vendredi 25 avril 2003
Mais fort heureusement, notre homme a bien voulu nous donner des exemples montrant le développement de la pensée religieuse dans les domaines que sont le dogme, la morale, la politique...
Jetons un œil à son travail afin d’observer les stades de développement dont il a prétendu l’existence et le déroulement dans cette religion. Il dit à la page 37 :
« J’en voudrais citer un exemple qui est de la plus grande importance pour apprécier la pensée religieuse dans l’Islâm. D’après le monothéisme qoranique, le chirk (association) est le plus grand péché, pour lequel Dieu n’a point de pardon (31 v. 12 ; 4 v. 116). L’évolution de ce concept dogmatique primitif, telle qu’elle apparaît dans le hadîth, a conduit à flétrir comme chirk non seulement l’altération extérieure de la foi à l’unité de Dieu, mais encore toute espèce de culte qui n’est pas une fin en soi. On a aussi fait rentrer dans le domaine de ce péché une série d’imperfections morales. La dévotion hypocrite, dont le but est de gagner les suffrages ou l’admiration des hommes, est une sorte de chirk, car on y associe à la pensée de Dieu la considération des hommes. L’hypocrisie ne s’accorde point avec le vrai monothéisme. »
Autrement dit, le hadith stipulant que « la dévotion hypocrite est une forme de shirk » n’a pas été prononcé par le Messager. Il n’est en réalité qu’une figure du développement humain de l’Islam par laquelle a évolué le concept originel du monothéisme et par laquelle s’est étendue sa signification...
Il en est de même du hadith stipulant que « les actions sont jugées d’après les intentions » [1]. Cet orientaliste dit à son sujet qu’il a été inventé par les hommes. Il a été composé tardivement par des personnes de bonne foi voulant combattre l’extension de la bigoterie factice ! !
Ces propos sont totalement faux, et Goldziher les a établis en se fondant sur cette prétention selon laquelle la position du Coran vis-à-vis du shirk différerait de ces prolongements apparus plus tard dans la Sunnah. Le moindre coup d’œil aux propos tenus par le Coran au sujet de la dévotion hypocrite permet de démontrer la stupidité d’une telle conclusion.
Le Noble Coran associe en effet à maints endroits la dévotion hypocrite ou l’ostentation à la mécréance. Sourate 2, la Vache : « N’annulez pas vos aumônes en clamant votre générosité ou en causant un tort, comme celui qui dépense son bien par ostentation devant les gens sans croire en Dieu et au Jour dernier. » [2]
Dans la sourate 4, les Femmes, Dieu déclare son exécration pour tout présomptueux arrogant, parmi ceux qui lésinent à donner de leurs biens dans des œuvres charitables. Puis Il coordonne à ceux-là : « Et ceux qui dépensent leurs biens avec ostentation devant les gens, et ne croient ni en Dieu ni au Jour dernier. Quiconque a le Diable pour camarade inséparable, quel mauvais camarade ! » [3]
Il poursuit Sa diatribe contre les dévots hypocrites par cette interrogation : « Qu’auraient-ils à se reprocher s’ils avaient cru en Dieu et au Jour dernier et dépensé dans le bien de ce que Dieu leur a attribué ? » [4]
A la fin de la sourate 18, la Caverne, on remarque que les actes dont la finalité est autre que la Face de Dieu sont qualifiés de shirk : « Quiconque, donc, espère rencontrer son Seigneur, qu’il fasse de bonnes actions et qu’il n’associe dans son adoration rien d’autre à son Seigneur. » [5]
L’occasion à laquelle ce verset fut révélé est qu’un jour, on questionna le Messager au sujet d’un homme qui, œuvrant pour Dieu, aimait que les gens le vissent. Le Prophète se tut alors et la révélation que nous avons mentionnée descendit sur lui.
