lundi 5 décembre 2005
Les deux continents que sont l’Asie et l’Afrique rassemblent environ les deux tiers de l’humanité, et y fourmillent des religions diverses et variées.
Bien que le polythéisme y occupe encore une large superficie, l’Islam demeure la première religion monothéiste de ces deux continents. La foi musulmane est partagée par l’écrasante majorité des Africains, ainsi que par de nombreux peuples et grands pays asiatiques.
La colonisation occidentale, mue par de vieux instincts croisés, s’efforce d’affaiblir les forces de l’Islam, de déchirer son union, de troubler son parcours, de semer des obstacles devant ses peuples, et de fournir des efforts rusés pour amener les disciples de cette religion à en dévier et à s’en frustrer.
Nul doute que l’ère de l’attardement que vivent les Musulmans depuis deux siècles a aidé leur ennemi de manière très efficace, et a permis le succès d’un grand nombre de ses complots.
L’objectif que vise le colonialisme à long terme est de déraciner l’Islam de ses fondements et d’éradiquer les groupes qui s’y cramponnent.
Toutefois, au cours des longues étapes précédant la réalisation de cet énorme projet, il lui arrive de s’adoucir et de se radicaliser, de battre en retraite et de reprendre du terrain, de se montrer et de se cacher. Les efforts des orientalistes et des missionnaires chrétiens d’une part, et les plans des politiciens dans les domaines économique, militaire et culturel d’autre part, s’unissent pour parvenir à cette fin souhaitée.
Si nous avons pu constater par exemple ce qu’ont préparé les missionnaires chrétiens pour l’avenir de l’Islam en Indonésie, nous sommes également en droit de constater que l’atmosphère politique, dans ce pays et ailleurs, contribue de manière effective à réaliser les souhaits et les desseins du croisisme.
Ceci d’une part... D’autre part, afin de mieux maîtriser l’attaque lancée contre le monde musulman, hagard et ensanglanté, les forces de l’invasion missionnaire ont jugé utile de se réconcilier entre elles, et de dissoudre les vieilles divergences qui divisaient leurs rangs. C’est ainsi que les Catholiques, les Protestants et les Orthodoxes ont harmonisé leurs efforts, et ont fait en sorte que leurs Églises respectives se soutiennent mutuellement pour servir le Christianisme, face à leurs adversaires traditionnels.
Pour notre part, nous nous réjouissons d’apprendre la fin des vieilles hostilités entre les Églises ennemies, mais nous aurions aimé que cette union se fasse pour combattre l’athéisme et mettre fin à ses maux qui menacent l’humanité des pires catastrophes.
Est-ce là ce qui a poussé à rassembler les rangs adverses ? Ce n’est pas ce à quoi pensaient ces gens.
Tout ce que nous voyons démontre que cette rencontre s’est faite dans le but de préparer la confrontation avec l’éveil islamique, qui risque de surgir après que la plupart des pays de l’Orient se sont délivrés du colonialisme et après que les peuples somnolents se sont réveillés et ont commencé à inspecter leur conscience et leur raison, comme ils inspecteraient leurs poches et leur maison après une lutte amère contre les voleurs de consciences et d’argent...
Nous observons sur de nombreux fronts l’injustice pesant sur l’Islam et les Musulmans, et nous parvenons toujours à cette conclusion que ce sont les congrès organisés par l’activité missionnaire internationale qui sont derrière cette politique.
Les dignes représentants de l’Islam, jaloux de leur religion, ont accouru de toutes parts pour attirer l’attention de leur Communauté sur les menaces imminentes qui les guettent, succédant aux menaces déjà réalisées. Au Caire, s’est ainsi formé le Groupe pour le Rapprochement entre les Écoles de Pensée Musulmanes, réunissant l’élite des savants musulmans, sunnites et shîʿites, qui travaille à réunir les éléments dispersés de la Communauté et à reconstruire les parties avariées de son entité.
Voici un extrait des nouvelles rapportées par la revue du Groupe pour le Rapprochement, Risâlat Al-Islâm, qui lance un avertissement dénotant de la gravité de la situation :
« Écoutez Musulmans...
