samedi 12 mai 2001
Cette sourate tire son nom du verset 112, dans lequel le mot « Mâ’idah » se trouve. Comme pour le nom de beaucoup d’autres sourates, cette appellation n’a pas de relation spéciale avec le contenu de la sourate, mais a été utilisée simplement comme symbole pour la distinguer des autres sourates. [1]
Le thème de cette sourate indique, avec l’appui des traditions, que cette sourate a été révélée après le traité d’Al-Hudaybiyah, à la fin de l’an 6 ou au début de l’an 7 après l’hégire. Cela explique pourquoi cette sourate traite des problèmes survenus suite à ce traité.
Le Saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — accompagné de 1400 musulmans, était allé à La Mecque le mois de Dhul-Qiʿdah, en l’an 6 après l’hégire, pour effectuer la ʿUmrah [2] mais les Quraysh, animés par leur hostilité, tentèrent de l’en empêcher, bien que cela soit tout à fait contraire aux traditions religieuses antiques de l’Arabie. Après de multiples négociations, il fut conclu un traité à Al-Hudaybiyah dans lequel il fut convenu que la ʿUmrah pourrait être accomplie l’année suivante. C’était une occasion très appropriée pour enseigner aux musulmans la façon d’exécuter le pèlerinage à La Mecque avec une dignité islamique et de les encourager à ne pas empêcher les incrédules d’exécuter le pèlerinage à La Mecque comme une vengeance de leur mauvaise conduite : ce n’était pas si difficile pour les mécréants de traverser le territoire musulman pour se rendre à La Mecque. C’est pourquoi les versets préliminaires traitent des éléments liés au pèlerinage à La Mecque et le même thème a été repris aux versets 101 à 104. Les autres sujets de cette sourate semblent également appartenir à la même période.
La continuité du propos indique que la sourate a été révélée dans sa totalité en une seule fois. Il est également possible que certains versets aient été révélés ultérieurement et aient été insérés dans cette sourate à différents endroits bien appropriés. Mais il ne semble pas y avoir la moindre discontinuité à quelque endroit de la sourate prouvant qu’elle ait été révélée en plusieurs fois.
Cette sourate a été révélée pour satisfaire aux besoins engendrés par les changements de conditions qui étaient maintenant différentes de celles qui avaient cours au temps de la révélation des sourates de Âl-ʿImran et An-Nissâ’. Aussi, le choc résultant de la défaite à la bataille de Uhud avait rendu les environs de Médine dangereux pour les musulmans, mais désormais l’islam était devenu une puissance invulnérable et l’état islamique s’était étendu jusqu’au Nadj à l’Est, à la mer rouge à l’Ouest, jusqu’à la Syrie au Nord et jusqu’à La Mecque au Sud. La défaite que les musulmans avait essuyée lors la bataille d’Uhud n’a pas ébranlé leur détermination. Au contraire, cela les avait poussés à agir. Grâce à leur lutte continue et aux sacrifices inégalés, la puissance des clans environnants avait été brisée dans un rayon de 200 miles. La menace juive qui pesait sans cesse sur Médine avait totalement disparu et les juifs, dans les autres parties de Hijaz, étaient tributaires de l’Etat de Médine. Le dernier effort des Quraysh visant à annihiler l’islam a été contrecarré dans la bataille du Fossé. Suite à cela, il apparaissait tout à fait évident aux Arabes qu’aucune puissance ne pouvait supprimer le mouvement islamique. L’islam n’était alors pas seulement une croyance planant au dessus des esprits et des cœurs d’un peuple, mais était devenu un Etat dominant chacun des aspects des gens vivant en son sein. Ceci a permis aux musulmans de vivre leur vie sans entrave, conformément à leur croyance.
Un autre processus s’est développé parallèlement durant cette période. La civilisation musulmane s’était développée selon les principes et le point de vue islamiques. Cette civilisation se démarquait en tout point de toutes les autres civilisations et avait clairement distingué les musulmans des non musulmans dans leur comportement moral, social et culturel. Des mosquées avaient été construites sur tous les territoires, la prière avait été établie et un Imam avait été nommé pour chaque clan et habitation. Des lois islamiques civiles et pénales avaient été formulées en détail et mises en vigueur par les tribunaux islamiques. De nouvelles lois commerciales ont remplacé les anciennes. Les lois islamiques régissant le mariage, le divorce, la ségrégation des sexes, la punition de l’adultère, de la calomnie et de ce qui s’y rapporte avaient façonné la vie sociale des musulmans selon un moule spécial.
