vendredi 5 avril 2002
La sourate tire son nom "Al-Ahzâb" du verset 20.
La sourate parle de trois événements importants qui sont : la Bataille de la Tranchée (ou Al-Ahzab : les Clans ou les Coalisés), qui eut lieu pendant le mois de Shawwâl, en l’an 5 après l’Hégire ; l’attaque contre les Banû Quraydhah, entreprise durant Dhul-Qiʿdah, en l’an 5 après l’Hégire ; et le mariage du noble Prophète avec Zaynab, contracté le même mois de la même année. Ces événements historiques déterminent exactement la période de la révélation de cette sourate.
La défaite de l’armée islamique dans la Bataille d’Uhud (en l’an 3 après l’Hégire) résultant de l’erreur des archers désignés par le noble Prophète a tellement contribué à renforcer le moral des païens arabes, des juifs et des hypocrites qu’ils se crurent bientôt capables d’exterminer complètement l’Islam et les musulmans. Leur bon état moral peut s’expliquer par les événements qui suivirent Uhud. A peine deux mois s’étaient écoulés lorsque la tribu des Banû Asad de Najd commença à préparer une attaque contre Médine. Le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — dut envoyer un contingent sous le commandement d’Abû Salamah
pour les neutraliser.
Au mois de Safar de l’an 4 après l’Hégire, certaines personnes des tribus d’Adal et de Qarah demandèrent au noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — d’envoyer quelques hommes pour les instruire sur l’Islam. Par conséquent, il permit à six de
ses compagnons de les accompagner pour ce projet. Mais à Raji (entre Rabigh et Jeddah), ils appelèrent Hudhail à se rebeller contre eux, qui tua quatre des compagnons et emmena les deux autres (Khubaib Ibn Adi et notre maître Zayd Ibn ad-Dathinnah) à la Mecque pour les vendre à l’ennemi.
Par ailleurs, en ce même mois de Safar, à la demande d’un chef des Banû ʿÂmir, le noble Prophète— paix et bénédictions sur lui — envoya une députation de quarante (selon d’autres soixante dix) prêcheurs afin de former les jeunes hommes Ansars, à Najd. Mais ils furent également trahis. Les gens d’Usayyah, Ri’l et Dhakwan,
des tribus de Banû Sulaym, les encerclèrent par surprise à Bi’r Maʿûnah et les assassinèrent tous. Pendant ce temps, la tribu Juive de Banû an-Nadir de Médine, grandement encouragée, continuait de violer les traités ; à tel point que durant Rabi’ul Awwal, de l’an 4 de l’Hégire, ils complotèrent contre la vie du saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — lui-même. Ainsi, pendant Jumâdâ Al-Ûlâ, de l’an 4, les Banû Thalbah et les Banû Muharib, deux tribus des Banû Ghatafan, entamèrent les préparatifs de l’attaque de Médine. Le saint Prophète dut les punir. Donc, encore après leur défaite à Uhud, les musulmans continuèrent à subir des répercussions pendant sept à huit mois.
Cependant, c’était la détermination du noble Prophète
— paix et bénédictions sur lui — ainsi que la sagesse et l’esprit de sacrifice de ses grands compagnons qui changèrent radicalement ces conditions défavorables en un laps de temps très court. Le boycott économique par les Arabes avait rendu la vie dure aux gens de Médine. Toutes les tribus polythéistes autour de Médine se rebellaient. A l’intérieur même de Médine, les mesquineries des juifs et des hypocrites furent vaines. Les avancées successives faites par une poignée de musulmans sincères, sous la direction du noble Prophète — paix et bénédictions sur lui —, ont non seulement rétabli l’image de force de l’Islam en Arabie, mais aussi permis d’augmenter le nombre de fidèles.