Le monde chrétien cherche aujourd’hui à constituer un bloc. Dans une volonté d’œcuménisme, les prêtres tentent de se réconcilier et de s’unir, malgré les différences essentielles qui existent entre leurs dogmes respectifs et entre les livres auxquels ils croient. Une activité ecclésiastique de grande envergure est menée pour la concrétisation de cet espoir. On organise des prières, on distribue des tracts... Les allocutions, les agences de presse, les conférences sont mobilisées pour soutenir et supporter vigoureusement le mouvement œcuménique de rassemblement et d’union. Que les Musulmans tendent l’oreille à ce qui se passe et qu’ils prêtent attention aux intentions et aux objectifs, à plus ou moins long terme, de ce mouvement.
Par ce bloc, on veut former un front uni qui fera face au message de l’Islam, après l’échec connu par les organisations missionnaires et les associations orientalistes de propagande colonialiste. Que Dieu agrée le Commandeur des Croyants ʿAlî Ibn Abî Tâlib qui dit dans l’un de ses discours :
« Grande est ma stupéfaction, stupéfaction me brisant le cœur, préoccupant mon esprit et augmentant ma détresse, lorsque je vois ces gens se soutenir mutuellement pour défendre leur erreur, et lorsque je vois dans le même temps votre incapacité à défendre votre bon droit, au point que vous êtes devenus une cible qu’on vise et qui ne vise guère, qu’on attaque et qui n’attaque guère. » »
S’il reste donc, parmi certains groupes de la Communauté islamique, des gens qui posent des obstacles sur le chemin de la concorde, qui œuvrent à semer la division et à faire ressurgir les méprisables haines ancestrales, nous leur adressons alors cette sage parole ʿalawite, consternés que nous sommes par leur position vis-à-vis de leurs frères croyants et de la position des ennemis de l’Islam qui œuvrent pour la réconciliation et l’union !
Voici quelques extraits de la dernière publication du Bureau chrétien de la communication :
Le thème de cette semaine de janvier 1961 portera sur le service : « Or, moi, je suis au milieu de vous à la place de celui qui sert » (Évangile de Luc, 22 : 27). C’est en même temps l’un des trois thèmes qui seront étudiés par l’Assemblée du Conseil Œcuménique des Églises (COE) qui se tiendra à New Delhi, Inde, entre le 18 novembre et le 6 décembre 1961. Le département Foi et Constitution du COE qui organise depuis plusieurs années la Semaine de l’Unité des Chrétiens vient de publier une petite brochure contenant des prières et des textes tirés de la Bible, tout comme il a publié un livret à l’intention des Catholiques romains traitant du même thème.
Le Professeur Lukas Vischer, secrétaire du département Foi et Constitution, a mis l’accent sur l’augmentation du nombre de participants à la Semaine de Prière, disant se réjouir personnellement de la participation des pays asiatiques à cette manifestation. »
C’est la première fois que l’Assemblée du COE se tient en Asie, les assemblées précédentes s’étant tenues respectivement à Amsterdam, puis à Evenston, aux États-Unis.
L’une des décisions les plus importantes qui seront prises au cours de l’Assemblée sera l’intégration au COE du Conseil International des Missions (CIM). Ainsi se réalise l’union des deux plus grandes instances chrétiennes internationales, la direction et la mission. L’Assemblée adoptera également une décision concernant la candidature d’adhésion au COE de l’Église orthodoxe russe.
On remarquera également qu’assisteront à l’Assemblée cinq observateurs catholiques officiels désignés par le Secrétariat du Vatican pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens. C’est la première fois que des observateurs catholiques officiels assistent à l’Assemblée.
Le thème central qui sera proposé à l’Assemblée, « Jésus-Christ est la lumière du monde », se subdivise en trois sous-thèmes : le témoignage, le service et l’unité. Le thème de l’unité sera abordé par le Professeur Joseph Sittler, théologien luthérien et professeur à l’Université de Chicago ; le thème du témoignage par le Professeur Devanandan, directeur de l’Institut Chrétien pour l’Étude de la Religion et de la Société à Bangalore (Inde) ; et le thème du service par le Professeur Takenaka, professeur à l’Université de Doshisha à Kyoto (Japon).
À partir de la séance plénière du dimanche après-midi, les représentants des Églises étudieront un projet de fusion du COE et du CIM. Une majorité de membres avait toutefois donné leur accord à ce projet.