Où est donc cette prétendue évolution dans la définition de la dévotion hypocrite, et dans son élévation au rang de péché majeur ? La mesure de la laideur de ce défaut n’a pas changé à notre époque, fût-ce du poids d’un atome, par rapport à ce qu’il en était du temps de la révélation... !
C’en est ainsi, car le Noble Coran érige la valeur de l’action sur l’intention qui l’accompagne. Il dit ainsi au sujet des dépenses faites par les mécréants et les oppresseurs : « Ce qu’ils dépensent dans la vie présente ressemble à un vent glacial qui s’abat sur un champ appartenant à des gens qui se sont lésés eux-mêmes, et le détruit. » [6]
Il dit en revanche au sujet des croyants dévoués : « Et ceux qui dépensent leurs biens, cherchant l’Agrément de Dieu, et bien rassurés de Sa récompense, ils ressemblent à un jardin sur une colline. Qu’une averse l’atteigne, il double ses fruits. » [7]
Vous voyez donc comment le Coran méprise la dévotion hypocrite et ses gens. Quel est donc ce développement de la loi qui aurait poussé les croyants des générations postérieures à forger le hadith stipulant que que « les actions sont jugées d’après les intentions » [8] comme le prétend cet orientaliste ?
La signification est strictement la même. Rien ne s’est ajouté depuis l’avènement de l’Islam. Où est donc cette évolution temporelle qui a permis à la signification de s’élargir et de se développer ?... Nulle part...
Cette méthode de recherche nous dispense de poursuivre cet auteur outre mesure, et toutes les conclusions auxquelles il parvient s’en trouvent décrédibilisées !
Que pouvons-nous attendre d’un homme qui emploie tous ses efforts à prouver que l’Islam n’est pas une religion ? Il prétend ainsi que le Coran est un texte forgé par Muhammad, qui l’attribua ensuite à Dieu, et que la Sunnah est constituée de hadiths contrefaits par les hommes qui y assimilèrent les expériences et les coutumes des autres peuples puis qu’ils attribuèrent à Muhammad... !
Autrement dit, la Terre est portée sur une corne de bœuf, le tremblement de terre correspond au déplacement de celle-ci de la corne droite à la corne gauche... et l’on pourrait poursuivre ainsi le bovin raisonnement orientaliste qui justifie chaque mythe par un autre mythe, puis qui prétend qu’il n’est pas entrain de fantasmer... et qu’il mène une recherche scientifique honnête... ! !
Traduit de l’arabe aux éditions Nahdat Misr, cinquième édition, 1988.
[1] Hadith authentique rapporté par Al-Bukhârî, Muslim, At-Tirmidhî, Abû Dâwûd, An-Nasâ’î et Ibn Mâjah.
[2] Sourate 2 intitulée la Vache, Al-Baqarah, verset 264.
[3] Sourate 4 intitulée les Femmes, An-Nisâ’, verset 38.
[4] Sourate 4 intitulée les Femmes, An-Nisâ’, verset 39.
[5] Sourate 18 intitulée la Caverne, Al-Kahf, verset 110.
[6] Sourate 3 intitulée la Famille d’Amram, Âl ʿImrân, verset 117.
[7] Sourate 2 intitulée la Vache, Al-Baqarah, verset 265.
[8] Fragment d’un hadith authentique, rapporté par Al-Bukhârî, Muslim, Ibn Mâjah, Abû Dâwûd, An-Nasâ’î et At-Tirmidhî, sous la trame suivante : « Les actions sont jugées d’après l’intention, et il en sera tenu compte à chaque homme dans la mesure de son intention. Celui qui émigre [à Médine] recherchant Dieu et Son Messager aura émigré pour Dieu et Son Messager. Et celui qui émigre [à Médine] recherchant un bien matériel à acquérir ou une femme à épouser aura émigré pour ce à quoi il a émigré. » ; le hadith existe également sous la variante : « Les actions sont jugées d’après les intentions [...] » ; conférer Fath Al-Bârî, volume premier, hadiths n° 1 et 54.
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