Le premier retournement de situation eut lieu immédiatement après la Bataille d’Uhud, lorsqu’on dénombra les blessés et pleura les martyrs. Le noble Prophète lui-même était consterné et attristé par la mort de son oncle, Hamzah. Ce même jour, il appela les fervents serviteurs de l’Islam à l’accompagner dans la poursuite des païens afin de les dissuader de toute nouvelle attaque contre Médine. Les calculs du noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — était absolument juste. Il savait bien que Les gens de Quraysh allaient regretter au cours d’une halte d’être parti aussi rapidement de Médine, sans tirer profit de leur victoire et qu’ils allaient vouloir revenir sur leurs pas. Aussi décida-t-il de partir à leur poursuite et, immédiatement, six cent trente musulmans proposèrent de l’accompagner. Quand ils atteignirent Hamra Al-Asad sur la route de la Mecque, ils campèrent là pendant trois jours, le temps que le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — prenne des renseignements. Il apprit d’un non-musulman sympathisant qu’Abû Sufyân était resté à Ar-Rawha, à 36 miles de Médine, avec une armée forte de 2 978 hommes, qu’ils regrettaient leur erreur et projetaient effectivement de retourner attaquer Médine. Toutefois quand ils entendirent que le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — s’était lancé à leur poursuite avec une armée, ils renoncèrent à leur plan. Par ailleurs, l’initiative du Prophète convainquit les ennemis vivant autour de Médine que les musulmans étaient menés par une personne sage et résolue, très bien informée. Par la promptitude de leur réaction, les musulmans prouvèrent qu’ils étaient, à jamais, prêts à donner leurs vies sur son simple commandement. (Pour plus de détails, voir l’introduction à la sourate 3, Âl Imrân.)
Alors dès que les Banû Asad commencèrent les préparatifs d’un raid sur Médine, les agents secrets du noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — l’informèrent sur leurs intentions. Avant qu’ils ne puissent entrer en force dans Médine, il envoya une armée de 150 hommes, sous le commandement d’Abû Salamah (le premier mari d’Umm Salamah) pour les punir. Pris au dépourvu, les Banû Asad tombèrent entre les mains des musulmans et fuirent de panique laissant tous leurs biens derrière eux.
Après cela, ce fût au tour des Banû an-Nadir. Le jour où ils complotèrent contre la vie du noble Prophète et où le secret fût révélé, le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — leur ordonna de quitter Médine dans les dix jours et promit la mort à ceux qui comptaient rester au-delà du délai. Abdullah Ibn Ubayy, le chef des hypocrites de Médine, les encouragea à défier cet ordre et à refuser de quitter Médine. Il leur promit même de les aider avec 2 000 hommes et leur assura que les Banû Ghatafan de Najd allaient les soutenir. Convainqus, les Banû an-Nadir envoyèrent le message qu’ils ne partiraient pas, et ce, quelque soit la réaction du noble Prophète — paix et bénédictions sur lui —.
Aussitôt que le délai fixé à dix jours vint à échéance, le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — mit le siège à leurs quartiers, et aucun de leurs partisans n’eût le courage de venir à leur secours. Ils finirent par se rendre à la condition qu’on leur permette, par groupe de trois, de charger un chameau avec ce qu’ils pourraient porter et partir laissant le reste de leurs biens derrière eux. Les faubourgs entiers de la ville qui avaient été peuplés par les Banû an-Nadir, leurs jardins, leurs forteresses ainsi que d’autres propriétés passèrent aux mains des musulmans. Les gens de cette tribu déloyale furent dispersés à Khaybar, wad il Qura et en Syrie.
Ensuite, le noble Prophète se concentra sur les Banû Ghatafan, qui préparaient une guerre contre Médine. Accompagné de quatre cent musulmans, il les rattrapa à Dhat ar-Riqa. L’effet de surprise était si réussi qu’ils fuirent de leurs maisons sans lutter et prirent refuge dans les montagnes.
Ensuite, pendant le mois de Shaʿbân de l’an 4 de l’Hégire, le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — se mit en route pour se combattre Abû Sufyân à Badr. A la fin de la Bataille d’Uhud, ce dernier avait défié le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — et les musulmans, en leur disant : "Nous vous rencontrerons à nouveau au combat, l’année prochaine, à Badr." En réponse le noble Prophète annonça par l’intermédiaire d’un compagnon : "D’accord : nous acceptons ton défi." Ainsi, quand le moment fût venu, il arriva à Badr avec 1 500 musulmans. De l’autre côté, Abû Sufyan était à l a tête d’une armée de 2 000 hommes, qui n’eurent néanmoins pas le courage de marcher au-delà de Marr-az-Zahran (nouvellement, Oued Fatimah). Le noble Prophète attendit à Badr pendant huit jours. Pendant ce temps, les musulmans conclurent de bonnes affaires commerciales. Cet incident contribua largement au rétablissement de l’image de puissance des musulmans ternie à Uhud. Il permit à toute l’Arabie de se rendre compte que Les gens de Quraysh seuls ne pouvaient plus résister à Muhammad — paix et bénédictions sur lui —.
