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Défense du dogme et de la loi de l’Islam contre les atteintes des orientalistes
Section : Développement dogmatique

Goldziher et la théologie

mardi 6 janvier 2004

Je me suis volontairement étendu sur ce sujet afin que le lecteur saisisse, à la lumière de ce que nous venons d’établir, la valeur des jugements portés par Goldziher dans ce chapitre du développement dogmatique.

Il a tenu sur la théologie des propos mêlant le vrai et le faux, afin de trouver prétexte pour accuser l’Islam de ce dont il est innocent.

Nous ne nous intéressons pas à la justesse ou la fausseté de ses vues lorsqu’il critique les opinions et les doctrines des théologiens.

Ce qui nous intéresse, c’est de détruire ses mensonges alors qu’il cherche à faire croire aux gens que l’Islam et la raison ne font pas bon ménage, que les savants musulmans éprouvent des réticences face à l’argument rationnel, ou que les Muʿtazilites sont les seuls à avoir mené le mouvement de la libre pensée dans l’Islam.

Notre homme ment dans tous ces jugements, car il n’est aucune religion descendue du Ciel ni aucune autre créée de toutes pièces sur la terre qui ait accordé à la raison le respect et l’honneur que lui accorde l’Islam.

Les Muʿtazilites ne se distinguent pas des autres savants musulmans par le profond respect qu’ils réservent à la raison. Les Muʿtazilites se sont distingués pour avoir utilisé la raison là où elle n’est d’aucune utilité, tels celui qui cherche à créer un trou dans la mer avec une perceuse. Aussi aiguisée soit la mèche de la perceuse, et aussi profond soit le trou, l’issue sera tout aussi vaine. Il en est de même concernant l’étude rationnelle de la métaphysique et la tentative de connaître les vérités de l’Essence divine.

Si seulement les Muʿtazilites n’avaient pas étourdi la pensée islamique par ces errements de l’esprit !

L’Islam pose la base de ses enseignements et leur enceinte de protection à l’intérieur de la limite sur laquelle nous nous sommes longuement penchés.

Nous saisissons ainsi la véritable teneur des propos de Goldziher à la page 81 :

« Bientôt le rapprochement des Muʿtazilites avec le Kalâm donna au courant de leurs idées une tournure rationaliste et les poussa de plus en plus à faire montre de tendances rationalistes, dont la culture les conduisit à une opposition de jour en jour plus tranchée avec l’orthodoxie ordinaire.

Il nous faudra, en dernier jugement, les charger de maints traits antipathiques. Cependant un mérite leur reste intact. Ils ont, les premiers, élargi les sources de la connaissance religieuse pour y faire entrer un élément précieux, jusqu’alors sévèrement tenu à l’écart en cette matière, la raison (ʿaql). Quelques-uns de leurs représentants les plus célèbres allèrent même jusqu’à dire que la « première condition de la connaissance est le doute ». « Cinquante doutes valent mieux qu’une certitude » [1], et ainsi de suite. On pouvait leur attribuer cette opinion que, d’après leur méthode, il y avait un sixième sens en dehors des cinq autres : le ʿaql (la raison). Ils l’élevèrent au rang de critérium dans les choses de la foi. Un de leurs plus anciens représentants, Bichr b. Al-Muʿtamir de Baghdâd, dans un poème didactique sur l’histoire naturelle, conservé et commenté par Djâhiz qui partageait ses opinions, a dédié à la raison un véritable dithyrambe :

« Que la raison est magnifique comme exploratrice et comme compagne dans le mal et dans le bien !
« Comme juge, qui décide sur ce qui est absent, comme on prononce sur une cause présente ;
« … quelques-uns de ses effets, qu’elle discerne le bien du mal ;
« Par un possesseur de forces, que Dieu a distingué par une sanctification et une pureté plus haute. »
 »

Ensuite, il parle de « l’apparition, depuis le début du Xème siècle, de tendances moyennes qui distillèrent quelques gouttes de rationalisme dans l’huile de l’orthodoxie, pour sauver les vieilles formules du déchaînement des considérations rationnelles. Les expressions du dogme orthodoxe, atténuées par quelques fioritures rationalistes, dont l’allure dénote un retour à l’orthodoxie traditionnelle, sont liées aux noms d’Abu-l-Hasan al-Achʿarî (mort à Baghdâd 324/935) et d’Abû Mansûr al-Mâturîdî (mort à Samarqand 333/944). Tandis que le système du premier dominait dans les provinces centrales du monde musulman, celui du second fleurissait dans les pays orientaux et dans l’Asie centrale. Il n’y a pas de différences essentielles entre les deux tendances. […] En général, les idées des Mâturîdites sont plus libérales que celles de leurs collègues Achʿarites. Ils se tiennent d’un degré plus près qu’eux des Muʿtazilites. Citons-en un seul exemple, que nous offre leur divergence sur la réponse à cette question : quel est le fondement de l’obligation de croire en Dieu ?

Les Muʿtazilites répondent : la raison ; les Achʿarites disent : c’est parce que cela est écrit que l’on doit croire en Dieu, et les Mâturîdites : le devoir de croire en Dieu est fondé sur le commandement divin, mais celui-ci cependant est perçu par la raison ; ainsi la raison n’est pas la source, mais l’instrument de la croyance en Dieu. »

P.-S.

Traduit de l’arabe aux éditions Nahdat Misr, deuxième édition, janvier 1997.

Notes

[1Al-Ghazâlî était-il muʿtazilite lorsqu’il débuta sa réflexion par le doute ? !

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