Ainsi s’unifient les deux plus grandes instances chrétiennes, qui travaillent en ce XXe siècle à la promotion de l’unité des Chrétiens, pour ne former qu’une instance unique. »
Nous nous arrêterons sur cette dernière dépêche.
Les Chrétiens ont ainsi perdu le droit de prêcher leur religion parmi les Juifs, après la concorde qui a eu lieu dernièrement entre les deux parties... Ce qui a eu lieu aussi dernièrement entre Juifs et Chrétiens, c’est la création de l’État d’Israël sur les ruines de l’entité arabo-musulmane brisée en Palestine, grâce au soutien militaire et économique colossal de l’Angleterre, de la France et de l’Amérique. Ces trois pays sont tous des pays chrétiens ; ils se sont prêté main forte pour anéantir — de manière préméditée — la nation arabo-musulmane en Palestine, et pour séparer géographiquement les Musulmans d’Asie et ceux d’Afrique en deux morceaux qui n’ont plus aucune liaison terrestre entre eux...
Ces trois pays ont laissé s’exprimer, à travers ce crime, une rancœur refoulée et un désir sadique d’humilier la grande Communauté islamique et de menacer son avenir. Cette noire rancœur impérialiste fait l’objet de notre intarissable consternation !
Pourquoi ces gens portent-ils toute cette haine dans leurs cœurs ? S’ils ont décidé de se réconcilier avec les Juifs — malgré toute l’inimitié qu’ils se vouent mutuellement — pourquoi ne réfléchissent-ils pas à arborer de meilleures dispositions avec l’Islam et à faire preuve de plus d’équité envers les Musulmans ?
Cette farouche détermination à vouloir nous anéantir et nous humilier n’apportera que des malheurs successifs pour toute l’humanité.
Lorsque nous, Musulmans, constatons que la haine ressentie à notre encontre est enracinée de manière aussi profondément odieuse, nous n’éprouverons aucun remords à nous aider de toutes les forces disponibles pour nous défendre, et nous sommes excusés d’avance.
Les Juifs ont mis à profit l’aveuglement du fanatisme croisé anti-islamique pour créer leur État sur notre terre, avec la protection et l’appui des puissances chrétiennes. Ils n’ont même eu de vergogne à prétendre qu’ils étaient de vieux amis du Christianisme et de ses hommes ! Sous l’influence de la haine de l’Islam et de ses disciples, les Chrétiens ont cru à cette supercherie, oubliant la longue histoire dont les événements sont restés gravés pour l’éternité... Si seulement les Enfants d’Israël ressentaient un véritable amour pour le monde chrétien ou pour le monde musulman.
La conjoncture qu’ils traversent les pousse à sourire au visage de l’Angleterre, de la France et de l’Amérique, les pays de la déclaration tripartite qui prétend qu’Israël a été créé pour rester. Mais ces sourires artificiels ne sont que le tribut payé par Israël pour répondre à des besoins impérieux et à l’aide qui lui est accordée. L’histoire des Enfants d’Israël et des disciples de notre maître Jésus n’est faite, quant à elle, depuis vingt siècles, que d’une succession de haines séculaires et d’humiliations continuelles.
Si pouvait se dévoiler ce qu’abritent les consciences de ces gens, on ne découvrirait dans leurs cœurs que le mal hérité de leurs ancêtres, ainsi que les accusations immondes dont ils affublent la Vierge Marie et son noble fils vertueux.
Durant toute l’Antiquité et le Moyen-Âge, les Juifs se vantaient d’être les assassins de Jésus, fils de Marie, décrivant ce noble Messager comme un bâtard né d’une relation illégitime et portant à sa mère des accusations diffamatoires dont elle est innocente.
Le Noble Coran déclare que Dieu a déversé sur eux sa malédiction, en raison des crimes qu’ils ont perpétrés : « Nous les avons maudits à cause de leur rupture de l’alliance, leur incroyance aux révélations de Dieu, leur meurtre injustifié des prophètes, et leur parole : « Nos cœurs sont imperméables ». En réalité, c’est Dieu qui a scellé leurs cœurs à cause de leur infidélité, car ils ne croyaient que très peu. Et à cause de leur infidélité et de l’énorme calomnie qu’ils prononcèrent contre Marie, et à de cause leur parole : « Nous avons vraiment tué le Christ, Jésus, fils de Marie, le Messager de Dieu »... Or, ils ne l’ont ni tué ni crucifié ; mais ce n’était qu’un faux semblant ! » [2]
Mais voilà qu’aujourd’hui, pressés par le besoin des aides chrétiennes, les Juifs cherchent à se disculper des agissements dont ils ne se lassaient de s’enorgueillir dans le passé, et pour lesquels les Chrétiens ne se lassaient non plus de les persécuter. Ils prétendent désormais que de toute éternité, ils ont été les amis de tout le monde et que depuis l’avènement du Christianisme, ils ont toujours aimé le Christ et sa mère.