Un autre événement vont renforcer la position des musulmans. Dumat Al-Jandal (nouvellement, Al-Jawf) était une ville importante à la frontière entre l’Arabie et la Syrie. Quand les caravanes des Arabes, commerçant entre le sud de l’Irak, le nord de la Syrie et le nord de l’Égypte, passaient par cette route, elles étaient harcelées et pillées par les habitants du pays. Durant Rabi Al-Awwal, de l’an 5, le noble Prophète partit lui-même réprimer les pirates avec une armée de 1 000 hommes. Apeurés, ils n’osèrent pas se battre contre le Prophète et s’enfuirent. Cela amena toute l’Arabie du
nord à redouter la puissance de l’Islam. Les tribus commencèrent à se rendre compte que la grande puissance émergeant d’Al-Madinah (Médine) était formidable contre laquelle une ou quelques tribus ne pouvaient plus rien.
Telles étaient les conditions quand la Bataille de la Tranchée eut lieu. C’était en fait un raid comIbné par de nombreuses tribus arabes, qui voulaient écraser la puissance de Médine. Il avait été initié par les leaders des Banû an-Nadir, nouvellement installés à Khaybar depuis leur exil de Médine. Ils avaient visité aux alentours Les gens de Quraysh, les Ghatafan et les Hudhayl et beaucoup d’autres tribus afin de réunir leurs forces et attaquer Médine conjointement. Ainsi, au mois de Shawwâl, de l’an 5, une attaque sans précédent fut lancée par une grande armée de tribus arabes marchant au pas contre la petite ville de Médine. Du nord venaient les juifs de Banû An-Nadîr et de Banû Qaynuqâʿ depuis Khaybar et wad il Qura. Depuis l’est avançaient les tribus de Ghatafan, Banû Sulaym, Fazarah, Murrah, Ashjaʿ, Saʿd, Asad, etc… et au sud Les gens de Quraysh, avec l’appui de la grande force de leurs alliés. Ensemble, ils représentaient une force de dix à douze mille hommes.
Si cela avait été une attaque soudaine, cela eut été désastreux. Mais le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui — n’était pas inconscient de cela à Médine. Des hommes d’intelligence et des sympathisants de l’Islam étaient présents dans chaque tribu pour le tenir parfaitement informé des mouvements de l’ennemi. Avant même que l’ennemi n’ait atteint la ville, il avait fait creuser pendant 6 jours une tranchée dans le nord-ouest de Médine, avec la Montagne de Salat derrière eux. Il y prit une position défensive avec 3 000 hommes sous la protection de la Tranchée. Au sud de Médine, les nombreux jardins (toujours existants aujourd’hui) ne permettaient pas une attaque de ce côté. A l’est les roches de lave étaient infranchissables pour une grande armée. Même chose sur le flanc sud-ouest. L’attaque ne pouvait seulement avoir lieu des côtés est et ouest de Uhud, dont le noble Prophète s’était protégé en creusant une tranchée. Les mécréants ne s’attendaient pas à la tranchée à l’extérieur de Médine. Ce type de stratagème défensif était inconnu des Arabes. Ainsi, ils durent entreprendre un long siège durant l’hiver, auquel ils n’étaient pas préparés.
