samedi 13 octobre 2001
Cette sourate est aussi bien appelée "Ad-Dahr" qu’ "Al-Insân", qui apparaissent tous deux au premier verset.
La plupart des commentateurs, dont l’érudit Az-Zamakhshari, l’Imâm Ar-Razi, Al-Qâdi, Al-Baydâwî, l’érudit Nidhâm Ad-Dîn An-Naysabûrî, le Hafidh (mémorisateur de Hadîth) Ibn Kathîr et bien d’autres, la considèrent comme une sourate Mecquoise et selon l’érudit Al-Alûsî, c’est l’opinion de la majorité des experts.
Toutefois, certains commentateurs pensent que cette sourate a été révélée à Médine, d’autres disent qu’elle fut révélée à la Mecque sauf les versets 8-10 qui seraient descendus à Médine.
De plus, en s’intéressant au contenu et au style de cette sourate, il apparaît qu’ils sont très différents de ceux des sourates Médinoises. Une étude préliminaire démontre que ce n’est non seulement une sourate Mecquoise, mais qu’en plus elle fut révélée durant la première période mecquoise, qui commença juste après la Révélation des sept premiers versets de sourate Al-Mouddathir.
Quant aux versets 8-10, ils prennent si naturellement place dans le sujet de la sourate, que s’ils sont lus dans le contexte adéquat, personne ne pourra affirmer que le thème les précédant et les suivant est descendu 15 à 16 ans plus tôt mais ces trois versets qui furent révélés quelques années plus tard furent insérés là de manière peu naturelle.
En réalité, le fait que cette sourate, ou quelques-uns de ses versets, soient révélés à Médine, repose sur une tradition que ʿAtâ’ a rapporté selon ʿIbn Abbas (qu’Allâh le bénisse). Il raconte qu’un jour alors que nos maîtres Al-Hasan et Al-Husayn étaient malades, le Saint Prophète et quelques compagnons les visitèrent. Ils demandèrent à notre maître ʿAlî de prier Allâh de guérir les deux enfants. C’est pourquoi, notre maître ʿAlî, notre dame Fâtimah et Fiddah, leur servante, firent serment de jeûner trois jours, si Allâh guérissait les enfants.
Ils se rétablirent par la grâce d’Allâh, et les trois commencèrent leur jeune comme juré. Comme il n’y avait rien à manger dans la maison, notre maître ʿAli emprunta trois mesures d’orge de quelqu’un (selon une autre tradition, ils furent gagnés en travaillant). Quand ils s’assirent le premier jour pour manger après la rupture du jeûne, vint un homme pauvre qui leur demanda de la nourriture. Ils lui donnèrent tout leur repas, burent de l’eau et allèrent se coucher. Le second jour quand ils s’assirent pour manger après la rupture du jeûne, un orphelin vint mendier. Ils donnèrent également leur repas en entier, burent de l’eau, et allèrent se coucher. Le troisième jour, alors qu’ils s’apprêtaient à manger après la rupture du jeûne, un prisonnier vint et leur demanda également de la nourriture. Encore une fois, tout le repas lui fut donné. Le quatrième jour, notre maître ʿAli prit ses deux enfants avec lui et partit voir le Saint Prophète, Paix et Bénédiction sur lui. Celui-ci, voyant la faible condition des trois, retourna avec eux à la maison de notre dame Fâtimah, qu’il trouva allongée dans un coin, à moitié morte de faim. Cela le toucha fortement.
Au même moment, l’Ange Gabriel (Paix sur lui) vint et lui dit : " Regarde, Allâh te félicite pour les vertus des gens de ta maison ! ". Quand le Saint Prophète lui demanda ce qu’il en était, il récita toute cette sourate en réponse. (Selon la tradition d’Ibn Mahran, il la récita à partir du verset 5 jusqu’à la fin. Mais ce que rapporte Ibn Marduyah d’Ibn Abbâs dit seulement que le verset Wa yut’imun-atta’am- et ils donnent à manger-...est descendu concernant notre maître ʿAlî et Hadrat Fâtimah, et ne mentionne aucunement cette histoire).