Les Juifs ont tellement d’audace qu’ils vont jusqu’à falsifier vingt siècles d’Histoire humaine. Mais le plus étonnant, ce n’est pas cette audace-là : c’est au contraire la naïveté de ceux qui les écoutent et qui les encouragent à aller de l’avant dans leurs prétentions. Tous les peuples chrétiens ressentent — pour ne pas dire saisissent — la portée de l’inimitié qu’ils inspirent aux Juifs. Même les Églises chrétiennes continuent encore à dire des prières et à accomplir des rites qui rendent absolument absurde un potentiel rapprochement entre Chrétiens et Juifs.
Si les Enfants d’Israël ont agi de concert avec le colonialisme irreligieux — que ses desseins ne soient pas bénis par le ciel —, alors le véritable monde chrétien doit réexaminer l’issue de cette alliance maudite et doit comprendre que les conséquences de celle-ci seront bien plus fâcheuses pour les agresseurs que pour le monde arabo-musulman.
Les pasteurs des églises peuvent appeler à la paix et s’efforcer de l’établir, mais ils doivent savoir que toute paix qui se fera au détriment des questions arabo-musulmanes n’aura aucun poids ni aucune durabilité : d’abord parce que les Musulmans s’acharneront à défendre leurs personnes et leurs choses sacrées, ensuite parce que les Chrétiens ne gagneront sûrement pas la sympathie des Juifs qui leur ont déjà porté atteinte dans le passé proche et lointain.
Les Juifs d’Israël et les organisations sionistes mondiales [3] veulent compromettre l’avenir de toute l’humanité et pousser les dirigeants des organisations internationales dans la voie de l’iniquité, de l’oppression et de la légitimation des injustices et des discriminations. Les pasteurs des grandes Églises ont mieux à faire d’éviter avec leurs peuples de répondre à ces intrigues et à ces complots.
Par ailleurs, les Musulmans doivent rassembler leurs rangs éparpillés par les coups de l’invasion moderne, et se cramponner à leur religion dans un combat de survie qui leur a été imposé par le destin.
Honte à eux s’ils se divisent pendant que leurs ennemis se réunissent de toutes parts, ou s’ils s’attardent sur le chemin du progrès alors qu’ils sont confrontés aux découvertes les plus récentes, ou encore si leur attachement à leur religion faiblit pendant que les adeptes des autres religions réaffirment le leur vis-à-vis de leurs dogmes respectifs, malgré les déficiences qu’ils contiennent.
Au nom de l’Islam, nous ne voulons pas qu’éclate une guerre entre les Gens du Livre et nous. Mais si nous constatons autour de nous un climat fait de sombres rancœurs et de trahison, alors nous n’aurons d’autre choix que de défendre nos territoires et notre foi.
Et il ne pourra y avoir de paix sur terre tant que persisteront le sionisme et le colonialisme. Il n’y aura de paix qu’entre les Musulmans et les Chrétiens et Juifs pacifiques.
Traduit de l’arabe du livre de Sheikh Muhammad Al-Ghazâlî, Difâʿ ʿAn Al-ʿAqîdah Wash-Sharîʿah Didd Matâʿin Al-Mustashrîqîn, éditions Nahdat Misr, deuxième édition, janvier 1997.
[1] Le nom de ce pasteur reste à vérifier. NdT
[2] Sourate 4 intitulée les Femmes, An-Nisâ’, versets 155 à 157.
[3] Tout au long de cet article, ce sont précisément ces deux groupes d’individus qui sont visés par la critique de l’auteur. Il ne s’agit pas d’englober toute personne de confession juive dans ce jugement car il existe bien des gens de bonne volonté qui œuvrent pour la réparation de l’injustice et le rétablissement de l’équité dans toutes les communautés. Puissent leurs voix devenir plus audibles. Ndlr.
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