Après cela, il ne restait plus qu’une alternative aux mécréants : inciter la tribu juive des Banû Quraydhah, qui habitait la partie du sud-est de la ville, à la rébellion. Comme les musulmans avaient signé un traité avec eux spécifiant qu’en cas d’attaque sur Médine ceux-ci devaient défendre la ville avec eux, les musulmans ne s’étaient pas prémunis. A vrai dire, ils avaient même envoyé leurs familles se mettre à l’abri dans les forts situés sur ce côté. L’ennemi avait décelé cette faiblesse dans le potentiel de la
défense Islamique. Ils envoyèrent donc envoyé Huyayy Ibn Akhtab, le leader juif des Banû an-Nadir, aux Banû Quraydhah afin de les pousser à transgresser le traité et à les rejoindre dans la guerre. En premier lieu, ils refusèrent au nom du traité conclu avec Muhammad (paix sur lui) qui avait toujours tenu ses engagements. Mais quand Ibn Akhtab leur dit : " Regardez, j’ai appelé la force unie de l’Arabie toute entière contre lui : c’est l’occasion parfaite de se débarrasser de lui. Si vous ne saisissez pas cette occasion, vous n’en n’aurez jamais d’autre."
L’esprit juif anti-islamique prévalut sur toute considération morale et les Banû Quraydhah rompirent le traité.
En apprenant la trahison, le noble Prophète demanda immédiatement à Saʿd Ibn Ubadah, Saʿd Ibn Muadh, Abdullah Ibn Rawâhah et Khawwat Ibn Jubayr, les chefs des Ansars, d’aller à la recherche de la vérité. S’il s’avérait que les Banû Quraydhah étaient restés fidèles au traité, ils devaient revenir et le proclamer ouvertement devant toute l’armée musulmane. Si la trahison était vérifiée, ils devaient l’en informer lui seul en vue de ne pas décourager la communauté musulmane. Les compagnons trouvèrent les Banû Quraydhah en plein complot. Ils leur répondirent ouvertement : "Il n’y a aucun accord et aucun traité entre nous et Muhammad." Après cela ils retournèrent auprès de l’armée islamique et soumirent leur rapport au noble Prophète, l’annonce de " Adal et Qarah." C’est-à-dire que "les Quraydhah s’étaient abaissés à ce que Adal et Qarah avaient commis envers les prêcheurs de l’Islam, à Raji."
Pendant ce temps, Nuʿaym Ibn Masʿûd, un membre de la branche Ashja de la tribu des Ghatafan, devenu musulman, se présenta devant le noble Prophète en soumission : "Personne ne sait encore que j’ai embrassé l’Islam. Tu peux me demander tous les services que tu voudras." Le noble Prophète répondit : "Va et sème les graines de la discorde parmi l’ennemi."
Nuʿaym commença par les Quraydhah avec qui il était en bons termes. Il leur dit : "Les gens de Quraysh et de Ghatafan peuvent finir par être
fatigués par le siège et s’en retourner sans rien perdre tandis que vous, vous devrez vivre ici avec les musulmans. Imaginez seulement quelle serait votre position si les choses prenaient cette tournure. Je vous conseille de ne pas vous joindre à l’ennemi avant qu’il ne vous ait envoyé quelques-uns de ses hommes en otages." Cela eut l’effet escompté sur les Banû Quraydhah. Aussitôt ils exigèrent des otages du front uni des tribus.
Ensuite, il se rendit chez les chefs des Quraysh et des Ghatafan et leur dit : "Les Banû Quraydhah semblent être lâches et hésitants. Peut-être exigeront-ils de vous quelques hommes en afin de les remettre ensuite à Muhammad (que la paix d’Allâh soit sur lui) pour arranger leurs affaires avec lui. Donc, soyez très fermes et prudents dans vos accords avec eux." Ce discours rendit les chefs du front uni soupçonneux des Banû Quraydhah. Ils leur envoyèrent un message disant : "Nous sommes fatigués par le long siège ; rendez cette bataille décisive et laissez-nous donc, faire un assaut général simultané des deux côtés." Les Banû Quraydhah envoyèrent en retour le message suivant : "Nous ne pouvons pas nous permettre de vous rejoindre dans cette guerre à moins que vous ne nous remettiez quelques uns de vos hommes en otages." Les leaders du front uni furent convaincus que Nuʿaym avait dit vrai. Ils refusèrent d’envoyer des otages. Et les Banû Quraydhah, de l’autre côté, avaient jugé bon le conseil de Nuʿaym. Ainsi,
la stratégie consistant à diviser l’ennemi en son sein fut un succès.