Ce récit a été raconté par ʿAli bin Ahmad al-Wâhidî dans son Commentaire du Coran, intitulé Al-Basît, et c’est probablement sur son récit que se sont basés Az-Zamakhsharî, Ar-Râzî, an-Naysabûrî et d’autres.
Premièrement, cette tradition est très faible à cause de sa chaîne de transmission. Ensuite, du point de vue du sujet, il est étonnant qu’un pauvre, un orphelin, et un prisonnier venant mendier de la nourriture, elle leur soit donnée en intégralité. Il aurait pu leur être offert une partie, et les cinq partager entre eux le reste. De plus, il est également invraisemblable que d’illustres personnes comme notre maître ʿAlî et notre dame Fâtimah, qui avaient une parfaite connaissance de l’Islam, considèrent comme un acte de vertu de laisser les deux enfants, qui venaient à peine de se rétablir et étaient encore faibles, affamés pendant trois jours consécutifs. Qui plus est, en ce qui concerne les prisonniers aussi, ce ne fut jamais une pratique d’un gouvernement Islamique, de les laisser quêter eux-mêmes leur nourriture. Puisqu’ils étaient prisonniers du gouvernement, c’était sa responsabilité de les nourrir et vêtir, et dans le cas d’une détention individuelle, il était aussi chargé de leur procurer nourriture et vêtements. Ainsi, il paraît impossible qu’à Médine un prisonnier doive mendier de la nourriture de porte en porte.
Toutefois, en écartant la faiblesse de la transmission, et envisageant la probabilité de cette histoire, même si le récit est véridique, ce qu’il démontre au plus c’est qu’à l’acte charitable des gens de la maison du Saint Prophète, Gabriel vint et apporta la bonne nouvelle qu’Allâh avait beaucoup apprécié leur bonne action, vu qu’ils avaient agi précisément dans la juste voie qu’Allâh avait ordonné dans ces versets de sourate Ad-Dahr.
Mais ceci ne nécessite pas forcément que ces versets soient descendus à cette occasion précise. C’est également le cas de nombreuses traditions qui traitent de l’occasion à laquelle la sourate fut révélee. Quand il est dit, pour certains versets, qu’ils sont descendus pour tel événement, cela ne veut pas forcément dire qu’il ont été envoyés pour cette occasion là, mais plutôt qu’ils illustrent parfaitement l’évènement mentionné. Ainsi selon le Hafidh Ibn Taymiyyah, cité par l’Imam As-Suyûtî dans Al-Itqân fi ʿUlum Al-Qur’ân : " Quand les rapporteurs déclarent qu’un verset est descendu pour un évènement particulier, cela implique parfois que cet évènement a vraiment déclenché l’envoi du verset, mais d’autres fois que le verset s’applique à l’évènement, mais que celui ci n’est pas la cause de sa Révélation ". Plus loin, il cite le point de vue de l’Imam Badr Ad-Dîn Az-Zarkashi, dans son livre Al-Burhân fi ʿUlûm al Qur’ân : " Il est bien connu, en ce qui concerne les Compagnons et leurs successeurs immédiats, qu’ils déclarent qu’un verset est descendu pour un sujet particulier, cela signifie que la sentence qu’il contient, s’applique à ce sujet, et non que le sujet ait occasionné la Révélation du verset. Ainsi, la sentence du verset n’est utilisée que pour soutenir un raisonnement, ou des conclusions, et non pour établir un fait" (Al- Itqân fi ʿUlûm Al-Qur’ân, vol. I, p. 31, Ed. 1929).
Le sujet de cette sourate, consiste à informer l’homme de sa condition réelle dans le monde, et de l’informer que s’il la comprend correctement et témoigne de la gratitude et de la reconnaissance envers Dieu, il serait bien récompensé à la fin. Cependant s’il adoptait la voie de l’incroyance , il aurait une funeste fin. Tout au long des sourates du Coran, ce thème est maintes fois abordé, mais une caractéristique particulière du style des premiers sourates révélées à la Mecque est que les sujets abordés tout au long de la période postérieure, ont été présentés brièvement, mais de manière efficace, de telle façon que ces phrases concises mais élégantes, étaient automatiquement retenues par l’auditoire.
