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Défense du dogme et de la loi de l’Islam contre les atteintes des orientalistes
Section : Ascétisme et Soufisme

L’Islam ne s’étudie pas auprès des ignorants et des innovateurs

vendredi 7 mai 2004

Nous sommes tombé sur sur une lettre [1] adressée par Goldziher au Sheikh Tâhir Al-Jazâ’irî il y a environ soixante-dix ans. Dès que nous avons pris connaissance du contenu de la lettre, nous avons compris que notre homme était affairé à amasser des indices qui lui permettraient de conclure que l’Islam est en perpétuelle formation et qu’il se développe au fil des générations par le moyen de l’innovation ou du consensus.

L’orientaliste était en train de poursuivre les innovations soufies, puisqu’en les agglomérant et en les authentifiant, il lui serait possible de répandre la calomnie selon laquelle l’Islam se développerait à travers un effort humain, tout comme il serait né d’un effort humain.

Voici les derniers paragraphes de sa lettre :

« Honorable Sheikh, j’aimerais avoir des éclaircissements de votre part sur une question damascène dont je ne trouve pas la réponse dans les livres qui sont à ma disposition, malgré mon désir ardent d’ôter les doutes que je ressens en la matière.

J’ai lu en effet dans Khulâsat Al-Muh et Silk Ad-Durar d’Al-Murâdî, ainsi que dans d’autres ouvrages historiques et compositions de savants musulmans, que le Sheikh ʿAbd Al-Qâdir Ibn Muhammad Ibn Siwâr, mort à Damas en 1014 A.H. après son retour d’Égypte, avait été le premier à instituer cette bonne innovation, importée d’Égypte, qu’était l’organisation de groupes de dévotion spécialement réunis pour célébrer le Prophète. Ces groupes ont été connus sous le nom d’Al-Mahyâ An-Nabawî, la Célébration du Prophète, car ils avaient l’habitude de célébrer les nuits du lundi et du vendredi par des litanies et des invocations. La fonction de Sheikh Al-Mahyâ, maître de cérémonie et chef de groupe, se transmettait de manière héréditaire dans la famille siwârienne. Si l’un de ces Sheikhs venait à mourir, son fils prenait sa place à cette noble fonction.

Les endroits réservés à cette célébration sont un lieu-dit situé à l’Est de la Mosquée Omeyyade et qu’on a surnommé Mashhad Al-Mah, le lieu de la Célébration, et la Mosquée At-Tayrûzî sise près du tombeau de ʿÂtikah - que Dieu l’agrée - dans la périphérie de Damas. Mais j’éprouve un ardent désir à ce que vous m’informiez le plus tôt possible sur les questions suivantes :

  1. Les groupes mentionnés sont-ils encore actifs de nos jours en Syrie et dans ses environs ?
  2. Quel nom leur donne-t-on communément ? Portent-ils toujours le nom d’Al-Mahyâ, ou bien leur nom a-t-il changé ?
  3. Où ces groupes de célébration officient-ils à Damas ? Sont-ils toujours aux endroits précédemment indiqués, ou bien ont-ils été transférés vers d’autres endroits de la ville ?
  4. La fonction de Sheikh Al-Mahyâ se transmet-elle encore de manière héréditaire dans la famille siwârienne, comme aux onzième et douzième siècles, ou bien s’est-elle élargie pour s’ouvrir aux autres nobles familles syriennes ?

Faites-moi l’honneur, honorable Sheikh, de me fournir une réponse qui dissipera mes doutes, puissiez-vous en être récompensé par Dieu, le Très Généreux...

Fait à Budapest, le 5 Dhû Al-Hijjah de l’année 1301 A.H.

L’humble et pauvre Serviteur hongrois, Ignaz Goldziher

Supposons que le Sheikh Tâhir Al-Jazâ’irî ait répondu à l’orientaliste que toutes ces innovations existent de manière effective, cela signifierait-il pour autant que l’Islam se développe avec le temps ?

Les savants sont unanimes pour dire que si ces innovations ont des fondements inventés par des hommes, alors elles ne sont qu’égarement menant directement en Enfer. Et si elles ont quelque fondement religieux, comme l’invocation de Dieu ou la célébration de Son Messager, et que l’innovation ne touche que la manière dont elles sont accomplies par certains religieux outranciers, alors elles sont condamnées dans la mesure de l’apport humain qu’elles comportent.