Le siège se prolongea plus de 25 jours. Les conditions hivernales rendirent les provisions en alimentation, eau et fourrage de plus en plus difficiles jour après jour. La division du camp pesait énormément sur le moral des assiégeants. Soudainement, une nuit, un vent de tempête accompagné du tonnerre souffla sur le camp et la foudre frappa. Ceci s’ajoutait au froid et à l’obscurité. Le vent avait renversé les tentes et mit l’ennemi sens dessus dessous. Ils ne purent supporter ce coup dur affligé par la nature. Ils quittèrent le champ de bataille la nuit même et retournèrent chez eux. Quand les musulmans se réveillèrent le lendemain matin, il n’y avait pas un seul soldat ennemi en vue sur le champ de bataille. Le noble Prophète — paix et bénédictions sur lui —, trouvant le champ de bataille complètement désert, dit : "Les gens de Quraysh ne seront plus jamais capables de vous attaquer après cela : dorénavant vous prendrez
l’offensive." Le Prophète vit juste. Les gens de Quraysh ainsi que le front uni de toutes les tribus ennemies avaient échoué dans leur assaut final contre l’Islam. Ils ne pouvaient plus envahir Médine car désormais les musulmans étaient prêts à menez une offensive.
A son retour des Tranchées, le saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — reçut une révélation de Gabriel en début d’après midi selon laquelle Allâh ordonnait aux musulmans de ne pas laisser les armes avant d’avoir combattu les Banû Quraydhah. A cette nouvelle, le saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — annonça : " Que ceux qui obéissent ne prient Asr qu’après avoir atteint
la localité des Banû Quraydhah. "
Il envoya immédiatement notre maître Ali avec un contingent de soldats en avant-garde chez les Quraydhah. A leur arrivée, les juifs grimpèrent sur leurs toits et commencèrent à lancer des injures sur le saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — et les musulmans. Mais cela ne les sauva pas des conséquences de leur trahison. Ils avaient effectivement rompu le traité au moment le plus crucial de la bataille et s’étaient alliés avec l’ennemi mettant ainsi en danger l’ensemble de la population médinoise.
Ils pensaient que le contingent dirigé par notre maître Ali n’était qu’une méthode d’intimidation. Ils réalisèrent seulement l’ampleur de la menace en voyant arriver toute l’armée islamique sous le commandement du saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — lui-même. Un siège de deux ou trois semaines suffit à la reddition des juifs. Ils acceptaient de se rendre aux conditions de notre maître Saʿd Ibn Muadh, le chef des Aus. Ils l’avaient désigné juge car à l’époque pré-islamique, les Aus et les Quraydhah étaient alliés. Aussi espéraient-ils qu’en mémoire de leurs anciens liens, il les aiderait à quitter Médine comme les Banû Qainuqa et les Banû An-Nadir. Les Aus eux-mêmes comptaient sur un jugement laxiste de notre maître Saʿd en faveur de leurs anciens alliés. Or notre maître Saʿd avait été témoin de l’attitude des deux tribus qui avaient été autorisées à quitter la ville. A peine les portes de Médine passées, elles s’étaient empressées de rassembler les hommes des tribus environnantes en une armée de dix à douze mille hommes. Il savait également la perfidie dont les Banu Quraydhah avait fait preuve au moment de l’attaque de Médine, traîtrise qui mit en danger tous les Médinois.
Au vu de tous ces éléments, il décréta que tous les hommes des Quraydhah soient mis à mort, que leurs femmes et enfants soient faits prisonniers et que leurs biens soient distribués aux musulmans. Sa sentence fut appliquée à la lettre. En pénétrant dans la citadelle, les musulmans trouvèrent un attirail de guerre préparé
par les traîtres : 1500 épées, 300 cotes de maille, 2000 lances et 1500 boucliers. Sans le secours d’Allâh, ce matériel de guerre aurait servi à attaquer Médine par l’arrière quand les polythéistes allaient donner l’assaut sur les musulmans après la traversée de la tranchée. Cette découverte ne rendit que plus sage la décision de notre maître Saʿd.
