces considérations a résulté un effondrement spectaculaire de l’édifice de la morale et un mépris effronté pour l’ensemble des vertus. Nul ne s’est soucié de montrer que l’hypocrisie au plan de l’action mène ceux qui la pratiquent à leur anéantissement, et que l’hypocrisie au plan de la foi naît le plus souvent de la perte de l’honneur, de l’honnêteté, de la loyauté et de la fidélité.
L’éthique individuelle, administrative et sociale qui prévaut chez nous est devenue quelque chose d’insupportable. Les hommes inventent des traditions qui leur permettent de se reposer après s’être fatigués, de se retrouver après s’être manqué et plus généralement de venir à bout des difficultés de la vie.
Mais nous, nous inventons des coutumes fondées sur les simagrées, l’ostentation et la dissimulation des vérités. Ainsi en est-il des coutumes relatives au mariage — lesquelles brisent les reins, suscitent des crises et laissent derrière elles un cortège de peines et de souffrances —, des coutumes relatives aux fêtes, et même des coutumes relatives au deuil.
Je puis dire que la religion fondée sur la prime nature de l’homme a cessé d’exister et qu’elle a été remplacée par quelque chose d’autre bâti sur des carcans, des fantasmes et une aseptisation générale.
La logique de la prime nature humaine a trouvé les moyens de s’exprimer et de se diffuser dans d’autres régions du globe, parmi des hommes faisant moins preuve que nous de simagrées et d’ostentation.
Les actes de culte sont une vérité. Il est en effet nécessaire de pratiquer la prière, le jeûne, le pèlerinage, etc. Mais je pose cette question : « Quelle est cette prière obligatoire ? »
Le Noble Coran dit : « Cherchez secours dans la patience et la prière : certes, la prière est une lourde obligation, sauf pour les humbles. » [1]
D’après la Sunnah purifiée, le dernier lien de l’Islam à être rompu sera la prière... Qu’est-ce que cela signifie ici ?
Cela signifie que la vraie prière est une lourde obligation, nécessitant des hommes aux cœurs présents et aux âmes élevées. Et c’est pourquoi son influence est si profonde sur la morale et l’action. Quant à la prière qui consiste à se tenir debout et à s’incliner niaisement, puis à partir, ce sera effectivement le dernier lien de la religion à être rompu. Et même si ce type de prière persiste, il ne servirait à rien, car la forme ne saurait remplacer le fond.
Je me sens humilié lorsque je vois que nos paroles sont errantes alors que les paroles d’autrui sont solidement fixées, ou lorsque je vois que nos actions sont incomplètes alors que les actions d’autrui sont accomplies. Je suis en droit de dire que le milieu dont telle est la production n’est pas l’œuvre de l’Islam. Nous devons nous hâter de changer cette contradiction entre notre religion et notre vie. Nous devons comprendre chaque personne se réclamant de cette religion ; nous devons comprendre que la chose est sérieuse et l’heure est grave ; nous devons comprendre que laisser cette anarchie persister davantage est le chemin vers l’infidélité, si ce n’est en soi de l’infidélité.
Traduit de l’arabe du livre de Sheikh Muhammad Al-Ghazâlî, Humûm Dâʿiyah, éditions Nahdat Misr, troisième édition, décembre 1998.
[1] Sourate 2, Al-Baqarah, La Vache, verset 45.
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