À supposer à tort que les Musulmans décident un jour de pratiquer l’usure, cela signifie-t-il pour autant que la Législation islamique est abrogée ? La Législation est enracinée dans ses bases sacrées : le fait que les hommes en dévient, soit par désobéissance à la loi, soit par innovation religieuse, ne signifie en aucun cas que la Législation a changé au gré des nouvelles passions.

Mais, malgré tout, nous voici avec un Goldziher qui nous fait une bien piètre description de la chose, à la page 215, où il affirme au sujet de l’innovation ou bidʿah, que l’Islam a pourtant fermement condamnée :

« Durant quelques générations, les pieux théologiens grommellent contre la bidʿa ; mais avec le temps elle est, en tant qu’élément de l’idjmâʿ, tolérée et même, en fin de compte, exigée. Ce que l’on considère dès lors comme bidʿa, c’est d’y contrevenir ; celui qui réclame le retour au plus vieil usage est alors flétri comme « novateur » (mubtadiʿ).

Un exemple frappant en est offert par la fête populaire du mawlid al-nabî, anniversaire de la naissance du Prophète, répandue universellement dans tout le domaine de l’Islâm orthodoxe et célébrée avec la participation des sommités religieuses au commencement du mois de rabîʿ al-awwal. Au VIIIe siècle de l’hégire, sa conformité à la Sunna était encore contestée parmi les théologiens musulmans : beaucoup l’interdisaient comme bidʿa. Des fetwas furent données pour et contre. Depuis lors, s’appuyant sur la sanction populaire, elle est devenue partie intégrante et essentielle de la vie islamique. Il ne viendrait à l’esprit de personne de penser à son sujet à une bidʿa au sens péjoratif. Il en est de même d’autres fêtes religieuses ou cérémonies liturgiques qui, nées dans des siècles tardifs, ont dû d’abord lutter pour se faire reconnaître après avoir été longtemps stigmatisées comme bidʿa. »

Le Docteur Muhammad Yûsuf Mûsâ est revenu sur ces propos, écrivant :

« Goldziher dit que le ijmâʿ ou consensus est devenu un moyen permettant de valider certaines innovations, si celles-ci sont acceptées par les Musulmans.

Il s’agit d’un contresens commis par l’orientaliste sur la signification du consensus, lequel constitue une preuve juridique valable dans l’application des textes fondamentaux qui lui sont soumis.

Le ijmâʿ est en effet l’accord des juristes de la Communauté sur un jugement légal qui possède déjà un fondement dans les textes sacrés. Nous sommes donc bien loin d’une quelconque habitude prise pour telle ou telle raison par certains Musulmans et qui serait ensuite adoptée par certains autres, tandis qu’elle serait condamnée par les savants et les juristes.

Car une telle situation n’entre pas dans le cadre du consensus. La fête de l’anniversaire de la naissance du Prophète - que l’auteur prend pour exemple - ne fait donc pas l’objet d’un consensus dans le sens que nous venons d’expliciter. Il s’agit seulement d’une habitude faisant, aujourd’hui encore, l’objet de controverses religieuses.

Certains juristes avancent en effet des arguments plaidant pour l’abandon et l’interdiction de cette coutume. »

Mais cet imposteur d’orientaliste hongrois veut faire croire aux béotiens que l’Islam s’est formé au fil des générations, à partir de conceptions terrestres, non qu’il a jailli de sources célestes. Il a ainsi prétendu que le Coran était l’invention de Muhammad ! Puis que la Sunnah était l’invention de ses disciples ! Et enfin que cette religion a encore la capacité de se développer par l’assimilation de nouvelles idées au moyen du consensus populaire ou du développement temporel.

Et à cette fin, il tend sa main souillée vers tout ce qu’il voit, polluant ainsi tout ce qu’il touche.

Mais la nature de la vérité est plus grande que ces immondices : elle lave son essence des calomnies proférées contre elle par les calomniateurs, ne se laissant pas abuser par l’habit du savant neutre porté par ces derniers.

P.-S.

Traduit de l’arabe du livre de Sheikh Muhammad Al-Ghazâlî, Difâʿ ʿan Al-ʿAqîdah Wash-Sharîʿah didd Matâʿin Al-Mustashriqîn, éditions Nahdat Misr, deuxième édition, janvier 1997.

Notes

[1Le texte intégral de la lettre a été publié dans Majallat Al-Azhar (La Revue d’Al-Azhar), volume deuxième, vingt-cinquième tome, en 1373 A.H..

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