Les deux années qui séparaient les batailles de Uhud et des tranchées n’étaient pas de tout repos pour le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et ses Compagnons. Pas un seul jour, ils ne relâchèrent leurs efforts de construction de la société musulmane. C’est à cette époque qu’un certain nombre de règles régissant la vie sociale et économique (la législation du mariage, du divorce, de l’héritage, l’interdiction de l’alcool, du jeu…) furent instaurées.
Sur le plan social, la question de l’adoption nécessitait une réforme profonde. En adoptant un garçon, les Arabes considéraient l’orphelin comme un membre à part entière de la famille. Il était traité comme un fils et un frère au sein de la famille adoptive et avait donc droit à une part d’héritage Il ne pouvait épouser ni la fille de son père adoptif ni sa veuve. Si le fils adoptif mourait ou divorçait d’une femme, la veuve ou la femme divorcée était illicite pour le père adoptif car elle était comme sa vraie belle-fille. Ces coutumes étaient loin des lois édictées par Allâh à propos du mariage, du divorce et de l’héritage dans les sourates al-Baqarah et an-Nisa. En effet, les traditions donnaient droit à l’héritage à ceux qui ne pouvaient y prétendre aux dépens de ceux
qui y avaient réellement droit. Elles interdisaient l’union de l’homme et la femme qui pouvaient légalement contracter le mariage. Pire que tout, elles contribuaient à répandre l’immoralité que la Loi Islamique cherchait à éradiquer. En dépit du fait qu’une
mère, une sœur ou une fille adoptives ne peuvent remplacer une vraie mère, une vraie sœur et une vraie fille, les relations adoptives étaient assimilées aux liens du sang et faisaient partie des usages. Quand ces relations artificielles revêtues d’un caractère sacré se mêlaient librement aux véritables relations, cela ne pouvait qu’aboutir à des problèmes. Aussi la loi islamique concernant le mariage, le divorce, l’héritage et l’interdiction de l’adultère s’attacha-t-elle d’abord à régler le concept de l’adoption en
l’éradiquant complètement.
Cette redéfinition ne se fit pourtant pas du jour au lendemain sur simple prononciation de la loi. Il fallait autre chose que des paroles pour modifier l’héritage de plusieurs siècles. Certes les gens avaient accepté l’ordre selon lequel les relations adoptives ne pouvaient s’assimiler aux relations filiales réelles, néanmoins ils ne pouvaient se faire à
l’idée d’un mariage entre une mère adoptive et son fils adoptif, entre un frère adoptif et sa sœur adoptive, le père adoptif et sa fille, le beau-père adoptif et sa belle-fille. Par ailleurs, persistait le problème de la mixité. Il devenait par conséquent indispensable
que la coutume soit éliminée dans la pratique et ce à travers l’exemple du Prophète — paix et bénédictions sur lui — lui-même. Puisque aucun musulman ne pouvait détester ce que le saint Prophète faisait sous le commandement d’Allâh. C’est pourquoi, peu avant la bataille des Tranchées, Allâh inspira au Prophète — paix et bénédictions sur lui — d’épouser la femme divorcée de son fils adoptif, Zayd Ibn Harithah — qu"Allâh l’agrée —. Il se soumit à cet ordre durant le siège des Banû Quraydhah. (Le délai était certainement lié au fait que la période d’attente
prescrite n’était pas révolue et que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — était pris dans les préparatifs de guerre.
La conclusion du contrat de mariage déclencha une tempête à l’encontre du saint Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Les polythéistes, les hypocrites et les juifs brulaient tous de jalousie en raison de la succession de ses triomphes. L’humiliation subie deux ans après Uhud, durant la bataille des tranchées ainsi que l’affaire des Quraydhah continuaient à les toucher de plein cœur. Ils avaient espéré soumettre le Prophète — paix et bénédictions sur lui — sur les champs de bataille, mais devant leurs échecs ils se rabattirent sur cette affaire de mariage. C’était pour eux une aubaine et l’occasion de remettre en cause la supériorité morale du saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — qui faisait son pouvoir et de son succès.