Leur comportement social, leur conversation, leur tenue vestimentaire, même leur mode de vie, leur culture, etc. avaient pris une forme qui leur est propre. En raison de tous ces changements, les non musulmans ne s’attendaient plus à ce que les musulmans retournent à leurs anciens us et coutumes. Avant le traité d’al-Hudaybiyah, les musulmans étaient si occupés dans leur lutte avec les Quraysh non musulmans qu’ils n’avaient pas le temps de propager leur message. Cet obstacle a été levé par ce qui semblait être en apparence une défaite, mais ce fut en réalité, une victoire à Al-Hudaybiyah. Ceci apporta aux musulmans non seulement la paix dans leur propre territoire mais aussi un sursis pour répandre leur message dans les territoires avoisinants. En conséquence, le Saint Prophète a adressé des lettres aux souverains d’Iran, d’Égypte et de l’Empire Romain, ainsi qu’aux chefs d’Arabie, les invitant à l’islam. En même temps, les émissaires de l’islam répandaient le message parmi les clans et les tribus et les invitaient à accepter la voie divine d’Allâh. Telles furent les circonstances de la révélation de sourate Al-Mâ’idah .
Trois sujets principaux y sont traités :
A la suite des commandements concernant le renforcement de la communauté musulmane donnée dans sourate An-Nissâ’, les musulmans ont été appelés à observer et à honorer toutes leurs obligations : des prescriptions supplémentaires ont été données pour éduquer les musulmans dans ce sens. Ils ont été particulièrement mis en garde contre la corruption par le pouvoir et engagés à honorer l’alliance scellée dans le Coran. Ils ont été également exhortés à tirer des leçons des erreurs de leurs prédécesseurs, les juifs et les chrétiens, qui ont été, à leur tour, exhortés à abandonner leur conduite répréhensible au profit du droit chemin et à accepter la guidance enseignée par le Prophète Muhammad — paix et bénédictions sur lui.
Versets 1 à 10 : Les croyants ont été exhortés à respecter scrupuleusement leurs obligations et à suivre les prescriptions divines concernant l’alimentation, la sexualité, la prière, la justice etc.
Versets 11 à 26 : Les musulmans ont été mis en garde contre les erreurs de leurs prédécesseurs. Ils doivent suivre le droit chemin et éviter le mauvais exemple des juifs et des chrétiens qui ont rompu leurs alliances et se sont égarés dans les voies du mal. Ces derniers, à leur tour, ont été exhortés à abandonner le mauvais chemin et à accepter l’islam.
Versets 27 à 32 : Le récit des deux enfants d’Adam a été relaté de manière à reprocher aux juifs leur complot visant à assassiner le Saint Prophète et ses Compagnons. Ce récit sert aussi à souligner le caractère sacré de la vie humaine.
Versets 33 à 40 : Pour atteindre cet objectif, des châtiments ont été prescrits contre ceux qui créent le chaos dans l’état islamique. Les croyants ont été incités à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour établir le droit chemin. Le caractère sacré de la propriété privée a été souligné.
Versets 41 à 50 : Le Saint Prophète (et les musulmans à travers lui) est assuré qu’il n’a pas à se soucier de l’inimité, des desseins maléfiques et des machinations des juifs. Il devait plutôt continuer à faire de son mieux pour établir le droit chemin conformément à la guidance coranique car on ne pouvait rien espérer de ceux qui ont abandonné leur propre Torah. Il devait traiter les chrétiens pareillement, car eux aussi ont abandonné l’Évangile.
Versets 51 à 59 : Les croyants sont avertis qu’ils ne doivent prendre pour alliés ou confidents ni juifs, ni chrétiens, en raison de la décadence de leur morale. De même, ils doivent être prudents quant aux desseins maléfiques des hypocrites et des mécréants. Ils doivent compter exclusivement sur les croyants. Les Gens du Livre sont invités à abandonner leur inimitié envers les croyants et sont appelés à suivre le droit chemin, car il n’y a nul salut en dehors de cela.
Versets 70 à 86 : La corruption des juifs et des chrétiens est rappelée. Les erreurs des chrétiens en matière de Tawhîd (Monothéisme Pur) sont particulièrement réprouvées. Cela dit, ils sont préférés aux juifs au cœur dur car il y a parmi les chrétiens des gens qui sont enclin à suivre la Vérité.
Versets 87 à 108 : Dans ce passage, des jugements légaux relatifs au licite et à l’illicite sont énoncés, en complément des versets 1 à 10.
Versets 109-119 : La fin de la sourate rapporte une conversation qui a lieu entre Dieu et Ses Prophètes le jour du Jugement dernier. Cela permet à ceux qui sont dans l’erreur de corriger leur Credo et de purifier leurs croyances. La conversation entre le Prophète Jésus est fournie afin d’avertir les chrétiens qui croient en lui, et pour mettre en garde, de façon générale, les gens qui nourrissent de faux espoirs à l’égard de leurs Prophètes.
Conclusion : Le verset 120 conclut en rappelant qu’à Dieu Seul appartient le royaume des cieux, de la terre et de ce qu’ils renferment. C’est pourquoi on est tenu d’être ses serviteurs dévoués et sincères. Il a — Exalté soit-Il — le pouvoir sur toute chose et Il est Omnipotent.
Traduit de l’anglais du site de l’association des étudiants musulmans de l’USC.
[1] Cette phrase prête à confusion. En fait, le nom des sourates renvoie toujours à l’un des thèmes qui y sont traités. On ne peut donc pas dire que le titre n’a pas de rapport spécial avec le contenu. NdT.
[2] ʿUmrah : le petit pèlerinage.
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