Dans cette sourate, tout d’abord, à l’homme fut rappelé qu’il y eut un temps où il n’était rien, ensuite son humble début fut le mélange d’une goutte de sperme et un ovule dont même sa mère n’est pas consciente, même elle, ne savait pas qu’il a été conçu, ni n’importe qui d’autre pouvant voir la cellule microscopique pourrait dire que c’est un homme, qui dans le futur deviendrait la meilleure des créations sur Terre.
Après cela, l’homme fut prévenu ainsi : " Débutant ta création de cette manière, Nous t’avons développé et formé en ce que tu es aujourd’hui, dans le but de te tester et t’éprouver dans le monde. C’est pour cela, contrairement aux autres créatures, tu fus fait intelligent et sensible, et te fus montré le chemin et de la gratitude ainsi que celui l’ingratitude clairement de manière à les voir, dans le délai qui t’es imparti pour travailler, que tu apparaisses comme un serviteur reconnaissant à l’issue du test, ou un mécréant, et misérable ingrat ".
Puis, en une seule phrase, il fut arrêté de manière décisive quelle sera la fin que vont connaître dans l’Au-Delà, ceux qui sortiront incroyants de cette épreuve.
Après cela, du verset 5 à 22 sans interruption, les bienfaits dont seraient bénéficiaires ceux qui respecteraient les lois de la servitude dans le monde, sont décrits avec de nombreux détails. Dans ces versets ne mentionnent pas uniquement les meilleurs récompenses, mais, brièvement, quels sont les actes qui font qu’ils méritent ces récompenses.
Une autre caractéristique particulière des premières sourates révélées à la Mecque, est qu’à part introduire brièvement les croyances fondamentales et les concepts de l’Islam, ici et là, les qualités morales et actes vertueux y furent mentionnés, qui sont louables en Islam, ainsi que les mauvaises actions et moralité, que l’Islam s’efforce de réduire dans la vie humaine.
Et ces deux points ne furent non pas mentionnés dans le but de montrer quelles en sont les bonnes ou mauvaises conséquences dans la vie transitoire de ce monde, mais seulement dans le but de faire remarquer quels sont les conséquences qu’ils produiront dans l’éternité de l’Au-delà, sans tenir compte si une mauvaise qualité s’avère utile, ou si une bonne qualité s’avère nocive dans le monde.
Cela étant le thème de la première section(v 1-22). Dans la seconde section, s’adressant au Saint Prophète, Paix et Bénédiction sur lui, trois choses furent affirmées :
Puis, en une seule phrase, la cause réelle de la mauvaise attitude des mécréants fut déclarée : ils ont oublié l’Au-Delà et sont amoureux de ce monde. Dans la seconde phrase, ils sont avertis ainsi : " Vous n’êtes pas venus à l’existence par vous-mêmes : Nous vous avons crées. Vous n’avez pas créé ces larges poitrines, ces mains fortes et vigoureuses, et ces pieds par vous-mêmes, c’est Nous qui l’avons fait pour vous, et c’est dans Notre pouvoir de vous traiter comme il Nous plaît. Nous pouvons déformer vos figures, nous pouvons vous détruire et vous remplacer par une autre nation. Nous pouvons provoquer votre mort et vous recréer dans une quelconque forme qui nous plaise".
En conclusion, il est dit : Ceci est un Avertissement ; chacun devrait l’accepter et rejoindre la voie de son Seigneur. Mais la volonté propre et le désir de l’homme ne sont pas tout dans le monde. Aucun désir ni volonté de quiconque ne peut être satisfait si Allâh ne le veut pas. Et la volonté d’Allâh ne dépend pas du hasard : quoiqu’Il veuille, Il le veut par Sa Connaissance et Sa Sagesse. Il accorde Sa clémence à tous ceux qu’Il considère méritants Sa clémence, par Son Savoir et Sa Sagesse, et Il a préparé un douloureux châtiment pour ceux qu’Il a trouvé injustes et pervers.
Traduit de l’anglais du site de l’association des étudiants musulmans de l’USC.
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