Par conséquent, ils concoctèrent des histoires. Ils prétendaient que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — était tombé amoureux de la femme de son fils, que ce dernier l’apprit et décida de divorcer de son épouse de sorte que le Prophète — paix et bénédictions sur lui — puisse l’épouser. Cette rumeur était absurde. Notre dame Zaynab était la cousine du saint Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Ils se connaissaient donc depuis l’enfance et en aucun cas, il n’aurait pu y avoir de coup de foudre. Par ailleurs, il a lui-même arrangé le mariage de notre maître Zayd et Zaynab malgré l’opposition de sa famille. Ils ne pouvaient concevoir que la fille d’un noble quraysh puisse épouser un esclave affranchi. Notre dame Zaynab n’était pas non plus d’accord avec l’arrangement, mais c’était l’ordre du saint Prophète. Les noces furent tout de même célébrés illustrant que l’Islam avait élevé un esclave affranchi au rang de noblesse qurayshite. Si le saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — avait réellement désiré notre dame Zaynab, il ne l’aurait certainement pas marié à Zayd et l’aurait épousé lui-même. En dépit de cela, les honteux détracteurs de l’Islam inventèrent des romances et diffusèrent toutes sortes de rumeurs exagérées de façon
si impétueuse que certains musulmans y crurent.
Le fait que les légendes inventées par les ennemis deviennent des sujets de conversation parmi les musulmans dénote que les questions de la sensualité avaient dépassé toutes les limites. Si le mal n’était pas déjà présent, les esprits n’auraient
pas accordé d’importance à ces histoires absurdes et dégoûtantes sur la personne pure et droite qu’était le Prophète — paix et bénédictions sur lui —. C’est à cette occasion que les commandements réformateurs de la loi du hijab ou purdah furent mis en place dan la société islamique. Ces réformes furent introduites dans la présente sourate et complétées un an plus tard dans la sourate an-Nur, quand l’honneur de notre dame Aishah fut calomnié. (Pour les détails, voir l’introduction à la sourate an-Nur).
A cette même époque, il fallut examiner de plus près deux autres problèmes. Bien qu’en apparence, ils touchaient surtout la vie domestique du saint Prophète — paix et bénédictions sur lui —, il devint nécessaire d’y remédier afin de garantir la paix de l’esprit et du ménage à celui qui s’employait entièrement à promouvoir l’Islam. Allâh traita officiellement des deux questions.
Le premier problème était la situation économique précaire du saint Prophète. Pendant les quatre premières années, il ne disposait d’aucune ressource. En l’an quatre de l’Hégire, après le bannissement des Banû an-Nadir, Allâh ordonna qu’une partie de leurs terres lui soit réservée, mais cela ne couvrait pas les besoins de sa famille. D’autre part, la mission du Prophète était si lourde qu’elle exigeait de lui à tout instant toute son énergie. Il ne pouvait donc pas gagner sa vie. Ses épouses finirent par troubler sa
paix en se plaignant des difficultés économiques.
Par ailleurs, avant de se marier avec notre dame Zaynab, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — avait déjà quatre épouses : notre dame Saudah, notre dame Aishah, notre dame Hafsah et notre dame Umm Salamah. Les opposants de l’Islam s’interrogèrent (et parvinrent à faire douter quelques musulmans) sur le fait que le saint Prophète puisse avoir cinq épouses alors que les musulmans étaient limités à quatre.
Telles étaient les questions qui préoccupaient le saint Prophète — paix et bénédictions sur lui — et les musulmans quand la sourate al-Ahzab fut révélée.
Les thèmes et le contexte démontrent que la sourate n’a pas été révélée en une seule fois. Elle consiste plutôt en une succession d’injonctions et de commandements, successivement révélés à mesure des événements. Les différentes parties se distinguent clairement :
Jusque la fin de la sourate, les versets suivants réprimandent les hypocrites et autres méchantes pour les rumeurs qu’ils ont colportées contre l’Islam et les musulmans.
Traduit de l’anglais du site de l’association des étudiants musulmans de l’USC.
© islamophile.org 1998 - 2024. Tous droits réservés.
Toute reproduction interdite (y compris sur internet), sauf avec notre accord explicite. Usage personnel autorisé.
Les opinions exprimées sur le site islamophile.org sont celles de leurs auteurs. Exprimées dans diverses langues étrangères, ces opinions sont mises à la portée des lecteurs francophones par nos soins, à des fins d'information, de connaissance et de respect mutuels entre les différentes cultures et religions du monde.